La stratégie thérapeutique dans l’ostéoporose se fonde sur le risque fracturaire à 10 ans évalué par le score de Frax intégrant des facteurs de risque classiques d’ostéoporose et la DMO. Ces dernières années ont vu émerger d’autres facteurs de risque de fractures, d’autant plus piégeants que la DMO est normale ou peu abaissée, constituant des ostéopathies fragilisantes à densité osseuse normale.
Des ostéopathies fragilisantes à DMO normale
Les fractures ostéoporotiques majeures surviennent dans la moitié des cas pour des DMO intermédiaires voire subnormales chez des femmes dont la qualité osseuse est altérée du fait de l’âge, de l’obésité, d’un diabète, d’un traitement anti-aromatases. « Cette entité d’ostéopathie fragilisante à densité osseuse normale s’est développée depuis une dizaine d’années, après que des études épidémiologiques aient mis en évidence un sur-risque de fractures chez les diabétiques, lié à une glycation des protéines et aux interactions entre les hormones impliquées dans le diabète et l’os », explique le Dr Briot. Dans ces pathologies, la DMO n’est pas vraiment informative, et le recours à un spécialiste est recommandé dans les cas où il n’y a pas de corrélation entre DMO et survenue de fractures de fragilité. Au point de vue thérapeutique, on a peu de données spécifiques lorsque la DMO est normale, voire élevée, mais il est vraisemblable qu’il faut traiter le risque fracturaire de la même façon. La durée de traitement pourrait être différente, dans la mesure où on ne vise pas à augmenter la DMO mais à prévenir le risque de fracture à court terme, et serait à reconsidérer après deux ans de traitement.
Le risque fracturaire imminent plus pertinent ?
Le concept de risque de fracture « imminent », ou plus exactement de fracture à court terme, a émergé très récemment. Le FRAX évalue la probabilité à 10 ans d’une fracture majeure ostéoporotique, un objectif qui paraît bien lointain pour les patientes, en particulier les plus âgées, et pour les médecins. Vu les difficultés à maintenir une bonne observance dans l’ostéoporose, il semble essentiel de se concentrer plutôt sur le risque fracturaire à court terme. Le risque majeur de fracture est l’antécédent de fracture récente, le risque étant maximal dans les deux ans qui suivent, mais moins de 15 % des fractures sévères bénéficient d’un traitement pour prévenir la récidive ! La seule étude rétrospective évaluant les facteurs de risque de fracture à court terme, menée à partir d’une population issue de Medicare, montre clairement une corrélation avec le risque de chutes et les antécédents de fracture récente, les facteurs osseux comme la DMO ne ressortant pas. La notion de fracture récente influençant la décision thérapeutique, il est indispensable de rechercher une fracture passée inaperçue. Au niveau vertébral en particulier, 70 % des fractures vertébrales ne sont pas symptomatiques, et la mesure de la taille et la douleur ne sont pas toujours fiables. Aussi faut-il au moindre doute demander une radiographie de rachis ou une VFA (méthode densitométrique d’évaluation des déformations vertébrales), qui permet d’obtenir des clichés de face et de profil du rachis dans le même temps que l’ostéodensitométrie mais n’est pas remboursée actuellement. L’existence d’une fracture vertébrale survenue pour un faible traumatisme signe la fragilité osseuse beaucoup plus sûrement que la DMO.
Priorité à la prévention des fractures
« Il est impensable de voir encore des patientes après plusieurs factures alors qu’elles auraient pu être en partie prévenues par la prévention des chutes, l’activité physique et un traitement de l’ostéoporose le plus efficace, le plus rapidement possible », insiste la rhumatologue. Aucun traitement n’a été spécifiquement étudié pour prévenir les fractures à court terme, mais on a des données montrant que certains sont efficaces dès le sixième mois en privilégiant les traitements par voie parentérale. On devrait bientôt disposer d’un inhibiteur de sclérostine, le romosozumab, ostéoformateur très puissant et d’action très rapide.
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