LE QUOTIDIEN : La réforme du troisième cycle a instauré une quatrième année de « Dr junior » sans allonger la durée du diplôme d’étude spécialisé (DES) de rhumatologie. Avez-vous aujourd’hui un recul suffisant pour en apprécier les effets ? Quel a été l’impact sur la formation des internes ?
Pr LE GOFF : Nous avons aujourd’hui le recul nécessaire pour pouvoir tirer de premiers enseignements. La promotion d’internes de rhumatologie, qui est sortie en novembre dernier, est la première à avoir été formée dans son intégralité avec la nouvelle maquette qui intègre désormais tous les internes. Premier constat : une structure du suivi et de la formation des internes. Grâce au découpage en phases, intégrant chacun des objectifs et des évaluations dédiées, les internes ont un encadrement plus homogène en France. La volonté de cette réforme était d’éviter l’hétérogénéité dans la formation des rhumatologues, de ce point du vu il y a eu un progrès. En revanche, notre ressenti est que la formation a été davantage condensée sur les trois premières années. Il serait exagéré de dire que les internes doivent apprendre en trois ans ce qu’ils faisaient en quatre ans avant la réforme. Mais c’est un fait. À la fin de la troisième année, l’interne doit avoir validé sa thèse et acquis une bonne partie de sa formation clinique et technique, afin d’être en mesure d’assumer son passage à une certaine autonomie d’exercice durant la quatrième année. Il doit avoir acquis un certain bagage technique dans la pratique de l’échographie, des gestes infiltratifs ou de l’ostéodensitométrie. Au vu de ces éléments, nous avons demandé un allongement de la durée du DES de rhumatologie, qui hélas ne nous a pas été accordé. Nous pensons toujours qu’une cinquième année serait utile pour que l’enseignement soit moins comprimé durant les trois premières années.
Comment s’est mise en place cette quatrième année autour de laquelle il a longtemps régné un certain flou ?
Tout ce flou n’est pas encore complètement dissipé. En fait, on constate que les pratiques sont assez hétérogènes dans le cadre de cette mise en autonomie. Et c’est un constat qui va au-delà de la seule rhumatologie. On retrouve le même phénomène dans d’autres spécialités. Je fais partie du bureau de la Coordination nationale des collèges d'enseignants en médecine (CNCEM) et c’est un sujet de réflexion que nous souhaitons approfondir. L’objectif de cette quatrième année est de placer les internes dans une autonomie supervisée. Mais on se rend compte que la situation peut être très différente, selon le terrain de stage. Dans certains endroits, l’interne exerce avec une assez grande autonomie, tandis que dans d’autres, l’exercice reste beaucoup plus encadré. Il faut aussi préciser que la réforme a été mise en place, sans que ne soit augmenté le nombre d’internes dans les services. Sur le terrain, ces derniers ont toujours été très sollicités. Les internes de quatrième année, qui passent en « Dr junior », ne sont pas remplacés pour assurer les tâches qui leur sont dévolues.
Estimez-vous que le bilan est plutôt négatif ?
Non, la réforme a également eu des impacts positifs sur la formation. C’est mon sentiment quand je compare le niveau qui était le mien à la sortie de l’internat, par rapport à celui de mes internes aujourd’hui. Je pense que j’avais moins de compétences techniques ou en échographie. En fait, les internes actuels ne sont plus tout à fait les mêmes que ceux d’hier. Aujourd’hui, ils sont peut-être plus pointus sur les aspects techniques et sur les pathologies spécifiques de l’appareil locomoteur, mais peut-être moins transversal. Avant la réforme, le DES comprenait quatre stages de rhumatologie et quatre autres hors rhumatologie. Désormais, il n’y a plus que trois stages hors rhumatologie. Cela laisse moins d’opportunités pour faire des stages un peu éloignés de notre spécialité, mais qui donne un esprit transversal très important dans notre exercice de rhumatologue. C’est en partie pour cette raison que nous souhaitions une cinquième année, qui aurait permis la mise en place d’un stage technique, mais aussi d’un stage hors spécialité supplémentaire.
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