OUTRE qu’elle est une cause dominante de cécité dans le monde, l’infection à Toxoplasma gondii est particulièrement redoutable dans sa forme latente quand elle touche les patients atteints de sida. Les médicaments antiparasitaires de première ligne font défaut dans les pays en développement. Par ailleurs, ils ne permettent pas d’obtenir la guérison des formes enkystées. La recherche de nouveaux antiparasitaires, plus efficaces et bien tolérés, reste donc pleinement d’actualité.
Testés in vitro, les deux quinolones analogues de l’endokine sélectionnées par l’équipe de Michael Riscoe (Etats-Unis, Australie, Suisse, France) ont un pouvoir inhibiteur très supérieur à l’atovaquone (antiparasitaire majeur utilisé pour le traitement ou la prévention de la toxoplasmose), comme en témoignent les concentrations inhibitrices IC50 de 0,1 nM (pour l’ELQ-271) et de 0,007 nM (ELQ-316), vs 138 nM pour l’atovaquone.
Forts de ces résultats remarquables, les chercheurs ont alors évalué les deux molécules dans un modèle murin de toxoplasmose aiguë. Deux jours après l’inoculation d’une souche RH de T. gondii, les rongeurs étaient traités pendant cinq jours. La puissance d’action des deux analogues de l’endokine est confirmée par les concentrations efficaces (ED) : l’ELQ-271 et l’ELQ-316 ont une ED50 de 0,14 et 0,08 mg/kg et une ED90 de 1,06 et 0,33 mg/kg, respectivement (vs une ED50 de 0,85 mg/kg et une ED90 de 3,51 mg/kg pour l’atovaquone), sans toxicité manifeste même à la dose maximale de 50 mg/kg.
Sur la forme latente.
Plus intéressant était de savoir si le pouvoir inhibiteur des deux molécules se maintenait dans la forme latente expérimentale de la parasitose. Des souris ont été infectées avec des kystes de la souche ME49 de T. gondii puis traitées, cinq semaines plus tard, par 5 mg/kg d’atovaquone ou 5 ou 25 mg/kg d’ELQ-271 ou d’ELQ-316 pendant 16 jours. Le nombre de kystes (2 523 chez les animaux non traités) est réduit de 44 % par l’atovaquone, mais de 87 % ou 84 % par l’ELQ-271 (5 ou 25 mg/kg) et de 76 % ou 88 % par l’ELQ-316 (5 ou 25 mg/kg). Toutes ces différences par rapport à l’atovaquone sont fortement significatives (p ‹ 0,0001).
Comment s’explique l’action inhibitrice de ces deux nouveaux antiparasitaires, aussi puissante dans la forme latente que dans l’expression aiguë de la toxoplasmose? Les chercheurs montrent que l’ELQ-271 inhibe la cytochrome c reductase de T. gondii avec une IC50 de 30,6 nM (contre 8,2 nM pour l’endokine et 785 nM pour l’atovaquone). En outre, l’ELQ-271 inhibe l’enzyme cytochrome bc1 de Saccharomyces cerevisiae, souches qui se caractérisent par des substitutions d’acides aminés au niveau des sites Qo et Qi du complexe enzymatique. Mais l’observation d’une résistance de la forme mutante M221Q (avec substitution d’acides aminés au site Qi) à l’ELQ-271, résistance accrue d’un facteur 100, suggère que cet analogue a un mécanisme d’action distinct de l’atovaquone.
Un pouvoir lytique puissant.
Des études complémentaires (pharmacokinétiques, toxicologiques) vont être mises en place pour essayer de transformer les résultats de l’équipe de M. Riscoe en un espoir d’éradication des formes latentes de la toxoplasmose. Si le mécanisme du pouvoir lytique remarquable (notamment sur les kystes) de ces analogues de l’endokine est confirmé, ce serait la première fois que des inhibiteurs du site Qi du complexe cytochrome de T. gondii sont sur la voie de l’expérimentation clinique.
Michael K. Riscoe et coll. Endochin-like quinolones are highly efficacious against acute and latent experimental toxoplasmosis. Proc Natl Acad Sci USA (2012) Publié en ligne.
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