Le diagnostic de fin de vie est souvent posé en cancérologie,
mais il reste plus rare et plus difficile dans le cas de maladies chroniques non cancéreuses telles que les insuffisances respiratoires. Pourtant, les symptômes de ces pathologies sont également difficiles à supporter et, souvent, insuffisamment traités. Les patients atteints de BPCO grave (VEMS ‹ 0,750, et une décompensation hypercapnique) peuvent avoir des scores de dyspnée et d’angoisse supérieurs à ceux d’un groupe de malades cancéreux du poumon (1).
Les pneumologues, pour leur part, sont très impliqués dans la prise en charge de deux pathologies en particulier, pouvant mener au décès du patient : le cancer bronchique et la BPCO. « Dans ce cadre, deux options s’offrent à eux : soit, ils adressent leurs patients dans des structures de fin de vie ; soit ils continuent à les prendre en charge jusqu’à leur décès. Cette deuxième option doit, à mon sens, être privilégiée, car les pneumologues connaissent leurs patients. Ils se doivent ainsi de les accompagner du diagnostic jusqu’à leurs derniers jours. Cela impose, toutefois, aux pneumologues de se former à la prise en charge de la fin de vie », affirme la Dr Anne Prud’homme, pneumologue, chef de service à Tarbes, CH de Bigorre.
Adapter la prescription aux besoins des patients
Les principes et moyens de l’approche palliative de la dyspnée en fin de vie, notamment, sont trop souvent méconnus car trop rarement enseignés en formation initiale. Complexe, la prise en charge de la dyspnée en fin de vie se heurte, aujourd’hui encore, à des idées reçues. Les équipes des services de pneumologie sont souvent démunies face à ce symptôme, pourtant si fréquent dans certaines pathologies telles que la BPCO ou la fibrose. « Il ne faut pas oublier que la dyspnée répond à de très faibles doses de morphiniques qui se comptent en milligrammes (3 mg par jour, au départ). Ces faibles doses doivent être titrées par palier, augmentées progressivement en fonction du ressenti du patient », note la Dr Prud’homme.
La prescription autour de la dyspnée de fin de vie doit, ainsi, passer par de très faibles doses de morphine. Mais cette prise en charge est loin d’être uniforme et optimale. « Il y a une idée reçue très répandue au sein de la communauté des pneumologues, à laquelle il faut absolument mettre fin : un grand nombre d’entre eux pense que les morphiniques aggravent la dyspnée et font passer le patient dans un coma. Or, cela n’est pas vrai lorsque les morphiniques sont administrés à très faible dose. Dans ce cas, la tolérance des morphiniques est bonne et la dyspnée en tant que symptôme ne diminue certes pas, mais elle est moins ressentie par le patient : la littérature scientifique a démontré ces faits », assure la Dr Prud’homme. Les pneumologues ne doivent donc pas avoir peur de prescrire la morphine lorsque la dyspnée de fin de vie devient intolérable.
Eviter le sentiment d’abandon
Autre symptôme dont la prise en charge pose problème : l’asphyxie. L’oxygénothérapie chez les patients en fin de vie (en particulier, dans le cas d’une fibrose) n’a, en effet, pas prouvé sa pertinence sur le confort de ces derniers. « Mais elle a l’avantage de créer du lien entre le soignant et le soigné, de faire en sorte que le patient se sente soutenu par l’équipe médicale. En effet, en décidant d’arrêter l’oxygénothérapie, de déperfuser le patient, d’arrêter tout traitement en raison de leur éventuelle inutilité, nous risquons de créer un sentiment d’abandon chez le patient. Nous perdons le lien avec lui. Le risque majeur de l’arrêt de l’oxygénotérapie est que le patient en fin de vie pense qu’il n’a plus qu’à se laisser mourir », conclut la Dr Prud’homme.
Entretien avec Anne Prud’homme, pneumologue, chef de service à Tarbes, CH de Bigorre
(1) Gore JM, Brophy CJ, Greenstone MA : How well care for patients with end stage chronic obstructive pulmonary disease (COPD) ? A comparison of palliative care and quality of life in COPD and lung cancer. Thorax 2000;5:1000-6
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024