En France, la mortalité par cancer de la prostate a nettement chuté depuis 20 ans et semble même s'accélérer entre 2005-2011 (baisse de 3,8 % par an contre 0,8 % sur la période 1980-2005). Néanmoins, ce cancer tue près de 10 000 patients par an et reste le premier en termes d’incidence chez l’homme. Il touche essentiellement l’homme de plus de 60 ans et l'augmentation de l'espérance de vie (79,2 ans pour les hommes en 2014, soit un gain de 0,8 an par rapport à 2011) rend ce cancer d’actualité. et impacte le nombre de patients atteints. L'incidence des cancers de la prostate a donc connu une évolution similaire passant de 24,8/100 000 en 1980 à 124,5 en 2005 avant de redescendre ensuite vers 97,7/100 000. L'explication de cette évolution récente repose sur des raisons épidémiologiques (nombreux cancers déjà diagnostiqués grâce au dépistage) et sociales (meilleur ciblage des populations).
Il faut donc continuer à faire progresser la prise en charge, qui selon les publications récentes revêt plusieurs aspects essentiels.
Un diagnostic précoce nécessaire
Plus la maladie est prise en charge à un stade précoce, meilleur sont les chances de guérison. Au stade localisé, le cancer est dans l’immense majorité des cas asymptomatique et encore guérissable, c’est pour cette raison que seule sa recherche active peut permettre de le « démasquer ».
Marqueur fiable, économique, reproductible et de bonne sensibilité, le PSA reste la cheville ouvrière du dépistage (même si sa spécificité n’est pas parfaite) à condition de savoir l’utiliser. Son interprétation est parfois complexe, mais les urologues peuvent aider les médecins généralistes dans cette tâche. Les pays n’utilisant pas le PSA ont des taux de cancer de la prostate diagnostiqué au stade d’emblée métastatique (donc incurable) multiplié par 4 ou 5 (1).
En cas de cancer découvert au stade métastatique, le traitement de référence est basé sur l’hormonothérapie, c’est-à-dire la castration chimique, qui peut provoquer de nombreux effets secondaires et des complications dramatiques. Si la morbidité des traitements au stade localisé diminue, elle reste élevée aux stades plus avancés. Les nouvelles molécules mises sur le marché demeurent des traitements lourds, morbides et très chers (de 3 000 à 10 000 euros/mois). Il est donc important de continuer à promouvoir le dépistage afin d’éviter les métastases, souvent douloureuses et nécessitant parfois des antalgiques puissants. Fort heureusement, la politique de dépistage a permis, depuis l’utilisation du PSA de diminuer drastiquement le nombre de patients diagnostiqués au stade métastatique (2).
Une multitude de cancers et de prises en charge
Il existe une mosaïque de cancers de la prostate différents. Tous ne nécessitent pas d’être traités. En 2014, un tiers des patients (34,1 %) porteurs d'une tumeur de la prostate étaient sans traitement ; souvent suivis par des urologues dans un protocole de « surveillance active ». À ce jour, seule la biopsie permet de connaître précisément le pronostic (grâce à l’analyse des pathologistes et l’utilisation des marqueurs histopronostiques) et de décider ou non la surveillance active.
En fonction de l’âge, du type de cancer, de la valeur du PSA et du bilan d’extension, la prise en charge varie : surveillance active, opération, curiethérapie, radiothérapie, techniques innovantes (comme l’HIFU) ou inclusion dans des essais cliniques (de photothérapie ou cryothérapie). Les patients doivent recevoir une information la plus claire et la plus complète possible sur les possibilités thérapeutiques envisageables pour leur cancer.
Vers un changement des pratiques
Le médecin généraliste, le radiologue, le pathologiste, le radiothérapeute et l’urologue sont les premiers acteurs de la prise en charge des cancers de la prostate. Les décisions thérapeutiques et la coordination des soins se sont nettement améliorées avec le plan cancer et la tenue obligatoire des réunions de concertation pluridisciplinaire. Les progrès dans le diagnostic (nouveaux marqueurs, PSMA) vont changer les pratiques. Ainsi, l’imagerie a connu une révolution en termes de « vision » du cancer de la prostate. Depuis 2 ou 3 ans, l’IRM permet de voir les cancers de la prostate, surtout les plus agressifs, et d’avoir une idée de plus en plus précise des limites locales des tumeurs.
L’AFU recommande donc d’informer les patients sur la possibilité d’être dépisté. En l’absence de politique de dépistage de masse, l’information est essentielle et aujourd’hui l’unique société savante des urologues prône plus que jamais d’utiliser, à partir de 45-50 ans et jusqu’à 75 ans, le dosage sanguin du PSA et l’examen clinique. En cas de doute, l’IRM de prostate devient un élément clé pour poursuivre les investigations si nécessaires (biopsies de prostate).
Urologue (hôpital Foch, Suresnes)
(1) European Urology
(2) The New England Journal of Medecine
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