Accès universel aux traitements de l'hépatite C : les associations perdent patience

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Publié le 03/10/2016
HEP C

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Crédit photo : PHANIE

Dans une lettre ouverte à la ministre des Affaires sociales et de la Santé Marisol Touraine, la fédération d'associations SOS Hépatite a manifesté son impatience face à la situation de « rationnement » des patients en attente des nouveaux traitements de l'hépatite C.

Le 23 janvier dernier, Marisol Touraine avait annoncé une ouverture de l'accès aux nouveaux traitements oraux de l'hépatite C à l'ensemble des patients atteints d'hépatite C chronique, quel que soit leur stade de fibrose. Depuis la mise sur le marché des nouveaux traitements (Sovaldi, Harvoni, Viekirax, Exviera, etc.), le ministère avait en effet fait le choix d'en restreindre l'accès aux stades de fibrose F4, F3 et F2 sévère. Un principe « en violation directe avec nos principes constitutionnels », déplore SOS Hépatite.

Un calendrier en retard

Depuis l'avis de la Haute Autorité de santé du 26 juin dernier, l'ensemble des patients F2 sont par ailleurs éligibles au traitement. Pour ce qui est des patients aux stades de fibroses moins avancés, SOS Hépatite regrettent le retard pris sur le calendrier annoncé par la ministre. « Vous avez affirmé publiquement avoir saisi la Haute Autorité de santé sur cette question pour le mois de septembre et déclaré la signature d’un arrêté dans la foulée, interpelle l'association. Nous sommes le 3 octobre et l’accès universel à ces nouveaux traitements n’est toujours pas à l’agenda de la Haute Autorité. »

Ce n'est pas la première fois que l'association SOS Hépatite manifeste son mécontentement. L'ouverture des traitements à l'ensemble des patients est également suspendue à la remise d'un rapport signé par le Pr Daniel Dhumeaux, déjà auteur d'un rapport en 2014 sur la prise en charge des personnes infectées par les virus de l’hépatite B ou de l’hépatite C. Là aussi le calendrier semble avoir pris du retard puisque ces recommandations étaient attendues pour le mois de septembre.

Un brevet contesté

Face à cette situation de restriction des traitements, Médecins du Monde a lancé une procédure juridique afin de contester la validité du brevet déposé par Gilead sur le Solvadi. Le recours déposé le 10 février dernier sera examiné par l’Office européen des brevets (OEB), au cours d’une audience publique, les 4 et 5 octobre. « Les pays riches connaissent désormais le même problème que les pays émergents, comme l’Inde ou le Brésil : l’arrivée sur le marché de nouveaux médicaments très efficaces, destinés à traiter un nombre important de patients, mais à un coût totalement déraisonnable », explique le Dr Françoise Sivignon, présidente de Médecins du Monde. La remise en cause des brevets a également déjà été utilisée au Sud par la société civile pour améliorer l’accès aux médicaments.

« C’est la première fois en Europe qu’une ONG médicale utilise ce recours », explique Médecins du Monde. MDM entend mettre ainsi l'accent sur la question plus large du coût des traitements et demande un débat public sur le mode de fixation du prix des médicaments et son impact sur le système de santé. « Si l’on ne pose pas la question du prix des médicaments, nous allons accentuer la mise en péril de notre système de santé solidaire », indique Yannick Le Bihan, directeur des opérations France.

MDM dénonce un « manque d’activité inventive », estimant notamment que si le Sofosbuvir représente « une avancée thérapeutique majeure », la structure chimique « de la molécule en elle-même dérive de l’association de composés déjà existants ». La décision est attendue dans les jours prochains. MDM espère qu'à la faveur de cette procédure soit instauré « un modèle alternatif au brevet pour financer l’innovation thérapeutique ».


Source : lequotidiendumedecin.fr