Dernier arrivé dans le paysage déjà chargé des nouveaux traitements de l'hépatite C, Zepatier, une association fixe d'elbasvir (inhibiteur de la protéine NS5A1) et de grazoprevir (inhibiteur de la protéase NS3/4A1) vient à son tour d'obtenir son prix de vente au terme d'une négociation menée avec le comité économique des produits de santé (CEPS).
Zepatier, indiqué dans le traitement des infections par des virus de l'hépatite C de génotype 1 et 4 coûte donc 28 732 euros pour une cure de 12 semaines. Sur le papier, cela représente une baisse d'environ 40 % par rapport aux prix d'autres traitements comme Harvoni (46 000 euros pour 12 semaines) ou Viekirax (39 000 euros pour 12 semaines). Dans les faits, « le Zepatier est principalement destiné au traitement des génotypes 1b, nous explique le Pr Victor Ledinghen de la consultation de gastro-hépato-entérologie du CHU de Bordeaux et ancien président de l'AFEF, une indication dans laquelle le traitement de référence actuelle est de 8 semaines d'Harvoni ».
Les médecins auront donc le choix entre un traitement de 8 semaines d'un peu plus de 30 000 euros ou un traitement de 12 semaines coûtant près de 29 000 euros. Une économie plus faible que prévu.
Un nouveau paradigme
D'autres traitements vont arriver sur le marché dans l'année à venir : une association de glecaprévir et pibrentasvir de Abbvie, le G/P, suivie de la triplette de Gilead : sofosbuvir, velpatasvir et voxilaprévir. Cette avalanche d'options thérapeutiques et la possibilité de les proposer à tous les patients, dessinent un nouveau paradigme obligenat le corps médical à repenser l'organisation du dépistage et des soins. Pour le Pr Daniel Dhumeaux, auteur de deux rapports en 2014 et 2016 sur la prise en charge de l'hépatite C, il faut désormais dépister les 75 000 malades ignorant leur statut. « Il faut être vigilant sur le risque de réinfection explique-t-il au « Quotidien ». Le taux de réinfection n'est pas très élevé chez les usagers de drogues, environ 3 % au bout de 15 ans, mais chez les hommes ayant des relations sexuelles avec d'autres hommes, il atteint 25 % à 3 ou 4 ans. Il va donc falloir proposer des stratégies de réduction des risques. »
L'hépatologue espère une collaboration de l'ensemble des acteurs, pour organiser un dépistage au moins une fois dans la vie de chaque Français. « Une idée simple serait d'organiser une journée de dépistage gratuit une fois par an, suggère le Pr Dhumeaux. On est maintenant dans un système fermé où les patients sont toujours traités s'ils sont dépistés et guérissent à 95 %. On peut refermer le chapitre de l’hépatite. »
Des populations à risque
Dans le rapport écrit par le Pr Dhumeaux sous l'égide de l'ANRS (France Recherche Nord & sud Sida-hiv Hépatites) et du CNS (Conseil national du sida) en collaboration de l'association française pour l'étude du foie (AFEF), quatre populations cibles ont été définies : les personnes migrantes et étrangères, la population carcérale, les usagers de drogues, et les personnes coïnfectés dont « la moitié n’est pas prise en charge sur le plan thérapeutique », poursuit le Pr Dhumeaux.
Selon le Pr Michel Doffoel, du service expert de lutte contre les Hépatites Virales d’Alsace (CHRU de Strasbourg), « dans notre CSAPA, sur 2 000 usagers, nous avons 20 % de fibroses sévères et 25 % d'hépatite C et B ». Le Pr de Ledinghen, estime quant à lui qu'un « dépistage tous les 12 mois, en médecine générale. est nécessaire pour les usagers de drogues, mais les tests rapides d'orientation diagnostique ne sont pas généralisés et tout le monde n'est pas formé à les utiliser », rappelle-t-il.
En ce qui concerne les personnes détenues, le travail est immense : « à Bordeaux, il m'a fallu un an de démarche pour qu'un interne puisse aller consulter dans les maisons d'arrêts », se souvient le Pr De Ledinghen, qui insiste aussi sur la nécessité de « former les gardiens de prisons qui croient encore que l'hépatite C se transmet par la salive ».
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