Au cours de la polyarthrite rhumatoïde

Les promesses d’un inhibiteur de tyrosine kinase

Publié le 30/09/2010
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LA POLYARTHRITE rhumatoïde, une maladie inflammatoire concernant près de 1 % de la population, se caractérise par la production d’autoanticorps, une inflammation synoviale avec formation d’un pannus et une érosion du cartilage et de l’os sous-jacents.

Le traitement précoce par les DMARD (disease modifying anti-rheumatic drugs) vise à ralentir ou à prévenir la destruction articulaire. Le méthotrexate est utilisé en première intention, et si la maladie reste active, on a recours à une association de DMARD (sulfasalazine et hydroxychloroquine, cyclosporine, leflunomide, inhibiteurs du TNF et de l’IL-1). Toutefois, le traitement optimal reste un domaine d’étude et l’identification de nouvelles thérapies demeure une priorité.

Dans la synoviale des patients.

Weinblatt et coll. publient les résultats de phase 2 du R788, un inhibiteur de Syk (spleen tyrosine kinase) administré par voie orale. Syk est une tyrosine kinase intracytoplasmique qui intervient dans le signal de l’immunorécepteur des macrophages, mastocytes et cellules B. Elle est trouvée dans la synoviale des patients atteints de PR et un essai de phase 1 a suggéré que son inhibition par le R788 (fostamatinib sodium) pourrait être efficace en cas de PR active en dépit du méthotrexate.

L’étude multicentrique de phase 2 est randomisée, contrôlée par placebo, en double insu. Elle porte sur 457 patients (85 % de femmes) qui souffraient d’une PR active en dépit d’un traitement par méthotrexate pris depuis au moins 3 mois. L’objectif primaire était le taux de réponse ACR 20 (American College of Rheumatology 20), qui indique une réduction d’au moins 20 % du nombre des articulations douloureuses et enflammées et une amélioration d’au moins 3 a 5 autres critères.

Les résultats a 6 mois sont positifs. Le R788, a la dose de 100 mg deux fois par jour, ou a la dose de 150 mg une fois par jour, est supérieur au placebo, avec des taux de réponse ACR 20, respectivement, de 67 et 57 %, comparés à 35 % avec le placebo.

Dès la première semaine de traitement.

Le taux de réponse ACR50 (indiquant une amélioration d’au moins 50 %) est également supérieur (de 43 % et 32 %, contre 19 % sous placebo), ainsi que le taux de réponse ACR70 (28 % et 14 %, contre 10 % avec placebo). Le taux de rémission à 6 mois est de 3 à 4 fois plus grand dans les 2 groupes R788, comparé au groupe placebo. Les effets cliniques sont observés dès la première semaine de traitement. Le pourcentage de patients ayant une réponse ACR20 augmente avec le temps.

Les effets secondaires comprennent une diarrhée réversible (chez 19 % contre 3 % sous placebo), des infections respiratoires supérieures (14 % contre 7 %) et une neutropénie réversible (6 % contre 1 %). De plus, une élévation de la TA systolique (de 3 mmHg) est observée dès le premier mois dans le groupe R788, principalement chez des patients aux antécédents d’HTA ; 23 % des patients sous R788, contre 7 % de ceux sous placebo ont nécessité l’institution ou la modification d’un traitement antihypertenseur.

«Cette étude confirme que l’inhibition de la voie Syk entraîne une amélioration dans l’activité de la PR. Le R788 agit rapidement lorsqu’il est associé au méthotrexate. Les effets secondaires incluent une hypertension qui a été traitée et contrôlée par le traitement antihypertenseur. De larges études de phase 3 sont maintenant en cours », déclare au Quotidien le Dr Michael Weinblatt (Harvard Medical School, Boston).

Ces prochaines études préciseront l’efficacité et l’innocuité. Il sera intéressant de voir si le R788, seul ou associé au méthotrexate, ralentira ou préviendra le développement des érosions.

Par ailleurs, comme le notent dans un éditorial les Drs Juan Rivera et Robert Colbert (NIH), Syk, a la différence de nombreuses autres tyrosine kinases, possède des propriétés tumeur-suppressives et l’expression réduite de Syk a été trouvée chez des patientes atteintes de cancer du sein. « Ceci suggère que l’usage a long terme des inhibiteurs de Syk devrait être étroitement surveillé et que son utilisation pourrait être inappropriée pour les patients qui ont des antécédents familiaux de cancer du sein. »

« Les essais cliniques des inhibiteurs Syk, joints à ceux des inhibiteurs de kinase Jak3, ont montré que ces inhibiteurs de tyrosine kinase offrent de nouveaux médicaments très prometteurs dans le traitement de la PR. Ils annoncent aussi une nouvelle ère qui étend l’usage thérapeutique des inhibiteurs de tyrosine kinase au-delà du traitement des cancers », concluent les éditorialistes.

New England Journal of Medicine, 30 septembre 2010, Weinblatt et coll.,p. 1303.

 Dr VÉRONIQUE NGUYEN

Source : Le Quotidien du Médecin: 8826