Sera-t-il possible un jour d'éradiquer la sclérose en plaques (SEP) ? C'est le thème choisi cette année par la Fondation d'aide à la recherche sur la SEP (Arsep) pour la journée mondiale du 30 mai. Des scientifiques travaillent sur l'hypothèse d'une vaccination contre le virus Epstein-Barr (EBV).
La maladie ne peut en effet pas se déclencher en l'absence d'infection préalable à EBV. « Ce n'est sans doute pas la cause, mais sans cet élément, la maladie ne peut pas se déclencher, explique le Pr Jean Pelletier, neurologue au CHU de Marseille et président du comité scientifique de l'Arsep. C'est un élément clé, qui s'associe à d'autres, comme le tabac ou l'ensoleillement : car si plus de 90 % de la population française a rencontré l'EBV, seulement 120 000 personnes ont développé une SEP. »
Plusieurs questions restent néanmoins non résolues. « Faudrait-il vacciner tous les enfants et à quel moment ?, interroge le neurologue. Il est établi en effet que le risque de développer une SEP est plus élevé en cas de mononucléose infectieuse. » Une autre inconnue est celle de la fréquence des rappels, alors que Moderna a annoncé travailler sur un vaccin à ARNm anti-EBV. Ce nouveau type de vaccins ne semble pas avoir une durée d'efficacité très longue si l'on se réfère à ceux contre le Covid. « Quelle serait alors la durée de protection en cas de vaccination dans l'enfance ? », pointe-t-il.
Antiviraux anti-EBV
Deuxième point : le virus contracté se loge dans les cellules B. « Les lymphocytes B sont importants car ce sont des cellules présentatrices d'antigènes, rapporte le Pr Pelletier. La réactivation virale intra-lymphocytaire pourrait en partie expliquer l'évolution de la maladie et ses poussées inflammatoires. Des antiviraux ciblés pourraient mettre le virus au repos et empêcher l'évolution de la SEP. »
Car si les traitements immunomodulateurs/immunosuppresseurs permettent aujourd'hui d'éviter majoritairement l'apparition des poussées, la tolérance au long cours de ces traitements reste à évaluer. C'est le cas en particulier des anti-CD20, cette classe hautement efficace utilisée depuis moins de 20 ans. « Sera-t-il possible de les poursuivre très longtemps sans risque ? », se demande le président du comité scientifique, soulignant l'intérêt d'explorer de nouvelles voies.
La maladie commence avant les symptômes
Il est désormais clair en effet que, pour contrôler la maladie et diminuer le risque de handicap, il faut traiter vite et fort. « L'apparition du premier symptôme ne correspond pas au début de la maladie, explique le Pr Pelletier. L'IRM lors de la première poussée révèle des lésions anciennes silencieuses : le processus a en réalité déjà commencé plusieurs mois ou années auparavant. »
Il existe ainsi des syndromes radiologiquement isolés (ou RIS) qui correspondent à la découverte fortuite de lésions démyélinisantes à l'IRM. « On sait désormais que traiter très tôt, même sans aucun symptôme, permet de retarder l'apparition du premier symptôme, poursuit le Pr Pelletier. Cela ne signifie pas qu'il faut faire des IRM systématiques mais qu'il faut traiter très vite dès le diagnostic de SEP confirmé. »
Viser un contrôle à 100 % dès le début
Les premières années de la maladie sont déterminantes. « Si le traitement est mis en place deux ans après la première poussée, le risque de handicap à 10-15 ans est plus élevé que s'il est débuté au diagnostic », indique le neurologue. Pour juger de l'efficacité du traitement, le marqueur le plus sensible est l'IRM. « On ne peut plus accepter des médicaments partiellement efficaces, insiste le neurologue. Aucun signe de la maladie ne doit être présent, c'est la cible Neda, acronyme pour No Evidence Disease Activity : pas de poussée clinique, stabilisation du handicap, aucune modification à l'IRM. »
La surveillance du début doit ainsi être rapprochée afin de ne pas laisser passer le moment du passage vers un traitement hautement efficace, type anti-CD20 (rituximab, ocrélizumab), natalizumab ou cladribine. « Avec un diagnostic posé en moyenne vers 20-25 ans, l'objectif est d'avoir, à 50 ans, des conditions de vie normale sur le plan sportif, professionnel, familial », souligne-t-il.
Pour les anti-CD20, l'une des réponses à la question de la tolérance au long cours est l'espacement des perfusions. « C'est très variable selon les individus, allant d'un à trois ans entre deux perfusions, détaille le Pr Pelletier. L'idée est d'aller vers une médecine personnalisée via la surveillance de lymphocytes B particuliers, CD19 et CD27, dont le pool diminue avec l'efficacité des anti-CD20. Quand ils remontent au-delà d'un certain seuil, il faut traiter de nouveau. Cette approche pourrait permettre de diminuer les risques lors de l'utilisation au long cours. La pratique, développée d'abord à Marseille pendant la crise du Covid, est en train de se démocratiser, y compris à l'étranger. »
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