La polémique enfle suite aux propos tenus par le Pr Michel Aubier, membre du service de pneumologie-allergologie de l'Hôpital Bichat, lors de l'émission « Allô Docteur ». Il y affirmait que le caractère cancérigène de la pollution atmosphérique était possible mais qu'il n'a été démontré que « lors d'expositions assez fortes » correspondant à des expositions professionnelles. « En ce qui concerne les expositions “naturelles”, c’est beaucoup plus discuté, il semble que ce soit en tout cas un facteur favorisant chez les sujets qui ont déjà des prédispositions à développer les cancers, c’est-à-dire les fumeurs », poursuivait-il.
Ces propos ont soulevé l'indignation de plusieurs associations, et notamment des médecins de l'Association santé environnement France (Asef). Par ailleurs, les journaux « Libération » et « le Canard enchaîné » ont dénoncé les liens d'intérêt entre le Pr Aubier et la société Total.
Dernier développement en date : le Pr Michel Aubier, a été auditionné jeudi par la commission d’enquête du Sénat sur le coût économique et financier de la pollution de l’air. Le Pr Aubier, par ailleurs membre de l'Académie nationale de médecine, a dû expliquer à huis clos la raison pour laquelle il n'avait pas signalé ses liens d'intérêt avec la société Total, lors d'une précédente audition de cette même commission.
Contacté par « le Quotidien du Médecin », le Pr Aubier a préféré ne pas s'exprimer sur le sujet, estimant que « les arguments scientifiques sont actuellement totalement inaudibles ; le débat est surtout idéologique ».
Des études à prendre avec précaution
Lors d'une communication à l'Académie de médecine en 2012, le pneumologue avait rappelé que « si certains effets délétères pour la santé humaine comme la potentialisation des allergies respiratoires, sont indéniables, de nombreuses interrogations demeurent pour d'autres tels l'impact sur la mortalité, le cancer du poumon ou les accidents cardiovasculaires ».
Le Pr Aubier avait soulevé l'absence de biomarqueur fiable de l'exposition aux particules. Les niveaux d'exposition des études épidémiologiques ont été, selon lui, principalement évalués sur la base de la proximité des populations avec des zones à fort trafic routier. « Si l'on étudie les quelque 6 000 publications consacrées à ce sujet, il ressort un faible risque relatif de cancer du poumon, de l'ordre de 1,2, chez les populations ayant une exposition professionnelle comme les garagistes ou les conducteurs de camion », poursuit-il.
Il y cite également une étude parue dans « Journal of Exposure Science and Environmental Epidemiology », qui montre, dans 27 villes américaines, une augmentation de la mortalité toutes causes de 1,25 % dans les jours qui suivent chaque augmentation de 10 µg/m3 du niveau de particule de taille inférieur ou égale à 2,5 microns (PM2,5). Des études qui doivent « être interprétées avec prudence », car « il s'agit d'une mortalité prématurée de quelques mois à une ou deux années concernant les sujets fragiles, c’est-à-dire essentiellement les personnes âgées souffrant d'une maladie respiratoire ou cardiovasculaire chronique ».
Cet avis va à l'encontre de celui des experts du Centre international de recherche sur le cancer (CIRC/IARC) qui a classé, en juin 2012, les gaz émis par les moteurs Diesel dans le groupe 1 des produits cancérogènes pour l’homme.
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