C’est un ton inhabituel qu’a adopté la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL) dans une lettre adressée au ministre de la Santé, Olivier Véran, datée du 15 mars et rendue publique le 12 avril. Plutôt habituée à dénoncer les mauvaises pratiques, voire les abus, Dominique Simonnot salue cette fois l’« offre de soins exemplaire » mise en œuvre au sein du pôle psychiatrie du centre hospitalier de Chinon (Indre-et-Loire). Ce pôle, qui devrait être un « service de référence appelé à jouer un rôle moteur dans la diffusion des bonnes pratiques », est pourtant menacé par un projet dit « de requalification » qui prévoit des suppressions et des remplacements de soignants, alerte-t-elle.
Lors d’une visite « inopinée » entre le 28 février et le 4 mars, les cinq contrôleurs du CGLPL ont en effet pu observer « des conditions de prise en charge des patients particulièrement respectueuses de leur liberté d’aller et venir et de leur dignité » et inédites au regard des « constats effectués ces dix dernières années » dans d’autres établissements, rapporte Dominique Simonnot.
Une recherche permanente du consentement des patients
Architecture des locaux, organisation des soins, méthodes de travail et d’intervention, déontologie et éthique, culture et expérience professionnelle concourent selon la CGLPL à cette offre de soins « remarquable ». Parmi les pratiques vertueuses du pôle, sont notamment citées la présence permanente des soignants au travers de diverses activités, un accès des patients à leur téléphone et leurs biens personnels, la prise des repas avec les soignants, mais aussi une recherche permanente du consentement des patients, « y compris pour les prises médicamenteuses ».
Il en découle des résultats rarement observés dans d’autres établissements. Peu de violences et de « fugues » y sont enregistrées. L’isolement et la contention n’y sont pratiqués que de manière « exceptionnelle ». L’isolement par exemple n’y représente que 1,5 % de la file active des patients (sur une année) contre 22 % en moyenne dans les établissements contrôlés. Et la durée de l’isolement est réduite à 39 heures en moyenne en 2021, contre cinq jours au niveau national.
Une réforme « inacceptable »
Le travail de ce pôle, démontrant la « possibilité d’une prise en charge efficace et respectueuse », n’est pourtant « ni connu ni valorisé », déplore Dominique Simonnot, constatant notamment que le rapport annuel d’isolement n’est jamais présenté à la Commission médicale d'établissement (CME). L’offre de soins actuelle serait même « menacée », alerte la CGLPL, par un projet qui prévoit notamment la suppression de postes d’infirmiers (26,7 % des postes) et d'agents des services hospitaliers (ASH) au profit de postes d’aides-soignants afin de permettre la réalisation de 25 % des soins par ces derniers.
Cette réforme est jugée « inacceptable », d’autant que son impact n’a pas été « du tout évalué en termes de maintien de l’accès aux soins et du respect des droits fondamentaux des patients et de leur dignité », déplore la CGLPL. La prise en charge proposée, pourtant en « parfaite conformité avec la lettre et l’esprit des dispositions légales et réglementaires applicables », est aujourd’hui « gravement » menacée, s’inquiète-t-elle.
Dans une réponse datée du 8 avril, Olivier Véran tend à défendre le projet de la direction, construit en concertation et qui vise, selon lui, à « faire correspondre les qualifications aux soins requis, notamment en introduisant des aides-soignants dans la composition des équipes, de manière structurelle et organisée, plutôt que par défaut et de façon non anticipée ». S’il reconnaît des « points d’amélioration », notamment sur la présentation du rapport annuel d’isolement aux instances, il insiste sur les modifications apportées au projet initial de la direction, notamment avec la réintroduction d’un « temps infirmier sur un poste de journée 5 jours sur 7 ».
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