La carcinose péritonéale constitue une pierre d’achoppement dans la prise en charge des cancers colorectaux (CCR), car les traitements dont on dispose sont limités. La radiothérapie est insuffisante car elle ne peut être étendue à l’ensemble de la cavité péritonéale, la chirurgie est difficile et entachée d’une morbidité importante, et il existe un certain degré de résistance à la chimiothérapie dont la pénétration intrapéritonéale est mauvaise.
Outre les cancers de l’ovaire, la carcinose péritonéale peut être associée aux tumeurs digestives, que ce soit au niveau gastrique où l’extension peut être rapide ; pancréatique où la carcinose péritonéale n’est pas toujours visible immédiatement mais présente assez précocement ; hépatique en cas de tumeur importante avec rupture capsulaire ; et enfin au niveau colique, en particulier dans les T4 pour lesquels le risque de diffusion péritonéale est majeur. D’où les espoirs mis dans la chimiothérapie hyperthermique intrapéritonéale (CHIP) en combinaison avec l’exérèse des foyers tumoraux. Mais si elle est efficace dans les carcinoses liées aux cancers de l’ovaire, elle n’a pas vraiment tenu ses promesses dans le CCR.
CHIP ou PIPAC ?
Une étude française récente, PRODIGE-7 a randomisé les patients en deux groupes, résection chirurgicale associée ou non à la CHIP (1). « Les résultats ne sont guère concluants, la survie étant identique dans les deux bras, et ne permettent pas de poser l’indication de façon systématique. Cette technique ne doit cependant pas être écartée, mais discutée au cas par cas. Elle est probablement plus efficace si la carcinose est localisée », explique le Pr Éric Raymond.
En revanche, la PIPAC (Pressurized Intra-Peritoneal Aerosol Chemotherapy) semble très prometteuse. Cette technique développée depuis 15 ans consiste à administrer par voie cœlioscopique la chimiothérapie directement au contact du péritoine sous forme d’aérosols. Il s’agit d’un geste à visée palliative, sans résection chirurgicale, donc avec une morbidité bien moindre que la CHIP. Son objectif est de ralentir la progression tumorale et elle peut être réitérée après un intervalle de 4 à 6 semaines.
Les CAR-T cell à l’étude
Les données d’un essai mené avec la thérapie cellulaire par CAR-T dans les tumeurs solides devraient prochainement être présentées lors du congrès de la SITC (Immunotherapy of Cancer). Ce type de thérapeutique semble prometteur, mais la mise au point en oncologie digestive est plus complexe qu’en hématologie, du fait de l’hétérogénéité du répertoire des antigènes tumoraux dans les CCR ou les autres cancers digestifs, et elle reste actuellement du domaine de la recherche.
Biopsie liquide, future aide au dépistage et au suivi des CCR ?
La biopsie liquide a fait ses preuves dans le cancer du poumon et n’en est qu’à ses débuts dans les CCR. Elle permet par un simple prélèvement sanguin d’étudier l’ADN tumoral circulant porteur des mutations génétiques spécifiques de la tumeur. Elle a potentiellement une première indication pour le dépistage des personnes à risque, et permettrait aussi d’identifier précocement les personnes gardant une maladie cancéreuse résiduelle après la chirurgie et susceptibles de bénéficier d’une chimiothérapie adjuvante pour éviter les récidives. Pour les stades III on sait que 50 % vont rechuter, 30 % pour les stades II, mais aucun élément ne permet actuellement de le prédire. Une étude présentée à l’ESMO (2) confirme que la biopsie liquide pourrait guider la stratégie thérapeutique et savoir quels sont les patients qui bénéficieraient ou non de la chimiothérapie adjuvante.
D’après un entretien avec le Pr Éric Raymond, oncologue, hôpital Saint-Joseph (Paris)
(1) Quenet F, Elias D. A UNICANCER phase III trial of hyperthermic intra-peritoneal chemotherapy (HIPEC) for colorectal peritoneal carcinomatosis (PC): PRODIGE 7.
J Clin Oncol 2018;36, suppl; abstr LBA3503.
(2) « Mutation tracking in circulating tumor DNA (ctDNA) detects minimal residual disease (MRD) in patients with localized colorectal cancer (CRC) and identifies those at high risk of recurrence». Annals of Oncology 2019;30(5)
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