Moderna a annoncé le 19 avril de nouvelles données cliniques sur son premier candidat vaccin de rappel bivalent contre le Covid-19. Baptisé ARNm-1273.211, il combine la formule actuelle de son vaccin ciblant la souche ancestrale du Sars-CoV-2 (ARNm-1273) et une autre intégrant neuf mutations de la protéine Spike du variant Bêta, dont quatre sont communes à Omicron. Les résultats de phase 2/3 de ce rappel bivalent sont prépubliés sur « Research Square ».
Comparée à une dose de rappel de 50 μg avec la formule actuelle du vaccin de Moderna, la dose de 50 μg d'ARNm-1273.211 a une « supériorité contre les variants Bêta, Delta et Omicron un mois après son administration », indique un communiqué, précisant que « la supériorité s'est maintenue six mois après l'administration pour les variants Bêta et Omicron ».
Dans le détail, par rapport à un rappel d'ARNm-1273, les titres en anticorps neutralisants après une dose de rappel de 50 μg d'ARNm-1273.211 ont été multipliés par 2,20 et 2,15 contre Omicron à un mois et six mois, respectivement, et par 1,33 et 2,74, respectivement, contre Bêta. Contre Delta, les titres d’anticorps neutralisants ont été multipliés par 1,75 à un mois et par 1,20 à six mois.
Un rappel bivalent dès l'automne ?
Ces résultats confortent la démarche initiée par Moderna dès février 2021 en faveur du développement de différents candidats de rappel monovalents, mais surtout bivalents ciblant plusieurs variants. « L’essai sur le 211 (ARNm-1273.211), qui est une première, nous permet de valider la preuve de concept », explique au « Quotidien » Sandra Fournier, directrice générale de Moderna en France.
En novembre de la même année, alors qu’Omicron était détecté en Afrique du Sud, la biotech américaine s’est lancée dans le développement d'un candidat vaccin spécifiquement dédié à ce variant, baptisé ARNm-1273.529, actuellement en phase 3. Rapidement, le développement a avancé également avec un candidat de rappel bivalent, le 1273.214, associant la souche ancestrale et le variant Omicron (32 mutations). Il est évalué dans une étude de phase 2/3. Les premiers résultats sont prévus pour le deuxième trimestre 2022. « L’objectif est de produire des données d’efficacité et de tolérance le plus rapidement possible pour les soumettre aux autorités réglementaires et pouvoir proposer un booster pour l'automne », poursuit Sandra Fournier.
Cette réactivité est le résultat du modèle développé par Moderna avec sa plateforme sur l’ARNm. « La force de notre plateforme est de pouvoir adapter nos candidats vaccins extrêmement rapidement et en permanence », indique Sandra Fournier. Pour l’heure, la plateforme compte 44 candidats vaccins, dont 31 sur les maladies infectieuses. Si c’est contre le Covid-19 que les développements sont les plus avancés, la palette de candidats contre les virus respiratoires comprend aussi un vaccin contre le virus respiratoire syncytial (VRS) qui a donné des résultats positifs de phase 1 en 2021. La phase 2/3 a ainsi démarré début 2022 et vise à inclure 34 000 sujets de plus de 60 ans.
Fin 2021, Moderna a aussi annoncé des premiers résultats positifs de phase 1 pour un candidat vaccin quadrivalent contre la grippe saisonnière qui « permettent d’entamer les phases 2/3 », poursuit Sandra Fournier. Et, d’ici à la fin de l’année, la biotech espère pouvoir lancer les essais d’une première combinaison grippe et Covid. « L’objectif ultime est d’être les premiers à commercialiser une combinaison pour les trois maladies respiratoires que sont le Covid, la grippe et l'infection par le VRS », anticipe sa directrice générale en France.
Des essais « tous azimuts »
La société explore par ailleurs le « champ des possibles énorme » ouvert par la « révolution médicale » qu’est l’ARNm et entend décliner cette technologie, en préventif ou en thérapeutique, pour de nombreuses pathologies. Si la pandémie a réorienté une partie de ses recherches, Moderna poursuit des travaux sur les virus latents. « Le premier vaccin qu’on pensait lancer était contre le cytomégalovirus (CMV) », signale Sandra Fournier, précisant qu’un essai de phase 3 est en cours de recrutement.
Des essais sont menés « tous azimuts pour voir où cette révolution peut fonctionner », poursuit-elle, citant des recherches sur deux candidats vaccins contre le virus Epstein-Barr (EBV), un prophylaxique et un autre thérapeutique, des travaux préliminaires sur le VIH, avec le lancement de deux premiers essais cliniques avec ces deux candidats vaccins ARNm-1644 et ARNm-1574 pour « déterminer la dose efficace, mais aussi s’assurer que l’injection induit la production d’anticorps neutralisants par l’organisme », ou encore, des explorations en cancérologie et sur les maladies rares, pour des résultats espérés à plus long terme.
En parallèle, une stratégie mondiale de santé publique a été annoncée le mois dernier pour faire progresser les recherches dans la prévention des maladies infectieuses, dont notamment la dengue, le virus Ebola ou le paludisme. L’ambition est d’abord d’étendre, d’ici à 2025, son portefeuille de candidats vaccins en ciblant 15 pathogènes identifiés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme préoccupants et représentant un risque de santé publique. « L’idée est de lancer des essais cliniques jusqu’aux phases 1 pour être prêt à réagir rapidement en cas d’urgence épidémique », détaille Sandra Fournier.
Ensuite, un nouveau programme « mRNA Access » va mettre à disposition des chercheurs la technologie de Moderna pour la conduite de recherches externes. La biotech s’engage également à ne pas exercer ses droits de propriété intellectuelle dans les 92 pays à revenu faible ou intermédiaire.
Enfin, en novembre 2021, a été annoncée l’intention de s’implanter en Afrique. « Ce projet se concrétise avec la construction d’une première usine de production en Afrique. Un accord avec le Kenya a été signé et représente un investissement d’un demi-milliard de dollars pour la production de 500 millions de doses par an », précise Sandra Fournier. Moderna, qui ne comptait que 800 salariés avant la pandémie, vient de signer deux autres accords, l’un avec l’Australie, l’autre avec le Canada. Des discussions sont par ailleurs en cours au niveau de l’Union européenne pour implanter ses futures usines de production sur le continent.
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