« MÊME S’IL ne s’agit pas d’un constat véritablement nouveau, il n’est quand même pas inutile de le rappeler : au cours des dernières années, en France comme ailleurs, on a assisté à une progression exponentielle de la prévalence du diabète avec, en conséquence, une augmentation importante des dépenses de remboursement pour l’assurance-maladie. Entre 2000 et 2009, la prévalence du diabète est passée de 2,6 à 4,4 % et le nombre de diabétiques de 1,6 à 2,9 millions. En 2007, les remboursements, pour les patients diabétiques, ont atteint 12,5 milliards d’euros alors qu’ils n’étaient que de 7 milliards en 2001. La progression a été de 80 % », explique le Pr Jacques Bringer, président de la SFD et chef du service de maladies métaboliques, diabétologie et endocrinologie du CHU de Montpellier.
Selon lui, le premier mérite du Livre Blanc, qui va être publié sous l’égide de la SFD, est d’abord de mettre en exergue cette évolution marquante de la prévalence et des coûts liés au diabète. « Surtout, ce Livre Blanc vise à concilier les objectifs de réduction de l’impact du diabète et de maîtrise des coûts. Et l’ouvrage fait clairement comprendre qu’on ne maîtrisera l’impact du diabète que par une stratégie de prévention très active, qui ne soit pas uniquement centrée sur le diabète mais aussi sur l’obésité, les pathologies cardiovasculaires, les déséquilibres alimentaires ou le cancer. Il est aujourd’hui essentiel d’avoir des messages similaires dans tous ces domaines ainsi qu’une forte stratégie sociétale et une médiatisation la plus large possible », souligne le Pr Bringer, en rappelant aussi la nécessité de faire une priorité de la prévention des formes sévères de diabète, qui sont évidemment une source importante de dépenses.
« Aujourd’hui, le diabète coûte, selon les patients, de 600 à 25 000 euros par an. Le coût moyen d’une prise en charge est de 5 500 euros. La somme de 600 euros correspond à la prise en charge d’un diabète débutant tandis que le coût de la prise en charge d’un diabète de type 2 traité par insuline (plus sévère) est de 10 000 euros par an en moyenne », indique le Pr Bringer.
L’essor attendu de la télémédecine.
Une autre priorité est une coordination des soins aussi large que possible. « Il est important de réunir tous les professionnels de santé autour du patient, partenaire actif de ses soins. En matière de diabète, le soin n’est pas uniquement la médecine du sucre. Il s’agit vraiment d’une action multi-professionnelle avec une délégation des tâches, notamment orientée vers l’éducation thérapeutique », indique le Pr Bringer, en soulignant aussi la nécessité de miser sur l’innovation au sens large du terme. « Un premier enjeu est le développement de la télémédecine. Avec la parution du décret le 19 octobre dernier, tous les outils sont pratiquement en place pour suivre les patients par la téléconsultation, la télésurveillance ou la téléassistance et assister les soignants par télé expertise. On attend juste le remboursement de ces actes de télémédecine par l’assurance-maladie. Il s’agit d’un outil parmi d’autres mais cela nous permettra d’améliorer la vigilance du suivi de certains diabétiques en prévenant des évolutions sévères, notamment dans les zones défavorisées sur le plan de la démographie médicale. La télémédecine, à condition qu’elle soit bien sûr bien utilisée, peut être un élément d’équité dans la prise en charge des patients sur l’ensemble du territoire », indique le Pr Bringer, en ajoutant que l’innovation concerne aussi d’autres domaines. « Il convient d’innover dans le domaine de la recherche bien sûr mais aussi au niveau de l’organisation et du financement à l’activité des soins, en favorisant une forfaitisation des soins autour du patient en remplacement du paiement à l’acte, inflationniste et guère adapté dans le cas d’une maladie chronique ».
Favoriser les soins ambulatoires.
Pour le Pr Bringer, il convient aussi de réfléchir à des alternatives à l’hospitalisation, « tout en maintenant bien sûr la qualité des soins et la qualité de vie des personnes ». Selon lui, il pourrait être opportun de s’inspirer de certaines avancées obtenues dans les pays nordiques. « La Finlande, par exemple, est un exemple intéressant sur les maladies respiratoires chroniques. Ce pays, en effet, a réussi le challenge de réduire de 70 % l’hospitalisation en moins de dix ans avec un impact favorable sur les indicateurs de santé (mortalité, morbidité) et une parfaite maîtrise des coûts. Cette évolution est intervenue alors qu’en Finlande, la prévalence des maladies respiratoires chroniques a progressé de 60 à 70 %. Mais dans le même temps, les coûts de santé n’ont pratiquement pas bougé. Ils ont même très légèrement diminué, de l’ordre de 2 à 3 % », explique le Pr Bringer, en ajoutant que « ce type d’initiatives devrait être médité en France. Notre système de santé a bien sûr des particularités qu’il n’est pas envisageable de bouleverser complètement du jour au lendemain. Mais ces expériences montrent quand même que la sortie de l’hospitalo-centrisme doit être favorisée chaque fois que le soin à domicile et en ambulatoire s’avèrent possibles avec un bénéfice en santé et une maîtrise des coûts ».
D’après un entretien avec le Pr le Pr Jacques Bringer, président de la Société francophone de diabétologie (SFD) et chef du service des maladies métaboliques, diabétologie et endocrinologie du CHU de Montpellier.
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