La chimiothérapie péri-opératoire à base de 5-fluoro-uracile (5-FU) et d'un sel de platine est le traitement de référence des formes résécables des cancers gastriques. Cependant, une récente étude a modifié les pratiques…
FLOT, le nouveau standard de chimiothérapie péri-opératoire adjuvante
Dans l’essai randomisé de phase 2/3 FLOT 4, une trichimiothérapie péri-opératoire FLOT associant 5-FU, oxaliplatine et docetaxel s'est montré supérieur à la chimiothérapie classique à base de 5-FU et sel de platine (1). Cette étude a montré que le schéma FLOT (4 cycles avant puis 4 cycles après la chirurgie), par rapport au protocole de référence, améliorait la survie globale (50 mois vs 35 mois ; p = 0,012) et la survie sans récidive des patients, mais au prix d'une toxicité plus importante.
Et dans les ADCI ?
La chimiothérapie péri-opératoire doit rester le traitement standard dans toutes les formes histologiques de cancer gastrique, y compris les adénocarcinomes gastriques à cellules indépendantes (ADCI) dont la chimiosensibilité est présumée moins bonne que celle des adénocarcinomes de type intestinal. L'essai randomisé français de phase 2/3, PRODIGE 19, a montré qu'une chimiothérapie péri-opératoire permettait, par rapport à une chirurgie première suivie d’une chimiothérapie post-opératoire, un downstaging, une réduction du risque de résection incomplète, sans majoration des complications postopératoires, ainsi qu'une relative amélioration de la survie (60 % vs 53 % à 2 ans) [2]. Ces résultats ajoutés à l’analyse en sous-groupes de l’étude FLOT 4 (1), montrant que les patients avec ADCI bénéficiaient du schéma FLOT comme les autres types histologiques, sont en faveur d'une chimiothérapie péri-opératoire systématique en cas d'ADCI localisé résécable.
Poursuivre le blocage de HER2 en 2e ligne métastatique ?
En cas de surexpression de HER2, le traitement de référence de première ligne des patients avec adénocarcinome gastrique métastatique est une chimiothérapie à base de fluoropyrimidine et sel de platine associée à l'anticorps anti-HER2 trastuzumab. Deux études randomisées récentes n'ont pas validé l'intérêt de poursuivre un anti-HER2 au-delà de la première ligne thérapeutique chez ces patients (3,4).
Trifluridine-tipiracil, efficace en 3e ligne métastatique
Jusqu'à présent, aucune molécule n'avait démontré un intérêt en troisième ligne dans les cancers gastriques métastatiques en l'absence d'essai randomisé disponible. C'est désormais chose faite avec le trifluridine-tipiracil, un nouvel analogue nucléosidique, qui a montré sa supériorité par rapport au placebo chez des patients lourdement prétraités dans l'essai de phase 3 international TAGS (5). Ce traitement oral, dont la principale toxicité est hématologique, améliorait significativement la survie globale (5,7 mois vs 3,6 mois ; p = 0,0006), la survie sans progression, le taux de contrôle de la maladie et le temps jusqu'à dégradation de l'état général. Une demande d'extension de son AMM dans les cancers gastriques est en cours.
L'immunothérapie, encore loin des pratiques quotidiennes…
Une étude de phase 3 asiatique a montré un bénéfice en survie du nivolumab, anticorps anti-PD1, versus placebo, en troisième ligne métastatique (6). Cependant, dans cette même indication, un autre essai international de phase 3 n'a pas mis en évidence de supériorité de l'avelumab, anticorps anti-PD-L1, par rapport à une chimiothérapie (7). L'évaluation de l'immunothérapie dans les lignes plus précoces n'a pas été plus concluante. Concernant le pembrolizumab, les résultats négatifs de l'étude asiatique de phase 3, KEYNOTE-061, n'ont pas montré de supériorité avec cet anticorps anti-PD1, versus paclitaxel, en seconde ligne (8). De plus, les résultats de l'essai KEYNOTE-062 ont récemment rapporté, en première ligne métastatique, l'absence de bénéfice du pembrolizumab ajouté à la chimiothérapie, et uniquement sa non-infériorité par rapport à la chimiothérapie lorsqu'il est utilisé en monothérapie (9).
L'immunothérapie reste donc en cours d'évaluation car sa supériorité n'a pas encore été démontrée à ce jour par rapport à la chimiothérapie, sauf en cas de tumeur avec instabilité des microsatellites, biomarqueur avéré de sensibilité aux inhibiteurs de checkpoint immunitaire. Il est donc important de rechercher ce phénotype afin d'orienter les patients vers des essais d'immunothérapie.
Service des maladies de l’appareil digestif, CHU Pontchaillou; Université Rennes 1, Rennes
(1) Al-Batran SE, Homann N, Pauligk C, et al. Lancet 2019 May 11;393(10184):1948-57.
(2) Eveno C, Adenis A, Bouche O, et al. J Clin Oncol 2019; 37, no. 15_suppl: 4019.
(3) Thuss-Patience PC, Shah MA, Ohtsu A, et al. Lancet Oncol 2017;18(5):640-53.
(4) Makiyama A, Sagara K, Kawada J, et al. J Clin Oncol 2018; 36, no. 15_suppl : 4011.
(5) Shitara K, Doi T, Dvorkin M, et al. Lancet Oncol. 2018 Nov;19(11):1437-48.
(6) Kang YK, Boku N, Satoh T, et al. Lancet. 2017 Dec 2;390(10111):2461-71
(7) Bang YJ, Ruiz EY, Van Cutsem E, et al. Ann Oncol. 2018 Oct 1;29(10):2052-60.
(8) Shitara K, Özgüroğlu M, Bang YJ, Di Bartolomeo M, et al. Lancet. 2018 Jul 14;392(10142):123-33.
(9) Tabernero J, Van Cutsem E, Bang Y-J, et al. J Clin Oncol 2019; 37, no. 15_suppl: LBA4007.
(10) Le DT, Durham JN, Smith KN, et al. Science 2017;357(6349):409-13.
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