La diversité de la spécialité hépatogastroentérologie qui recouvre un spectre très large des pathologies prises en charge, est incontestablement une richesse. « Mais cela rend la spécialité difficile à cerner pour le grand public, et même les autorités de santé et les acteurs de santé publique, reconnaît le Pr Frank Zerbib (Bordeaux), coordinateur du Livre blanc 2020 de l’hépatogastroentérologie. Vingt ans après la précédente version, cet ouvrage initié par le Conseil national professionnel d’hépatogastroentérologie (CNP-HGE), qui fédère l’ensemble des sociétés savantes, les organisations professionnelles et le syndicat de la spécialité, est conçu comme un outil d’aide à la décision publique et un corpus de références ».
Un million de pathologies digestives chroniques graves
Les pathologies digestives sont parmi les motifs les plus fréquents d’hospitalisation. Elles concernent plus de cinq millions de Français, dont un million est atteint de pathologies chroniques graves, principalement de cancers digestifs (44 %), pathologies hépatiques (26 %) et maladies inflammatoires chroniques de l'intestin ou MICI (22 %), à l’origine de plus de 700 000 ALD. Selon les projections, en 2024, l’incidence des pathologies digestives augmentera de 40 %, 23 % et 8 % respectivement pour les pathologies en lien avec la nutrition, les MICI et les cancers digestifs.
À bien des égards, le paysage en hépatogastroentérologie change. Les évolutions épidémiologiques récentes (fréquence accrue des hépatopathies métaboliques et cancers dont celui du pancréas, chronicisation des pathologies, etc.), les progrès diagnostiques et techniques (en endoscopie notamment), les avancées thérapeutiques (biothérapies, traitement de l’hépatite C) et les nouvelles politiques de santé en particulier en matière de prévention et de dépistage ont bouleversé la prise en charge des patients et les pratiques médicales. Un exemple parmi d’autres est la modification de la typologie des séjours hospitaliers du fait de la forte augmentation de l’activité ambulatoire.
Vers une hausse des dépenses et des consultations
Les dépenses de santé évoluent également : en 2016, le coût de la prise en charge des pathologies digestives dépassait les six milliards d’euros, en augmentation de 1,2 milliard par rapport à 2012. Cette même année, les hépatogastroentérologues ont réalisé 4,2 millions de consultations, dont 3,1 en ville et 1,1 en consultations externes d’un établissement public. L’extrapolation de l’évolution du nombre de consultations entre 2012 et 2016 montre une tendance à l’augmentation des consultations de 10 % entre 2016 et 2024, soit environ 1,3 % par an.
« Les enjeux sont multiples pour la profession, constate le Pr Frank Zerbib, à commencer par la démographie médicale : 44 % des gastro-entérologues étaient âgés de plus de 55 ans en 2018. Les « déserts gastroentérologiques » existent déjà, avec des répercussions sur la qualité des soins et les politiques en matière de dépistage. Nous devons valoriser le dynamisme scientifique (programmes d’intelligence artificielle, biothérapies, etc.) pour renforcer l’attractivité des jeunes médecins pour notre discipline. Il est aussi urgent de maintenir l’accès à l’oncologie digestive aux futurs hépatogastroentérologues ».
D’après l’interview du Pr Frank Zerbib (CHU de Bordeaux) et la conférence de presse du CNP-HGE
Le Livre blanc 2020 est disponible en ligne http://www.livre-blanc-cnp-hge.fr
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?