DE NOTRE CORRESPONDANTE
LA GREFFE de moelle osseuse allogénique chez les patients atteints de leucémie ou de lymphome offre un espoir de guérison. Néanmoins plus de la moitié des patients développent une réaction du greffon contre l’hôte dite chronique (GVHDc), car survenant plus de 100 jours après la greffe. Il s’agit d’une maladie inflammatoire systémique avec des manifestations auto-immunes. Cette complication, lorsqu’elle est sévère, est potentiellement mortelle et compromet la qualité de vie des patients.
La réaction est provoquée par les lymphocytes du donneur qui attaquent les tissus du receveur. Toutefois, un certain degré de GVHDc est bénéfique car il diminue le risque de rechute, via l’effet de la greffe contre la tumeur.
Le traitement par corticoïdes offre une efficacité limitée, aussi recherche-t-on de nouvelles voies thérapeutiques. Une approche prometteuse vise à augmenter le nombre des cellules T régulatrices (Treg).
Ces cellules, un sous-groupe des cellules T CD4+ qui expriment le CD25 et le facteur de transcription FOXP3, suppriment les lymphocytes autoréactifs et contrôlent les réponses immunes. Une dysfonction de ces cellules survient dans divers syndromes inflammatoires, dont la GVHD.
La survie et l’activité des cellules Treg.
Le transfert adoptif de cellules Treg s’est montré bénéfique dans des modèles animaux de GVHD, mais l’isolement et l’expansion de ces cellules se sont avérés difficiles chez l’homme. On sait depuis peu que l’interleukine 2 (IL-2) joue un rôle essentiel dans la croissance, la survie et l’activité des cellules Treg.
Dès lors, un traitement par de faibles doses d’IL-2 pourrait-il stimuler l’expansion in vivo des cellules Treg et supprimer les manifestations cliniques de la GVHD chronique ? C’est ce qu’ont étudié John Koreth (Dana-Farber Cancer Institute, Boston) et coll. dans une étude de phase 1.
L’équipe a enrôlé 28 patients atteints d’une GVHD chronique réfractaire aux corticoïdes. Ils ont été traités par de faibles doses sous-cutanées d’interleukine-2 (0,3 million, 1 million, ou 3 millions d’UI par m2 de surface corporelle, tous les jours pendant 28 jours), avec pour objectif d’évaluer la sécurité, ainsi que læs réponses clinique et immunologique. Après une pause de 4 semaines, les patients répondant au traitement ont pu recevoir l’IL-2 de façon prolongée.
Les résultats, même en l’absence d’un groupe témoin, montrent la grande efficacité du traitement, avec absence de progression de la GVHD chronique et de rechute du cancer hématologique. La dose maximale tolérée est de 1 million d’UI par m2. Les chercheurs rapportent un bon profil de sécurité.
Une réponse objective partielle.
Sur les 23 patients qui ont pu être évalués, 11 ont présenté une GVHD stable et 12 ont obtenu une réponse objective partielle. Surtout, le taux des cellules Treg, mais pas celui des cellules T conventionnelles (Tconv), s’est significativement accru durant le traitement (plus de 8 fois la valeur initiale), aboutissant à une augmentation du rapport Treg/Tconv qui était en moyenne plus de 5 fois le rapport initial. Aucun changement des cellules T CD8 n’a été noté, peut-être en raison de l’utilisation du sirolimus et d’autres agents immunosuppresseurs.
Enfin, les réponses immunologiques et cliniques se sont maintenues chez les patients qui ont continué à recevoir l’IL-2 de façon prolongée. Ce qui permettait de diminuer la dose de corticoïdes de 60 % en moyenne (de 25 à 100 %).
« Nous montrons pour la première fois que l’IL-2, utilisée d’ordinaire à doses élevées comme immunostimulant dans le traitement du cancer, peut, prescrite à faibles doses, supprimer l’inflammation immunitaire sous-tendant la GVHD », explique au « Quotidien » le Dr John Koreth. « Un essai clinique de phase 2 évaluant l’IL-2 à faibles doses dans le traitement de la GVHD est en cours. »
« Une dysfonction des cellules Treg est associée à diverses affections auto-immunes comme le lupus érythémateux disséminé, les maladies inflammatoires de l’intestin, la sclérose en plaques, etc. Une immunothérapie par IL-2 à faibles doses, qui stimule préférentiellement l’expansion des cellules Treg directement chez le patient, pourrait constituer un nouveau traitement utile dans plusieurs de ces maladies inflammatoires d’origine immune ».
New England Journal of Medicine, 1er decembre 2011, Koreth et coll.
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