SELON LA DÉFINITION adoptée par la Société de pneumologie de langue française, l’exacerbation aiguë (EA) de BPCO est une majoration des symptômes respiratoires au-delà des fluctuations quotidiennes normales, d’une durée supérieure ou égale à 48 heures ou nécessitant une modification du traitement. L’exacerbation aiguë est un événement grave dont la gravité est trop souvent mésestimée par le patient et son entourage. Il faut aller à l’encontre de cette forme de banalisation qui peut être dommageable pour les malades. L’exacerbation motive en effet 100 000 hospitalisations par an avec une durée moyenne de séjour d’environ huit jours. Son coût représente 60 % du coût total de la BPCO. Elle est grevée d’une mortalité à 30 jours de 26 %, supérieure à celle de l’infarctus (16 %) (1,2).
Il arrive encore que la BPCO soit découverte à l’occasion d’une exacerbation aiguë. Dans une étude récente (3) portant sur 1 824 patients hospitalisés pour exacerbation, la BPCO n’était pas connue auparavant dans 20 % des cas.
L’exacerbation change le cours de la maladie ; elle provoque une dégradation de la fonction respiratoire, altère la qualité de vie et entraîne une perte d’autonomie. Elle est également à l’origine d’une anxiété importante, souvent sous-estimée par l’entourage et par les soignants. Après une exacerbation aiguë, le délai de récupération est souvent long, pouvant dépasser un mois.
Par ailleurs, l’exacerbation de BPCO majore le risque cardio-vasculaire. Une étude menée au Royaume-Uni (4) sur près d’un million de personnes montre que les risques d’accident vasculaire cérébral et d’infarctus du myocarde sont augmentés de façon indépendante au décours des exacerbations de BPCO.
Les infections virales et bactériennes représentent la première cause d’exacerbations de BPCO, avec un pic hivernal des exacerbations liées à ces infections. Les indications de l’antibiothérapie sont fondées à la fois sur les caractéristiques de l’épisode, la présence de signes de gravité, la purulence de l’expectoration, et sur celles du patient à l’état basal, BPCO sévère, existence de comorbidités, facteurs de risque d’infection à germes particuliers comme Pseudomonas. Dans tous les cas, et particulièrement si le malade est pris en charge en ambulatoire, une réévaluation du traitement antibiotique en cours ou de son indication doit être faite au bout de 48 à 72 heures.
En l’absence d’étiologie infectieuse évidente, il faut avoir à l’esprit la possibilité d’une cause thromboembolique, à l’origine de 15 à 30% des exacerbations non liées à une infection.
L’indication de la corticothérapie systémique n’est pas validée chez les patients traités en ambulatoire. Chez les malades hospitalisés, elle semble avoir un effet favorable mais qui reste modeste. Il faut donc apprécier le rapport bénéfice/risque dans chaque situation. Dans tous les cas, elle doit être prescrite à doses modérées (de 1 à 2 mg/kg d’équivalent prednisone) et pour une courte durée (1 semaine).
Après hospitalisation pour exacerbation, le médecin traitant sera idéalement revu dans les 8 jours et une réhabilitation doit être mise en œuvre rapidement. Une consultation chez le pneumologue est à programmer 4 à 6 semaines après l’exacerbation. Le bilan clinique comporte une évaluation de l’état nutritionnel, des atteintes extrarespiratoires associées et du handicap, des épreuves fonctionnelles respiratoires, une mesure de la saturation en oxygène, une gazométrie artérielle et, autant que possible, un test de marche de 6 minutes. Une évaluation psychologique et sociale est également indiquée.
La réhabilitation reste insuffisamment mise en œuvre.
La survenue d’une exacerbation doit être l’occasion, à son décours, de revoir le traitement de fond, de vacciner (moins d’un patient BPCO sur deux est vacciné contre la grippe), d’encourager toute activité physique, même limitée, d’aider au sevrage tabagique quand le patient est encore fumeur et de mettre en œuvre la réhabilitation.
La réhabilitation respiratoire est essentielle pour la prévention des réhospitalisations au décours d’une EA. Ainsi, par exemple, marcher 60 minutes par jour diminue de 50 % le risque de réadmission après hospitalisation pour exacerbation (5).
Il serait très bénéfique pour ces patients de développer des programmes d’autogestion avec des plans d’action personnalisés, comme il en existe dans l’asthme. Ils sont inexistants dans la BPCO. L’éducation thérapeutique, pourtant fondamentale, est également très insuffisante.
On ne peut que déplorer qu’il n’existe actuellement aucune forme de valorisation par les pouvoirs publics de la réhabilitation des patients BPCO, alors que ces mesures thérapeutiques ont parfaitement démontré leur efficacité. Faute de moyens financiers, elles sont très difficilement mises en œuvre ce qui pénalise beaucoup les malades.
D’après un entretien avec le Dr Jacques Piquet, centre hospitalier de Montfermeil.
(1) Berkius J, et al. Acta Anaesthesiol Scand 2008;52:759-65.
(2) Yeh RW, et al. N Engl J Med 2010;362:2155-65.
(3) Piquet J, et al. Revue des Maladies Respiratoires 2010;27:19-29.
(4) Donaldson GC, et al. Chest 2010;137(5):1091-7.
(5) Ong KC, et al. Chest 2005;128:3810-16.
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