C'est lors d'un bref passage à Paris que nous avons rencontré le Dr Jérôme Bahuon autour d'un café, affublé de tout son équipement, avant qu'il ne parte pour trois semaines de vacances sportives. À 33 ans, ce jeune Finistérien, qui partage son temps entre radiologie et sport, se prépare pour une traversée de près de deux mois de l'Atlantique en solitaire.
Très tôt, il développe un intérêt certain pour la biologie. Sans doute que les sorties avec son grand-oncle, médecin généraliste, n'y sont pas pour rien. « C'est un homme pour lequel j'avais une grande considération. Lorsqu'il m'emmenait à la pêche et me montrait comment réaliser un massage cardiaque sur les truites. Il me décrivait aussi les vertus des plantes lors de nos balades », se souvient le Dr Bahuon.
Un besoin de « toucher à tout »
Petit, il se voyait plutôt vétérinaire, mais plus tard, c'est vers la médecine qu'il se tourne finalement. Après l'externat, il hésite entre gastroentérologie et radiologie, des spécialités assez « larges ». Bien classé aux épreuves classantes nationales (ECN), c'est cette deuxième option qu'il choisira, notamment pour les horaires adaptés qu'elle permet. « J'adore la médecine, mais aussi tout un tas de choses à côté », justifie-t-il. Le sport occupe notamment une place centrale dans sa vie. Là aussi, le besoin de « toucher à tout » se fait ressentir. Tout au long de ses études de médecine, à Brest, il s'organise pour se libérer du temps. Le sport est un défouloir dont il ne peut se passer.
La proximité avec la mer lui permet de pratiquer des activités aussi variées que la chasse sous-marine, l'apnée, la planche à voile, le surf, en parallèle d'activités plus classiques comme le tennis ou le vélo.
Sport et médecine, deux passions
C'est donc avec l'idée de concilier ses deux passions, sport et médecine, que le Dr Bahuon s'est lancé un défi : traverser seul et sans assistance l'océan Atlantique à la rame, entre les Canaries et la Martinique, fin janvier 2019 (la date de départ n'est pas encore arrêtée) afin d'attirer l'attention du public sur les cancers du sang et sensibiliser au don de moelle osseuse.
S'il n'en est pas à sa première escapade en solitaire (GR20, Bolivie, Irlande…), c'est la première fois qu'il se lance dans un projet d'une telle envergure.
La lecture de « L'Atlantique à la rame » de Jean-Luc Torre lui a donné des envies d'évasion et de grand large. C'est ainsi qu'il s'inscrit en 2017 pour participer à la plus longue course transatlantique à l'aviron du monde, la « Rames Guyane » qui relie le Sénégal à la Guyane. Il n'ira finalement pas au bout de l'aventure en raison d'une annulation de la course puis d'un changement d'organisation : « la sécurité des participants n'était finalement plus assurée, j'ai donc préféré me lancer dans un projet personnel ».
Si ce défi vient avant tout d'un désir personnel, le Dr Bahuon souhaite y associer une cause qui lui tient à cœur. Il s'associe à la Fondation Leucémie Espoir, qui regroupe plusieurs associations françaises. Confronté à la leucémie dans son entourage proche, il souhaite encourager le don de moelle osseuse. C'est grâce à un donneur allemand, inscrit au registre international des donneurs, que la filleule de sa compagne, touchée par la leucémie, a pu être sauvée.
« Le don de moelle osseuse est trop méconnu. Il y a notamment beaucoup de confusions avec la moelle épinière notamment », déplore-t-il. Les échanges qu'il a eus avec le milieu associatif l'ont largement conforté dans ce choix. « Il y a une telle charge émotionnelle dans les assemblées générales, c'est poignant », rapporte-t-il.
Une démarche généreuse, qui ne semble guère surprendre son entourage. Ainsi de Guillaume Thomas, ami de longue date du Dr Bahuon, qui explique : « c'est à la fois une personne altruiste, soucieuse du bien-être des autres et qui aime les défis liés à la nature ».
Une dimension environnementale
Si la cause de la leucémie est son moteur, le radiologue souhaite aussi apporter à sa traversée une dimension environnementale. Il prévoit notamment de réaliser des prélèvements d'ichtyoplancton (larves de poissons) pour le fonds Explore Roland Jourdain de Concarneau, une communauté d'explorateurs d'horizons différents réunis par l'envie d'agir pour l'homme et la planète : « je réaliserai ces prélèvements tous les deux jours à l'aide d'un filet ». Le Dr Bahuon aura aussi affaire à plus gros que lui : « je vais contribuer au recensement des cétacés à l'aide de la plateforme OBSenMER ».
Mais avant de se lancer dans ce défi, il a fallu des mois d'intense préparation. Le radiologue a la chance d'avoir pu organiser son temps de travail de façon à se consacrer pleinement à son défi : « en octobre, j'ai travaillé deux semaines, en novembre une semaine, en décembre et début janvier, je ne travaillerai pas, donc je me consacrerai pleinement à l'entraînement physique ».
« Je suis inscrit dans un club d'aviron depuis deux ans, mais je n'ai pas pu m'entraîner autant que je voulais, car il y a énormément de choses parallèles à gérer », regrette-t-il. Ces dernières semaines, il a néanmoins pu intensifier sa pratique, tout en continuant une activité multisport.
À l'approche du jour J, son état d'esprit fluctue. S'il est plutôt dans une démarche « au jour le jour », il reconnaît une certaine appréhension : « forcément, c'est l'inconnu. En fait, il ne faut pas prendre trop de recul, sinon la peur prend le dessus ». Pour Guillaume Thomas, qui ne doute pas un instant des capacités de son ami, « tout va se jouer sur le mental et les ressources intérieures ».
De plus, il a toute confiance en la fiabilité de son bateau - qui a déjà fait trois traversées Rames Guyane - et en son routeur, Dominique Conin : « il a une grande expérience et je serai en contact chaque jour avec lui, pour qu'il m'informe des vents et des courants ».
Seul, mais connecté
Avant le départ, il devra effectuer quelques derniers réglages sur son bateau. « Je vais aussi essayer d'aller à la rencontre des skippers sur place pour les informer de mon défi et assurer un minimum de sécurité », ajoute-t-il.
Au sujet de la sécurité, Guillaume Thomas ne cache pas son inquiétude. S'il qualifie son ami de « calme, en pleine possession de ses moyens », il espère « qu'il prendra toutes les dispositions pour sécuriser son parcours ». Pour cela, le Dr Bahuon a déjà bénéficié d'une semaine de formation, qui l'a lui-même quelque peu rassuré : « je serai tout seul, mais j'aurai des balises de détresse en cas de danger ou de péril vital ».
Son bateau sera par ailleurs équipé d'un système de communication électronique. Le Dr Bahuon disposera également d'un téléphone iridium, système de téléphonie par satellite. « J'aurai même un accès Internet, ce qui me permettra d'alimenter les réseaux sociaux », souligne-t-il. Seul, mais connecté donc. « Facebook, Instagram, Twitter… Le but est de partager mon expérience au jour le jour ». Un défi supplémentaire pour le Dr Bahuon qui se qualifie lui-même d'introverti : « l'envie de faire parler du don de moelle osseuse me pousse à le faire ».
Pour soutenir le projet du Dr Jérôme Bahuon : https://www.lepotcommun.fr/pot/x6hpcibe
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