DE NOTRE CORRESPONDANT
ON TENDAIT jusqu’ici à penser que l’approche vaccinale et l’emploi d’un microbicide étaient sans interférence ou, pire, qu’elles étaient concurrentielles. Il existe pourtant des arguments en faveur d’une telle association. En freinant la multiplication du virus au niveau des muqueuses locales, les microbicides pourraient donner à l’immunité vaccinale le temps de se développer et optimiser ainsi l’action sur la charge virale. L’équipe de John Moore a imaginé un stratagème original pour démontrer l’existence d’une action synergique vaccin/microbicide.
Contre l’acquisition de l’infection et la charge virale.
Afin de s’assurer de la réalité d’un effet complémentaire, les Américains ont utilisé des vaccins (V) à vecteur adénoviral (ciblant l’immunité lymphocytaire T), qui réduisent la charge virale mais sont, en principe, sans effet sur l’acquisition de l’infection. En ce qui concerne les microbicides (M), ils se sont arrangés pour utiliser des doses partiellement protectrices (protégeant la moitié des animaux en utilisation isolée), afin de ne pas masquer une action éventuelle du vaccin sur l’acquisition de l’infection.
Dans la première série d’expériences, les singes ont reçu un vaccin Ad26/Ad5HVR48 exprimant Gag-Pol-Env-Nef, en association (ou non) avec un inhibiteur de fusion, le microbicide T-1249, donné à la dose de 200 µg/mL. Les animaux étaient ensuite soumis à un challenge viral par le SIVmac251 par voie vaginale. Deux des six animaux ayant reçu l’association (groupe V+M) étaient protégés contre l’infection. Aucun animal n’est resté indemne dans les trois autres groupes (V pour vaccin seul, M pour microbicide seul, C pour contrôle).
Ce résultat encourageant a conduit à la deuxième série d’études avec, cette fois, un vaccin plus puissant (Ad35/Ad26 exprimant SIVsmE543 Gag-Pol-Env) et un microbicide dont l’effet préventif est actuellement évalué en clinique humaine, le maraviroc (un inhibiteur de CCR5). Le type de challenge a également été modifié (SHIV-162P3), de sorte que le composant Env du vaccin (un virus simien) ne soit pas apparié au virus du challenge (un VIH). Dans le groupe V, sept animaux sur huit sont infectés après challenge SHIV-162P3. Dans le groupe M, traité par microbicide seul, 4 singes sur 8 sont infectés. En revanche, dans le groupe V+M, deux animaux seulement sur sept sont infectés, ce qui correspond à une efficacité de 67 % (vs 43 % dans le groupe M). L’association est donc supérieure dans la prévention de l’acquisition de l’infection. Les chercheurs montrent qu’elle l’est également dans l’objectif de réduire la charge virale qui, exprimée en logarithme, s’élève à 2,4 et 2,3, au pic de la charge et à J28, dans le groupe V+M, tandis qu’elle est respectivement de 1,2 et 1,1 dans le groupe V et de 0,70 et 0,45 dans le groupe M.
Immunité cellulaire CD8+.
Ces deux études aux protocoles différents montrent donc toutes deux une efficacité supérieure de l’association du vaccin et du microbicide local sur l’acquisition de l’infection : cinq singes sur sept sont protégés dans la deuxième étude. Parce que, dans cette dernière, il existait une absence totale d’appariement entre les virus utilisés dans le vaccin et pour le challenge, les auteurs pensent que l’action vaccinale repose sur une immunité cellulaire CD8+ (plutôt que sur une sécrétion d’anticorps). Leurs résultats semblent confirmer l’hypothèse d’une action synergique reposant sur une freination de la diffusion du virus (l’effet du microbicide sur les foyers d’infection locaux) donnant le temps à la réponse immunitaire (vaccinale) de se développer assez pour éliminer ou limiter la réplication virale.
Moore John P. et coll. Macaque studies of vaccine and microbicide combinations for preventing HIV-1 sexual transmission. Proc Natl Acad Sci USA (2012) Publié en ligne
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