« HALTE À LA RÉSISTANCE : sauvons les antibiotiques ». C’est avec ce mot d’ordre et la ferme volonté d’alerter les autorités sanitaires et politiques que s’est mise en place au printemps dernier l’Alliance francophone contre le développement des bactéries multirésistantes aux antibiotiques (AC-2-BMR). La création de cette Alliance s’est faite dans la foulée d’une journée organisée le 7 avril par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) consacrée à ce problème de résistances aux antibiotiques. « Le même jour, je cosignais avec 13 scientifiques du monde entier un article dans « Le Lancet », pour appeler à une forte mobilisation internationale sur le thème. Pour prolonger cet appel, nous avons estimé qu’il fallait créer cette structure représentant les francophones », explique le Pr Jean Carlet, le président de l’Alliance.
Dans son manifeste, l’Alliance adresse une mise en garde solennelle. « Après plusieurs décennies d’une utilisation souvent débridée des antibiotiques, nous entrons dans une période de risque et de pénurie, avec
l’apparition de bactéries extrêmement résistantes aux antibiotiques, voire à tous les antibiotiques, alors que très peu de nouveaux produits sont attendus dans les dix prochaines années », prévient ce Manifeste, en annonçant un « problème aigu de santé publique » pour l’homme et l’animal dans un futur proche. « Des échecs thérapeutiques lourds de conséquences cliniques surviennent d’ores et déjà et vont se multiplier dans les prochaines années, pour des infections jusqu’à présent tout à fait bénignes… grâce aux antibiotiques ! On estime que la résistance aux antibiotiques entraînerait au moins 25 000
décès par an en Europe, chiffre certainement sous-estimé », ajoute le manifeste.
Associer les médecins généralistes
Cette Alliance a dépassé aujourd’hui son cadre strictement francophone pour prendre une dimension internationale. « Elle regroupe aujourd’hui pratiquement 400 professionnels, dont 80 médecins étrangers, en général de haut niveau. Au sein de l’Alliance, on trouve une cinquantaine de sociétés savantes ou de groupes professionnels. Les usagers sont aussi représentés avec la présence du Lien et du CISS pour la France et je suis actuellement en contact avec d’autres associations d’usagers de la santé au niveau international. Enfin, nous avons avec nous une dizaine de généralistes ayant, pour certains, des fonctions d’enseignement. Il est très important d’associer à notre action ces médecins de ville », indique le Pr Carlet.
L’Alliance préconise la mise en place d’actions « urgentes et extrêmement vigoureuses », notamment une intensification des programmes de recherche et développement accéléré et facilité de nouveaux antibiotiques, la mise à disposition de tests de diagnostic rapides permettant de ne pas traiter ou d’affiner le choix antibiotique et la lutte « acharnée » contre la transmission croisée des bactéries résistantes, en ville comme à l’hôpital. « Mais notre principale revendication porte sur une protection active des antibiotiques. Dans ce domaine, on ne peut plus se contenter de discours. Il faut considérer les antibiotiques comme une classe de médicaments « à part » pour inciter les prescripteurs à faire preuve de prudence dans leur utilisation chez l’homme comme chez l’animal », indique le Pr Carlet.
Au cours des dernières semaines, les membres de l’Alliance ont essayé de faire passer ce message auprès du ministère de la Santé et des représentants des Agences sanitaires. « J’ai vu à plusieurs reprises Jean-Yves Grall, le directeur général de la Santé », indique le Pr Carlet, qui reconnaît que le récent plan Antibiotiques (2011-2016) va dans le bon sens. « Il y a de bonnes choses dans ce Plan qui est fort bien écrit. Mais il faut quand même maintenant passer à des mesures plus contraignantes », estime le président de l’Alliance, qui jugerait opportun qu’on « inscrive les antibiotiques au patrimoine mondial de l’Unesco ».
D’après un entretien avec le Pr Jean Carlet, président de l’Alliance francophone contre le développement des bactéries multi-résistantes aux antibiotiques (AC-2-BMR).
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