Dr Romain Favre, CHRU de Strasbourg

« Il faut apprendre à gérer le DPNI »

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Publié le 24/06/2019
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Romain Favre

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DPNI

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LE QUOTIDIEN. Désormais, quelles sont les modalités pratiques du dépistage de la trisomie 21 ?

Dr ROMAIN FAVRE. Il s'agit d'une fusée à deux étages, avec tout d'abord le dépistage combiné basé sur 5 paramètres (âge maternel, marqueurs sériques du premier trimestre entre 11 semaines d'aménorrhée (SA) + 0 jour et 13 SA + 6 jours et mesures échographiques de la clarté nucale et de la longueur craniocaudale) qui permet de distinguer trois groupes de risque. Si le risque est inférieur à 1/1000, il n'y a pas de DPNI. Si le risque est supérieur à 1/50, la femme est orientée vers la réalisation d'un caryotype, notamment en raison de la probablilité d’autres anomalies déséquilibrées. Enfin, si le risque est compris entre 1/51 et 1/1000, un dépistage prénatal non invasif (DPNI) portant sur l’ADN fœtal libre circulant dans le sang maternel (ADNlcT21) est proposé.

À défaut du dépistage combiné du premier trimestre, un dépistage peut être réalisé au cours du deuxième trimestre (T2), en se basant sur les marqueurs sériques du T2, avant 17 SA + 6 jours et préférentiellement après 15 semaines d'aménorrhée. Ce dépistage tardif s'accompagne de plus de faux-positifs, mais le DPNI, s'il est indiqué, sera pris en charge.

Au niveau des laboratoires, l'objectif est d'avoir une couverture nationale homogène et un contrôle qualité de haut niveau. Il importe notamment de tenir compte du critère taux de non rendu, qui pourrait générer beaucoup d'amniocentèses inutiles.

Quelles sont les limites de cet arrêté ?

La première est qu'il porte exclusivement sur la trisomie 21, et pas sur le dépistage des trisomies 13 et 18. L'arrêté est ambigu car il stipule « marqueurs sériques », qui sont aussi des marqueurs de la trisomie 18. Certaines femmes ayant un profil biologique évocateur d'une trisomie 18 n'ont ainsi pas accès au DPNI, dont la sensibilité est certes un peu moins moindre que pour la trisomie 21 (où elle est estimée à 99,8 %) mais s'élève néanmoins à 98 %.

Autre problème : le caryotype est pris en charge pour les femmes âgées de plus de 38 ans qui n'ont pas bénéficié de dépistage au premier trimestre, alors que le DPNI ne l'est pas.

Les praticiens sont-ils aujourd'hui suffisamment formés à l'utilisation du DPNI ?

Ce dépistage, fondé sur l'ADNlcT21, ne peut pas être prescrit comme la sérologie de la toxoplasmose. Si le résultat est positif, il signifie, dans quasiment tous les cas, que le fœtus est porteur d'une trisomie 21, ce qui est une annonce très brutale, qu'il faut apprendre à gérer.

En pratique, il faut parler du dépistage combiné et du DPNI lors de la consultation du premier trimestre. Il y a ainsi une vraie marge de progrès dans la qualité du rendu. C'est d'ailleurs dans cet objectif que nous proposons, dans le service, une formation au DPNI tous les vendredis.

(1) https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT00003783…

Propos recueillis par la Dr Isabelle Hoppenot

Source : Bilan Spécialiste