Antibiotiques injectables

Des doutes sur les génériques

Publié le 16/12/2011
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« DANS LA RÉGLEMENTATION actuelle, aucune étude de bioéquivalence n’est nécessaire pour les génériques injectables, sauf si les contrôles de qualité montrent l’existence d’une interaction entre un excipient et la substance active », déclare le Dr Rémy Gauzit. Les premiers doutes sont nés de la lecture d’une étude colombienne en août 2010, apparemment de qualité, qui soulignait une moindre efficacité des génériques de la vancomycine. Le Dr Rémy Gauzit, membre du groupe de travail anti-infectieux de la commission d’AMM, entreprend alors une revue de la littérature. Se penchant tout d’abord sur la pharmacocinétique, il constate notamment pour la colistine méthanesulfonate et ses génériques, l’existence d’une variabilité importante.

Variable du simple au double.

Alors que ses paramètres pharmacocinétiques sont similaires pour toutes les présentations, ceux de la colistine base (produit de dégradation de la colistine méthanesulfonate qui représente la forme la plus active de l’antibiotique) ne sont pas concordants. D’où un rendement en colistine base variable du simple au double entre le princeps et certains génériques. In vitro, les études suggèrent pour deux génériques de la teicoplanine sur sept une CMI double des autres sur des souches de staphylocoque méthi-R. Pour la Tazocilline, 46 lots de génériques testés sur diverses bactéries (E. coli, staphylocoque doré, pyocyanique) montrent des variations d’efficacité allant de + 10 à – 42 % (– 16 % en moyenne). Les études menées sur l’animal apportent des informations également inquiétantes. Chez la souris neutropénique, un modèle d’infection de la cuisse et un autre de méningoencéphalite montrent globalement une dispersion de l’activité des génériques par rapport aux antibiotiques princeps (oxacilline, gentamicine, vancomycine, imipénème).

Des données rares chez l’homme.

Quant aux données chez l’homme, elles sont rares. Un travail mené dans un service de chirurgie cardiaque, en Grèce, a montré une augmentation des infections postopératoires quand le générique de céfuroxime était utilisé en antibioprophylaxie. Reste à comprendre la cause de telles différences. « Pour l’instant, il ne s’agit que d’un faisceau d’arguments, aucune preuve formelle n’existe. Mais un certain nombre de questions existe, il faut se donner les moyens d’y répondre », explique le Dr Gauzit. « À l’hôpital, nous traitons nos patients avec une fausse impression de sécurité. Les génériques d’antibiotiques changent selon les accords commerciaux. Nous ne savons jamais lequel nous prescrivons. Il paraît nécessaire d’améliorer la qualité de leur dossier d’AMM avec une procédure analytique et galénique plus poussée. »

CHRISTINE FALLET

Source : Le Quotidien du Médecin: 9060