Malgré l’élargissement de l’arsenal thérapeutique, le nombre de patients souffrant de MICI en échec primaire ou secondaire au traitement reste élevé. « Ainsi, le besoin en nouveaux traitements, plus efficaces à court et long terme, mieux tolérés, bien acceptés et si possible moins chers est toujours présent », rappelle le Pr Mathurin Fumery (CHU d'Amiens).
Dans la rectocolite hémorragique (RCH) et la maladie de Crohn (MC), l’arrivée de l’infliximab administrable par voie sous-cutanée est la principale actualité pour la classe des anti-TNF.
« Les bons résultats rapportés dans les études cliniques - taux sanguin plus élevé, et immunogénicité plus faible, qui pourrait permettre d’éviter une association à un traitement immunosuppresseur - doivent maintenant être confirmés en vraie vie », poursuit le Pr Fumery. Mais le problème du maintien de l’efficacité du traitement dans le temps reste entier, quelle que soit la molécule. On observe de 20 à 30 % d’échec primaire et 10 % par an d’échec secondaire, même avec les nouvelles biothérapies développées ces dernières années (ustékinumab, védolizumab), soulignant la nécessité de nouveaux traitements.
Plusieurs voies sont en cours de développement, ce qui devrait se traduire par la mise à disposition de nouveaux traitements au cours des prochains mois.
Des petites molécules attendues
Tout d’abord, la mise à disposition des petites molécules. Le tofacitinib, seul inhibiteur de JAK actuellement disponible, expose à des problèmes de tolérance (augmentation du risque thrombo-embolique veineux, artériel et de certains cancers). L’efficacité du filgotinib et de l’upadacitinib, inhibiteurs plus spécifiques de JAK 1, a été confirmée pour les études de phase 3 au cours de la RCH, tant chez les patients naïfs de traitement qu’en échec de biothérapie. Ces études sont en cours dans la MC. Cette inhibition plus spécifique de JAK1 pourrait être associée à un meilleur profil de tolérance selon des premières données présentées lors des récents congrès européens (ECCO, UEGW). Ils présentent en outre l’avantage d’une administration par voie orale en une prise par jour et d’une efficacité rapide, en quelques jours. « Ils sont donc attendus avec impatience », note le Pr Fumery.
A côté des inhibiteurs de JAK, une autre famille de petites molécules est en développement : celle des modulateurs des récepteurs des S1P, qui agissent en séquestrant les lymphocytes dans les ganglions, ce qui limite leur migration vers le tube digestif. L’étrasimod et l’ozanimod, également administrés par voie orale en une prise quotidienne, font l’objet d’études cliniques. Un essai de phase 3 a donné des résultats très positifs avec l’ozanimod dans la RCH. Les résultats dans la MC sont attendus.
Des anticorps anti-P19
Une autre classe thérapeutique en développement est celle des anticorps anti-IL23 p19. Ils permettent une inhibition spécifique de l’IL23, à la différence de l’ustékinumab qui cible la sous-unité P40 commune à l’IL12 et l’IL23. Des essais face-face ont montré une supériorité des anti-IL23p19 par rapport à l'ustekinumab dans d’autres maladies inflammatoires, telles que le psoriasis. Trois molécules administrées par voie parentérale (risankizumab, guselkumab et mirikizumab) sont en cours d’évaluation dans la MC et la RCH, avec des premières données qui soulignent leur efficacité chez des patients naïfs ou en échec d’anti-TNF. Le risankizumab, déjà disponible dans le psoriasis, dispose désormais d’une autorisation temporaire d'utilisation nominative dans la MC en France.
Vers une chirurgie plus précoce
La chirurgie constitue une autre voie de progrès. Longtemps considérée comme une stratégie de recours après échec du traitement médical, elle pourrait avoir une place plus précoce chez certains patients. L’étude LIRIC a montré ses bénéfices sur la qualité de vie comparativement au traitement par anti-TNF, au cours de la MC iléale inflammatoire. De nouveaux essais sont attendus afin de mieux préciser la place de la chirurgie au cours de la MC versus anti-TNF.
Et la transplantation fécale ?
Enfin, la modulation du microbiote reste une piste thérapeutique importante. La transplantation fécale, uni- ou préférentiellement multidonneur, a montré son efficacité en induction dans la RCH. Des études ont rapporté récemment l’efficacité de la transplantation fécale sous forme de lyophilisat oral dans la RCH. Cela permettra d’améliorer l’acceptabilité de cette stratégie et donc probablement son efficacité à long terme.
D’après un entretien avec le Pr Mathurin Fumery (CHU Amiens).
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