Une étude observationnelle rétrospective s’est penchée sur la prise en charge des exacerbations aiguës de bronchopneumopathies obstructives (BPCO) hospitalisées et leur évolution. Présenté lors du dernier congrès de l’American college of chest physicians (Chest 2022, Nashville, Tennesse, États-Unis), ce travail plaide pour la mise en place d’une consultation systématique avec un pneumologue, très tôt dans la prise en charge des exacerbations aiguës de bronchopneumopathies obstructives hospitalisées. « Les patients ayant bénéficié d’une consultation avec avis spécialisé précoce du pneumologue — dans les 24 premières heures — sont en effet deux fois moins réhospitalisés dans les trois mois que ceux pris en charge par un interniste, un urgentiste, ou un autre médecin. Le bénéfice est encore majoré lors d’exacerbations sévères, puisque l’intervention d’un pneumologue est alors associée à trois fois moins de rechutes, résume le Pr Sami Hossri (Mc Govern medical school, Houston, Texas, États-Unis). Ce résultat plaide pour intégrer précocement des pneumologues dans la prise en charge et la supervision des patients admis aux urgences pour exacerbation aiguë de BPCO. »
« Ce travail devra néanmoins encore être confirmé dans une étude prospective randomisée multicentrique, avant que l’on puisse envisager une implémentation en pratique clinique, pondère le spécialiste. Mais nous avons d’ores et déjà le rationnel pour mettre en place ce type d’étude. »
Une cohorte rétrospective de 290 cas
Pour examiner l’effet éventuel d’une consultation dès les 24 premières heures avec un pneumologue sur le devenir des patients admis pour exacerbation aiguë de BPCO, les auteurs ont constitué une cohorte rétrospective. Elle rassemble 290 patients pris en charge durant deux ans d’affilée, au sein de deux centres hospitaliers de Staten Island (New York, États-Unis). Parmi eux, 198 avaient rapidement été vus ou pris en charge par un pneumologue, quand les 92 autres avaient été gérés par un urgentiste, un interniste ou un autre médecin. Le critère primaire choisi était la durée d’hospitalisation, les réhospitalisations n’intervenant qu’en critère secondaire.
Pas d’effet sur la durée de séjour
La durée d’hospitalisation des sujets dont la prise en charge a fait participer un pneumologue n’est pas significativement différente dans cette petite série même, si elle a tendance à être un peu plus courte (4,16 vs. 4,21 jours). Cela, alors que la saturation en oxygène était en moyenne significativement plus basse chez les sujets vus par un pneumologue (93 vs. 95 %, p < 0,0001).
En revanche, les réhospitalisations dans les trois mois sont globalement deux fois moins nombreuses quand un pneumologue a été consulté (30 vs. 58 % ; RR = 0,51, p < 0,0001). C’est encore plus net pour les exacerbations plus sévères. Quand on stratifie sur la sévérité à l’admission, on est en effet à quasi trois fois moins de réhospitalisations dans les trois mois chez les patients les plus sévères (28 vs. 72 % ; RR = 0,38).
À quoi ce bénéfice est-il dû ? Cette étude ne permet pas de le dire. Toutefois « il est possible, surtout chez les patients sévères, que les pneumologues aient eu tendance à les mettre plus précocement sous ventilation à pression positive non invasive, ou autres thérapeutiques, et qu’ils aient aussi initié plus tôt des stratégies de réadaptation pulmonaire », commente le Pr Hossri.
Un suivi plus rapproché
Autre différence notable entre les deux groupes, les patients ayant bénéficié de l’intervention d’un pneumologue ont été revus bien plus tôt. « Le délai moyen de consultation de suivi après l’hospitalisation est de 23 jours, versus 66 jours dans le groupe ou un pneumologue n’était pas intervenu précocement », souligne le Pr Hossri.
Aujourd’hui la BPCO représente la 3e cause de décès dans le monde. Et, alors que son incidence ne cesse d’augmenter, les conséquences de cette pathologie sur le système de santé vont croissant. Or, parmi ces dépenses, environ 30 % sont issues de réhospitalisations. La mortalité liée aux exacerbations de BPCO hospitalisées dépasse celle liée aux infarctus… Dans ce contexte, alors qu’au sein des hôpitaux on a des protocoles permettant la mise en route très rapide de l’antibiothérapie lors de septicémie, ou d’une revascularisation en urgence lors d’infarctus ST+, pourquoi ne pas à l’avenir développer de protocole centré sur les exacerbations de BPCO, incluant une consultation précoce avec un pneumologue ? Cette étude prêche pour. Ces résultats méritent néanmoins d’être vérifiés au préalable, dans une étude randomisée contrôlée pluricentrique.
Si « une étude randomisée vient confirmer le bénéfice, en termes de réhospitalisations — voire plus largement de pronostic — il faudra mettre en place ce type d’intervention. À savoir, la consultation précoce systématique avec un pneumologue pour toute exacerbation aiguë de BPCO nécessitant l’hospitalisation… tout comme les cardiologues sont requis aujourd’hui dans la prise en charge précoce des infarctus ST+ », souligne le Pr Hossri.
(1) Chest 2022, Abs. S Joseph et al. Correlation between pulmonologist consultation and outcomes on acute CODP exacerbations in hospitalized patients. doi.org/10.1016/j.chest.2022.08.1572
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