Rhumatologie

Lombalgies chroniques : penser au reclassement professionnel

Publié le 13/05/2016
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Les hommes ont des facteurs de risque particuliers de lombalgies chroniques. La reprise précoce des activités et des mesures en milieu professionnel sont des points clés pour éviter la pérennisation de cette pathologie et la désinsertion professionnelle.
lombalgie

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Crédit photo : VOISIN/PHANIE

Les douleurs rachidiennes sont la principale cause d'années de vie passées en incapacité dans les pays de haut niveau socio-économique (Murray CJ et coll, Lancet 2015). Les lombalgies sont aussi la première cause de handicap au travail. Ce symptôme extrêmement banal conduit parfois à des situations socio-professionnelles dramatiques. « Les hommes ont des facteurs de risques particuliers car ils sont plus nombreux à effectuer des travaux de force, à être exposés au port de charges lourdes ou aux vibrations liées à la conduite d'engins, observe le Dr Jean-Marc Ziza (hôpital de la Croix-Saint-Simon, Paris). Cela conduit à envisager plus fréquemment chez eux un reclassement professionnel. »

Éliminer d'abord une lombalgie secondaire


En dehors des urgences que constituent les sciatiques hyperalgiques, paralysantes ou avec syndrome de la queue-de-cheval, aucun examen complémentaire n'est nécessaire au stade aigu d'une lombalgie commune. « Mais il est indispensable d'éliminer d'abord une lombalgie secondaire (tumeur, fracture vertébrale, infections, spondylarthropathie inflammatoire) par un interrogatoire et un examen clinique complet », souligne le Dr Ziza. Une attention particulière doit être portée chez l'homme jeune aux spondylarthrites, qui se distinguent par le type inflammatoire des douleurs et les signes associés.

Seule une petite minorité des lombalgies aiguës (<4 semaines) évoluent  vers la chronicité (> 4 mois). « Le premier facteur de chronicité, c'est de s'allonger, remarque le Dr Ziza. Après un lumbago il y a une sensation de sidération, de paralysie. Les patients ont peur de bouger. Mais il n'y a aucun risque, sauf celui d'avoir mal. De nombreuses études ont démontré que les patients qui récupèrent le mieux, qui consomment le moins de médicaments et d'arrêts de travail, sont ceux qui ont repris le plus vite possible une activité, y compris en cas de douleur. Il faut rassurer, prescrire des antalgiques et dire au patient de faire ce qu'il se sent capable de faire. »

La phase aiguë passée, une kinésithérapie active est utile pour apprendre à économiser son rachis et à renforcer la musculature abdomino-lombaire par des exercices à répéter chez soi tous les matins. « C'est une hygiène du dos, déclare le Dr Ziza.  Ne pas les faire expose à des récidives ».

Le retentissement professionnel est un autre facteur majeur de pérennisation. Après six mois d'arrêt, un patient sur deux seulement reprend le travail. Après deux ans, les chances sont quasi nulles. « Il importe de résoudre très vite les problèmes sociaux et professionnels, insiste le Dr Ziza. Un maçon qui souffre de lombalgies chroniques de manière évidente ne pourra pas exercer sa profession. C'est au généraliste, en collaboration avec le médecin du travail, d'insister pour mettre en place un aménagement ou un changement de poste, voire un reclassement. Actuellement, c'est fait encore trop tardivement et on voit des patients en arrêt de travail depuis 18 mois. » À ce stade, perte musculaire, déconditionnement à l'effort et dépression conduisent les malades à s'enfoncer dans un état de handicap, dont ils auront de plus en plus de mal à sortir.

Dr Isabelle Leroy

Source : lequotidiendumedecin.fr