Un chiffre interpelle et résume le mal-être du monde de la santé : 50 à 60 % des soignants sont à risque d’épuisement professionnel. Le CHU de Toulouse se saisit du problème.
Depuis le service des pathologies professionnelles et environnementales qu’il dirige à l'hôpital Purpan, le Pr Fabrice Hérin est aux premières loges pour repérer l’épuisement des personnels de santé (soignants et non soignants). « Le constat s’est imposé depuis la pandémie de Covid, une époque où j’étais en charge des centres de vaccination et de dépistage. J’ai perçu des difficultés et depuis, les choses se sont très fortement accélérées », raconte le médecin.
Un état de fait qui l’a convaincu avec ses équipes, d’ouvrir un centre dédié de prévention de l’épuisement professionnel des soignants (Peps*) au sein de l’établissement.
Alors que des structures se consacrent déjà à la question en France, parfois sous le volet associatif (comme l’association Mots portée par le Conseil de l’Ordre des médecins) ou au sein des services de pathologies professionnelles de certains hôpitaux comme Caen ou Bordeaux, le médecin toulousain a décidé d’aller plus loin. Ce centre, ouvert aux personnels de santé des hôpitaux publics, des cliniques privées, des Ehpad, des établissements sanitaires divers et des libéraux de la région Occitanie, est un lieu de formation, d’information, d’écoute et de prise en charge.
Depuis son ouverture mi-mai, 20 patients ont déjà été accueillis, dont beaucoup d’aides-soignantes, d’infirmières et un seul médecin à ce jour. Tous sont issus autant du public que du privé et la plupart du temps adressés par leur médecin traitant.
« Tout le monde sait que le monde des soignants est en difficulté, confronté à un manque chronique d’effectif et à de plus en plus de violence, mais ce n’est pas la seule raison, explique le Pr Hérin. Dans leur quotidien, ils sont aussi confrontés régulièrement à la mort, particulièrement en oncologie, gériatrie ou soins palliatifs, et ceci augmente considérablement le risque de burn-out ».
Thérapie de groupe
Cet épuisement, Marie**, 49 ans et aide-soignante depuis 15 ans dans une clinique privée de la région Occitanie, l’a vécu. Au point de ne plus pouvoir se lever le matin. Diagnostiquée en burn-out par son médecin, elle a été orientée vers le Peps en mai dernier par la médecine du travail. « Quand on m’a parlé de ce centre avec des séances individuelles et en groupe de thérapie dédiée à l’épuisement professionnel, je me suis sentie tellement soulagée, se souvient-elle. En effet il faut comprendre qu’un burn-out est un effondrement physique et psychologique dans lequel on se sent terriblement seul. »
Les médecins du Peps proposent une prise en charge globale de trois à six mois en moyenne, qui comprend de la prévention, du soin et de l’accompagnement jusqu’à la reprise d’activité. Un premier niveau d'actions consiste à repérer les signes de l’épuisement professionnel et à délivrer de la formation à destination des médecins du travail.
Les patients diagnostiqués suivent une prise en charge hebdomadaire avec une psychologue clinicienne et des spécialistes de la prévention des pathologies professionnelles. Puis des ateliers collectifs de pratique de l’affirmation de soi et de restauration de la confiance en soi. « Nous les aidons à développer des ressources pour ne pas se mettre en difficulté et les accompagnons pour faciliter le retour au travail au bon moment », décline le spécialiste.
« Cette thérapie de groupe nous donne des clés pour verbaliser nos émotions, on se sent rassurés et écoutés car les témoignages des autres patients font écho avec notre propre vécu », explique Marie. Actuellement en phase pilote, le dispositif toulousain pourrait être pérennisé dès la fin de l’année.
*Peps accueille sur rendez-vous, téléphone : 05 61 77 21 90
** À la demande de la patiente, le prénom a été modifié.
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