L’Afrique du Sud se lance dans le développement d’un premier vaccin à ARN messager sur le continent africain. Militant, notamment auprès de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), pour un accès équitable aux vaccins contre le Covid-19, le pays entend ainsi participer à l’autonomie de l’Afrique, alors que le continent reste à la traîne en matière de vaccination, avec à peine 4 % de la population africaine entièrement vaccinée.
« L'amère leçon que nous avons tirée de cette pandémie est que l'Afrique est presque entièrement dépendante » des vaccins produits en dehors du continent, a commenté auprès de l'AFP Richard Mihigo, coordinateur chargé des vaccins à l'OMS Afrique.
Pour développer les capacités du continent, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) avait lancé un appel à projets pour la création de « hubs » dédiés aux transferts technologiques. Ces structures sont destinées à faciliter la production et la distribution de vaccins dans les pays à faible revenu. En juin dernier, une biotech sud-africaine, Afrigen, basée au Cap, a ainsi été désignée pour accueillir la première plateforme de transfert de technologie de vaccins à ARN messager, financée par l’OMS via le mécanisme Covax.
Objectif « ambitieux » d'un premier vaccin en 12 mois
Alors que les discussions engagées avec les deux principaux producteurs de vaccins à ARNm, Pfizer et Moderna, n’ont pour l’instant pas abouti, le projet pilote d’Afrigen doit s’appuyer sur de la rétro-ingénierie pour reconstituer une formule proche du vaccin de Moderna. L'objectif, « assez ambitieux », est de « mettre le premier candidat en essais cliniques en 12 mois à partir du jour de la signature du transfert de technologie », indiquait Petro Terblanche, directeur général d'Afrigen, dans un communiqué en août dernier.
Une fois le vaccin élaboré, une autre société sud-africaine, Biovac, également implantée au Cap, se chargera de la production. Afrigen prévoit également de former d'autres pays africains à la fabrication du vaccin.
« Ce que nous recherchons, c'est un vaccin de deuxième génération, précise Martin Friede, coordinateur chargé des vaccins pour l'OMS à Genève. Nous devons commencer par un sosie de Moderna », mais l’ambition porte sur l’élaboration d’une formule « plus adaptée aux pays à faible revenu », à savoir ne nécessitant pas de basse température pour la conservation.
En parallèle, les négociations pour un accord sur les licences se poursuivent avec Moderna par l’intermédiaire de la « Medicines Patent Pool » (MPP), créée par Unitaid, l’organisation internationale en charge des achats de médicaments pour les pays pauvres. Avec un peu de chance, « nous pourrions obtenir un accord pour qu'ils ne fassent pas valoir leurs brevets », espérait Charles Gore, directeur de la MPP, le mois dernier.
De son côté, la biotech américaine a annoncé la semaine dernière son intention de construire une usine d'ARNm ultramoderne en Afrique. Si le lieu et la date n’ont pas été précisés, l’objectif est de produire jusqu'à 500 millions de doses de vaccin par an. En juillet, les laboratoires Pfizer et BioNTech annonçaient un partenariat avec Biovac pour la mise en flacon de leur vaccin à partir de 2022 en Afrique du Sud, mais la fabrication de l'ARN messager se poursuivra en Europe.
La levée des brevets toujours en discussion
Les annonces des groupes pharmaceutiques interviennent alors que la pression se poursuit en faveur d’une levée temporaire des droits de propriété intellectuelle sur les vaccins contre le Covid-19. Depuis des mois, l’Afrique du Sud porte, aux côtés de l’Inde, une proposition en ce sens auprès de l’OMC. Soutenue par de nombreux pays, dont les États-Unis, mais aussi l’OMS et des ONG, la proposition se heurte à l’opposition de l’Union européenne et des industriels.
Lors d’une table ronde, organisée par l’OMC fin septembre, le président sud-africain Cyril Ramaphosa a dénoncé une nouvelle fois l’iniquité vaccinale. « Le monde subit en ce moment les effets débilitants de l'inégalité dans les modèles de production mondiale. Alors que l'ingéniosité humaine a produit plusieurs vaccins contre le Covid-19 sûrs et efficaces, l'inertie humaine et l'égocentrisme des hommes ont sévèrement limité l'accès à ces vaccins pour de nombreuses personnes dans le monde », a-t-il déploré. Alors que de nouvelles discussions sont prévues à l’OMC les 13 et 14 octobre, l’espoir est désormais qu’un accord soit élaboré lors de la 12e conférence ministérielle de l'OMC qui doit se tenir du 30 novembre au 3 décembre à Genève.
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