En matière de lutte contre la sclérose en plaques (SEP), de nouvelles pistes de recherche se dégagent, comme l’a souligné l’Institut du cerveau (ICM) lors d’une conférence de presse organisée en amont de la Journée mondiale consacrée à la maladie.
Meilleure compréhension des mécanismes physiopathologiques
Comme le rappelle le Pr Catherine Lubetzki, neurologue et chercheuse de l’institut, ces dernières décennies, la science avait déjà permis des progrès importants.
Ainsi, d’un point de vue sémiologique, on sait désormais qu’il existe globalement deux formes de SEP : une maladie primaire progressive (SEP-PP), d’emblée évolutive, et une forme récurrente-rémittente (SEP-RR), qui avance lentement par poussées et peut s’ouvrir sur une phase secondairement progressive.
En termes physiopathologiques se dégage un mécanisme incluant trois composantes – inflammatoire, démyélinisante, neurodégénérative. Une cascade inflammatoire se déclencherait dans le système nerveux, détruisant la gaine de myéline des axones, perturbant la conduction de l’influx nerveux et fragilisant les neurones touchés, précipitant leur mort.
Des médicaments ciblant la composante inflammatoire de la SEP ont émergé. Cependant, malgré leur optimisation progressive, ces immunothérapies ne sont efficaces que sur les SEP-RR, et non sur les SEP-PP. « On n’arrive pas (non plus) à empêcher la survenue de la phase secondairement progressive », ajoute le Pr Lubetzki. En fait, le problème qui se pose concerne la progression silencieuse (silent progression) de la maladie. « C’est un concept qui a émergé il y a deux à trois ans (devant) des patients qui sont traités, qui n’ont plus de poussées et qui, malgré ça, (voient) apparaître un handicap », rapporte-t-elle. Un processus qui serait lié à une neurodégénérescence indépendante de la réaction inflammatoire.
Lutter contre la neurodégénérescence
Si le phénomène est encore mal compris, deux pistes de développement de traitements permettant de contrer cette neurodégénérescence sont déjà avancées. À commencer par celle de la neuroprotection, explorée également dans d’autres maladies neurodégénératives. Cependant, cette stratégie se révèle difficile à mettre en œuvre, faute « de site thérapeutique clair », déplore le Pr Lubetzki.
Pour la neurologue, la voie de la remyélinisation de l’axone semble plus prometteuse. Car « on sait que la SEP est une maladie dans laquelle il y a des capacités d’amélioration, de récupération (…), et il a été montré qu’en favorisant la remyélinisation de l’axone, on le protégeait, on empêchait (le neurone) de mourir ».
Pour développer ces nouveaux traitements, l’idée est de s’inspirer des sujets « bons myélinisateurs ». Comme l’explique la neuro-immunologiste Violetta Zujovic, certains patients semblent présenter de meilleures capacités de réparation de la myéline que d’autres. Afin d’identifier l’origine de cette aptitude, un modèle animal humanisé a été développé à l’ICM. Partant de l’hypothèse que certaines cellules immunitaires seraient en fait impliquées dans la remyélinisation, « on a greffé (à des souris sans système immunitaire adaptatif) des cellules immunitaires de patients plus ou moins bons myélinisateurs, et on a provoqué un processus de démyélinisation chez ces souris. On a obtenu des souris qui se réparaient toutes seules (et d’autres) qui n’y arrivaient pas. » Certaines molécules et sous-populations de lymphocytes associées à une bonne remyélinisation ont ainsi pu être identifiées.
La stimulation du nerf optique à l’étude
Une perspective de traitement non médicamenteux s’ouvre aussi. Comme l’explique le Dr Céline Louapre, neurologue et directrice du centre d’investigation clinique à l’ICM, la science fondamentale ayant montré in vitro que l’accélération de l’influx nerveux le long de l’axone favorisait la remyélinisation, « on est arrivé à l’idée selon laquelle (…), pour favoriser la réparation, il faut stimuler (in vivo) cette activité électrique ». Ainsi, un essai thérapeutique centré sur la stimulation du nerf optique serait conduit à l’ICM. « Trois quarts des patients inclus ont terminé leur suivi », indique le Dr Louapre.
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