Le Covid-19 affectant les poumons, on peut se demander si être exposé à la pollution a un effet significatif sur le développement de formes sévères de la maladie, dont témoignerait un excès d’hospitalisations. Mais aussi si le fait d’être vacciné a un effet sur cet éventuel surrisque.
C’est ce qu’a évalué une vaste étude américaine menée en Californie du Nord, publiée dans l’American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine (1). Ses résultats sont concluants. Ils montrent qu’être exposé à la pollution en particules fines (PM2,5) et dioxyde d’azote (NO2) majore le risque de développer une infection sévère à Covid-19 nécessitant d’être hospitalisé. En revanche, la pollution à l’ozone (O3) ne semble pas majorer la sévérité de l’infection.
Ce travail confirme au passage que la vaccination réduit le risque d’infection sévère. Il montre aussi qu’être vacciné ne protège en rien de l’impact délétère de la pollution. Les vaccinés, comme les non-vaccinés, ont environ le même surrisque relatif de faire une infection sévère nécessitant l’hospitalisation, dès lors qu’ils sont exposés à des taux élevés en PM2,5 et NO2. En somme, Covid-19 et pollution aux PM2,5 et NO2 ne font pas bon ménage. On pouvait s’en douter… c’est désormais prouvé.
Une cohorte californienne de 50 000 plus de 12 ans infectés à l’été 2021
L’analyse porte sur une cohorte plus de 50 000 personnes du système de santé KPSC (Kaiser permanente southern California). Ce sont des adultes et enfants âgés de plus de 12 ans ayant fait une infection à Covid-19 documentée (Covid-19 +) entre début juillet et fin août 2021. Soit pendant la période de circulation des virus essentiellement de type delta.
Parmi eux, 34 % étaient complètement vaccinés et 4,2 % partiellement vaccinés. Le taux de vaccination variait d’ailleurs grandement avec l’âge : 22 % chez les [12-35] ans, 38 % chez les [35-64] ans, 64 % passés 65 ans.
L’étude teste les interactions entre l’exposition à court ou long terme aux polluants — dioxyde d’azote (NO2), particules fines (PM2,5) et l’ozone (O3) — et les taux d’hospitalisations pour Covid-19. Pour ce faire, les données de qualité de l’air du lieu de résidence des 50 000 personnes de cette cohorte ont été croisées avec leur éventuelle hospitalisation pour Covid-19 dans les 30 jours suivant l’infection. Il s’agissait des taux journaliers moyens en PM2,5 en NO2 et des maximums journaliers en O3 observés dans l’année et durant le mois précédant leur infection. Ces chiffres ont ensuite été pondérés pour arriver à un taux mensuel moyen et un taux annuel moyen. Ce qui représente l’exposition à court et long terme des personnes.
Globalement, sur l’ensemble de la cohorte, les taux moyens mensuels sont de 12,1 (± 2,7) µg/m³ en PM2,5, de 10 (± 4,3) ppb en NO2 et de 55 (± 13) ppb en O3. Les taux moyens mensuels s’établissant pour leur part à 13 (± 2,7) µg/m³ en PM2,5, à 13 (± 4,4) ppb en NO2 et à 49 (± 6) ppb en O3.
Indépendamment de la vaccination
Au total dans cette cohorte, 6,1 % des personnes ont dû être hospitalisées dans le mois pour Covid sévère. Bien que la vaccination soit plus fréquente chez les plus âgés, ils restent les plus touchés. Il y a eu en effet à 17 % d’hospitalisation après 65 ans, contre 7,3 % chez les [35-64] ans et 2,3 % chez les moins de 35 ans.
L’analyse confirme que la vaccination réduit bien le risque d’infections sévères. Les taux d’hospitalisations sont globalement de 7,9 % chez les non-vaccinés contre 4,9 % chez les partiellement vaccinés et 3,1 % chez ceux totalement vaccinés. Les risques relatifs — après ajustement sur diverses covariables dont la pollution — d’hospitalisation sont respectivement réduits de 54 % (RR = 0,46 [0,4-0,6]) et de 84 % (RR = 0,86 [0,15-0,18]) chez les partiellement vaccinés et les vaccinés comparativement aux non-vaccinés.
En ce qui concerne la pollution, l’analyse met en évidence que l’exposition aux PM2,5 et au NO2 pèse significativement sur le risque d’hospitalisation, quel que soit le statut vaccinal. Les surrisques d’hospitalisation pour Covid-19 associés à une augmentation d’un écart type des taux moyens mensuels en PM2,5 et en NO2 sont respectivement de 17 % et 13 %. Ces chiffres sont de 25 % et 19 % en ce qui concerne les taux annualisés. L’exposition à long terme, de l’année précédente aux polluants, s semble donc peser un peu plus sur le risque de faire un Covid-19 sévère que l’exposition court terme du dernier mois.
Enfin, être vacciné ne modifie pas franchement l’effet délétère de la pollution en PM2,5 et NO2 sur la sévérité de l’infection. Les surrisques ajustés sur la vaccination sont quasi identiques à ceux non ajustés. « Parmi les personnes vaccinées, l’effet néfaste de l’exposition à la pollution de l’air est un peu plus faible que chez les personnes non vaccinées. Toutefois cette différence reste minime », précisent les auteurs.
Dans cette étude, la pollution à l’ozone ne semble pas majorer le risque d’hospitalisations pour Covid-19.
(1) Z Chen et al. The independent effect of Covid-19 vaccinations and air pollution exposure on risk of covid-19 hospitalizations in Southern California. AJRCCM 2022 doi.org/10.1164/rccm.202206-1123LE
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?