Gynécologie

Endométriose rectale : des ultrasons focalisés de haute intensité

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Publié le 04/03/2022
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À Lyon, l'équipe du Pr Gil Dubernard mène depuis 2015 un protocole de recherche clinique sur le traitement de l’endométriose rectale par ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU).
Des résultats encourageants notamment contre les douleurs durant les règles

Des résultats encourageants notamment contre les douleurs durant les règles
Crédit photo : Phanie

C’est la première équipe au monde à proposer ce type de protocole dans l'endométriose rectale. L'équipe du Pr Gil Dubernard propose de la prendre en charge à l'aide d'ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU). La lésion est traitée en quelques minutes au lieu de plusieurs heures de chirurgie.

« L’endométriose rectale est l’une des localisations les plus fréquentes, mais surtout les plus symptomatiques de l’endométriose, souligne le Pr Dubernard, chef du pôle mère-enfant à l’hôpital de la Croix-Rousse à Lyon. La localisation est très mal placée, car située au carrefour de l’utérus, du vagin et du rectum. Cela provoque des douleurs de règles, des douleurs lors des rapports, mais aussi des troubles digestifs en raison de l’infiltration du rectum. »

Actuellement, même si la moitié des femmes atteintes bénéficient d’un traitement conservateur, l’autre moitié se voit retirer le rectum, avec des séquelles importantes (besoin d’aller à la selle plusieurs fois par jour, motricité rectale absente, rétention d'urine, etc.). « C’est une chirurgie qui soulage, mais qui est source de séquelles fonctionnelles qui peuvent persister durant toute la vie de la patiente », résume le gynécologue.

Le spécialiste, qui a pratiqué la chirurgie de l’endométriose lourde pendant 10 ans, a commencé à s’intéresser à des techniques moins invasives en 2012. « Un collègue qui étudiait les HIFU sur le placenta m’a conseillé d’aller voir les urologues qui traitent par HIFU les cancers de la prostate, explique-t-il. J’ai alors monté en 2012 un essai thérapeutique utilisant le même dispositif médical, le Focal One, de la société française EDAP TMS. »

Une lésion traitée en moins de 5 minutes

Les HIFU sont administrés par voie endorectale via une sonde, constituée d’un transducteur d’imagerie qui permet de localiser la lésion et de guider le traitement en temps réel et d’un transducteur de traitement composé de 13 anneaux concentriques d’ultrasons à haute intensité. Ils se concentrent sur la région à traiter et permettent d’atteindre une température de 85 °C. « Le volume de traitement pour chaque tir est de la taille d’un grain de riz. Ce qui permet de traiter la lésion avec une extrême précision. Il faut trois à cinq minutes de traitement effectif pour détruire une lésion », précise le Pr Dubernard.

Une étude qui prend de l’ampleur

Après une étude de faisabilité parmi 20 patientes entre 2015 et 2018 à Lyon, l’équipe lyonnaise termine les inclusions d’une seconde étude de sécurité commencée en septembre 2020. Quatre autres centres ont ouvert en France à Paris, Lille, Angers et Bordeaux. L’étude initiale devait inclure 38 patientes, mais, au vu des résultats préliminaires confirmant les résultats de l’étude de faisabilité, le comité scientifique a décidé d’augmenter les inclusions à 60 patientes (fin des inclusions en avril 2022).

« Nous avons obtenu des résultats très encourageants. Par exemple, les douleurs lors des rapports, qui étaient évaluées à 4-5 avant traitement, sont estimées à 1 après, et les douleurs de règles qui étaient à 6-7 avant, tombent à 3. Et nous n’avons eu aucun événement indésirable grave lié au traitement », détaille le Pr Dubernard. Autre avantage de cette technique : sa durée réduite, avec une médiane de 33 minutes de traitement et de 60 à 75 minutes de bloc opératoire, contre 5 à 6 heures en cas de chirurgie. L’équipe, qui envisage d’ouvrir d’autres centres en France et en Europe, développe des contacts à l’international et notamment avec des équipes prestigieuses aux États-Unis.

Anne-Gaëlle Moulun

Source : Le Quotidien du médecin