Les bactéries développent les mêmes mécanismes de résistance chez l’animal et chez l’Homme, entre lesquels elles peuvent se transmettre. Or le nombre d’antibiotiques utilisables ainsi que le développement de nouvelles classes thérapeutiques sont aujourd’hui restreints, ce qui fait de l’antibiorésistance un problème de santé publique majeur, puisque les infections causées par des bactéries résistantes sont responsables chaque année de près de 25 000 décès chez l’Homme. L’antibiorésistance concernant également le monde de l’élevage, les vétérinaires prescripteurs ont été ces dernières années particulièrement sensibles à ces données.
Inversion de tendance.
Les mesures prises par diverses autorités sont probablement responsables de la diminution de la consommation d’antibiotiques pour usage vétérinaire observée depuis plus de dix ans. En effet, en 2009, le volume total des ventes d’antibiotiques pour cette filière s’élevait à 1 056 tonnes (900 tonnes pour les élevages dont environ 400 tonnes pour les porcs), soit 20 % de moins qu’en 1999. Cette diminution concernait principalement les tétracyclines (-22 %) et les sulfamides (-31 %). En revanche, les ventes de fluoroquinolones ont augmenté de 49 % et celle des céphalosporines de troisième et quatrième générations de 98 %. À noter : entre 2008 et 2009, une nouvelle tendance s’annonçait puisqu’on observait une stabilisation de l’usage des fluoroquinolones et une diminution de 15 % pour les céphalosporines. Concernant uniquement les porcs, la distribution d’antibiotiques est en diminution significative, d’environ 11 % en trois ans.
L’évolution de la prescription des céphalosporines et des fluoroquinolones en élevage inquiète médecins et vétérinaires. Compte tenu de leur importance en médecine humaine, la crainte d’acquisition de résistances des bactéries à ces nouvelles molécules a débouché sur un consensus de la profession vétérinaire à ne plus les utiliser que de façon curative et seulement en deuxième intention, lorsqu’un premier traitement antibiotique a échoué.
Moratoire.
En outre, les représentants de la filière porcine ont décidé la mise en œuvre d’un moratoire sur l’utilisation des céphalosporines de troisième et quatrième générations en élevage de porcs. Ce moratoire est appliqué depuis le 1er mai 2011 pour une durée de 2 ans, pendant lesquels seront observées l’évolution des consommations des céphalosporines et les pratiques d’élevage.
Une réelle prise de conscience des professionnels de la santé animale est donc engagée.
Certes, les difficultés pour un bon usage sont nombreuses en médecine vétérinaire, notamment les conditions de prescription, qui doivent tenir compte de l’urgence de la mise en place des traitements en élevage, de la faisabilité des prélèvements en vue d’examens bactériologiques et des délais d’obtention des résultats de ces examens. Soulignons également qu’au sein d’une même espèce animale, on constate une hétérogénéité majeure des usages et des niveaux de résistance, selon les types d’animaux et les types de production. Ces données soulignent l’importance de recommandations d’usage construites, non pas uniquement par espèce animale, mais autour d’entités cliniques et zootechniques ciblées, à l’image des recommandations médicales. Un plan d’action sera lancé prochainement par le gouvernement et devra contribuer, comme l’exprimait Bruno Lemaire, ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire, en mars 2011, à réduire « de 25 % le recours des antibiotiques d’ici à 5 ans » dans les élevages.
En savoir plus
- Journée sur l’antibiorésistance en santé animale. Organisée par l’Anses, 18 novembre 2010.
- Chevance A et Moulin G. Suivi des ventes de médicaments vétérinaires contenant des antibiotiques en France en 2009. Anses-ANMV, février 2011.
- Recommandations de l’Afssa en 2006 (Anses).
- Réussir Porcs 2011;180:16-26.
- Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC).
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