La suspicion d’allergie aux bêtalactamines représente le principal motif de consultations pour allergies médicamenteuses : 5 à 7% des patients (selon certaines études, ces chiffres peuvent atteindre 10%) pour les pénicillines et seules un quart des réactions sont réellement des allergies. Pour les céphalosporines, on estime à 1 à 3% cette fréquence (ces chiffres plutôt anciens ne tiennent pas compte des nouvelles molécules).
La chronologie des symptômes
Cliniquement, rien ne permet au premier abord de faire la part des choses entre ce qui est allergique et ce qui ne l’est pas. Les réactions immédiates si elles sont de nature allergiques, sont plutôt IgE-dépendantes alors que les réactions retardées sont de type IV « T dépendantes ». La symptomatologie clinique est multiple : urticaire, œdème, choc anaphylactique pour le type immédiat, réaction maculo-papuleuse pour le type retardé. Chronologiquement, ce qui est important n’est pas uniquement le délai d’apparition des symptômes par rapport à la prise initiale à J1 mais aussi par rapport à l’heure de la dernière prise d’antibiotique. Pour exemple, un choc anaphylactique peut apparaître après 3 semaines de traitement dans les heures qui suivent la dernière prise d’antibiothérapie. On peut même voir en cas de mécanisme retardé, l’apparition d’éruption cutanée 48 heures après l’arrêt du traitement. La voie IV est certainement la voie d’administration où la biodisponibilité de l’antibiotique est la plus rapide. On peut cependant voir également des formes graves des chocs anaphylactiques après une prise par voie orale.
Le bilan allergologique
Précédé d’un interrogatoire précis, les tests cutanés effectués en milieu hospitalier sont standardisés. Les intradermoréactions ont un double intérêt puisqu’elles explorent autant les réactions immédiates IgE-médiées (lecture après 20 minutes) que les réactions retardées (lecture 24 heures jusqu’à 8 jours après les tests : plaques érythémato-squameuse évoquant un eczéma ou apparition de vésicules ou bulles au point d’injection). La limite de ces IDR réside dans l’absence effective, pour certains antibiotiques, d’une forme injectable. La batterie de tests la plus utilisée comporte : ampicilline, amoxicilline, pénicilline G, céfuroxime et l’antibiotique suspecté dans la réaction allergique.
Les intradermoréactions étant douloureuses, chez le petit enfant, il faut se borner au strict minimum au niveau des tests et éviter toute application préalable de crème anesthésiante. Les IDR en raison de la douleur, ne sont normalement pas réalisées avant l’âge de 6 à 7 ans sauf urgence de traitement chez le tout petit.
Le test de provocation orale (TPO)
Le TPO en milieu hospitalier n’a son indication qu’en cas de négativité des tests cutanés en IDR et pricks. Le dosage des IgE-spécifiques de différentes molécules de pénicillines mis à disposition reste moins sensible que les tests cutanés et « totalement inutiles dans le cas d’urticaire aux pénicillines. Leur seule utilité réside dans l’indication de choc anaphylactique sévère.
Choisir un autre antibiotique
Toute suspicion réelle d’allergie aux bêtalactamines doit impliquée la réalisation de tests afin que le moment venu (possible infection nosocomiale) un ATB puisse être proposé. Dans le panel des tests effectués, il y a toujours une ou plusieurs molécules dont les tests sont négatifs et qui pourront être utilisés. Ceci est vrai pour les pénicillines mais également pour la famille des céphalosporines. La réaction immunologique initiale de l’allergie ne concerne jamais la molécule en entier mais plutôt une partie, variable d’un sujet à l’autre.
La réaction allergique au noyau bêtalactame est plutôt actuellement en régression. Ces vingt dernières années, c’est plutôt la chaîne latérale de l’amoxicilline très accessible aux IgE (pour les réactions immédiates) ou aux lymphocytes T (pour les réactions retardées) qui est concernée. Pour les céphalosporines, on considère actuellement que les réactions allergiques pour 1/3 sont dues au noyau bêtalactame, pour 1/3 à une partie de la molécule liée à la spécificité des céphalosporines au sein d’une même famille, et pour 1/3 à la spécificité propre de la molécule concernée.
En cas de suspicion d’allergie aux bêtalactamines, un bilan allergologique par tests cutanés et si nécessaire en cas de négativité un test de provocation orale en milieu hospitalier doit devenir systématique. Les tests cutanés servent à prouver la réalité de la réaction allergique mais aussi à trouver une autre molécule dans la même famille qui pourra être prescrite. Les dosages des IgE-spécifiques n’ont véritablement leur intérêt qu’en cas de choc anaphylactique sévère avec tests cutanés négatifs empêchant un test de provocation orale mais ne trouve absolument pas leur place dans l’exploration d’urticaire isolée.
* :10 ans d’évolution des consommations d’antibiotique en France, Juin 2011, Rapport d’expertise AFFSAPS : www.ameli-cent.fr/protégeons-les-antibiotiques
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