Rien ne va plus dans l'ostéoporose

La prévention en berne

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Publié le 14/06/2019
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ostéoporose

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Crédit photo : Phanie

Les récentes recommandations de la HAS sur l'ostéoporose (OP) sont décevantes (1). « Elles n'amènent pas vraiment de modifications notables et négligent toujours la prévention primaire. De plus en plus, on va se confronter à l'OP maladie devant une fracture, et les coûts de santé vont exploser », alerte la Pr Florence Trémolllières, du centre de la Ménopause au CHU de Toulouse.

Impasse en début de ménopause

Il y a 15 ans, lorsque le traitement hormonal substitutif (THS) était largement prescrit en début de ménopause, l'évaluation du risque d'OP ne se justifiait guère. Mais désormais, moins de 10 % des femmes le prennent (lire aussi pXX) et pour autant le risque fracturaire n'est que rarement évalué. Faute d'une bonne valeur prédictive, l'ostéodensitométrie (ODM) n'est remboursée – et de fait proposée – qu'aux femmes ayant des facteurs cliniques de risque de fracture. Des facteurs souvent absents avant 65 ans alors que la dégradation du capital osseux peut être déjà significative.

Et, en cas d'ostéopénie avérée, particulièrement lorsque le T-score vertébral est inférieur à – 2, on se retrouve pratiquement dans une impasse thérapeutique si la femme refuse le THS. « Certes, l'ODM ne doit pas être systématique mais elle permet aux femmes de connaître leur risque, ce qui peut les amener à accepter le THS et au moins de mettre en place les règles d'hygiène de vie pour limiter les risques », explique la Pr Trémollières. Les plus récentes de la WHI montrent que le THS prescrit aux femmes de 50 à 60 ans pour une durée moyenne de 5 ans n'augmente pas le risque de cancer du sein, diminue la mortalité globale de 30 %, réduit de plus de 50 % le risque ostéoporotique et de 30 % celui de fracture.

Ostéoformation puis anti-résorption

Après 5 ans, si le risque persiste et si le THM doit être interrompu, on peut alors proposer le raloxifène, actif sur les fractures vertébrales et bénéfique pour la prévention du cancer du sein, et, après 65/70 ans, envisager le relais par un traitement curatif de l'OP.

Là encore, les controverses ont compliqué le traitement. Il est évident que l'arrêt du denosumab doit être relayé par un biphosphonate (BP). Ce qui amène à une situation paradoxale, puisque l'anticorps monoclonal n'est prescrit qu'en 2e intention, alors qu'il est moins efficace après un traitement par BP.

En cas de déminéralisation importante, la logique demanderait de commencer par un ostéoformateur pour refaire la masse osseuse avant de la stabiliser par les BP. Mais on ne dispose toujours pas d'un ostéoformateur à proposer en première intention. Le teriparatide est limité par ses conditions de remboursement, l'aloparatide a été refusé par l'EMA. Le romosozumab, un anticorps antisclérostine qui stimule fortement la formation osseuse a reçu l'approbation de la FDA en avril 2019 mais on n'a toujours pas de réponse en Europe et en France. Et du fait de son prix et des doutes sur le risque CV à long terme, il ne sera très vraisemblablement pas indiqué en première ligne.

Entretien avec la Pr Florence Trémolllières, centre de la Ménopause, CHU de Toulouse

(1) HAS, Bon usage du médicament, Les médicaments de l’ostéoporose, Mise à jour avril 2019

Dr Maia Boovard-Gouffrant
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Source : Bilan Spécialiste