Prise en charge du diabète

Un système de soins primaires défaillant

Publié le 13/06/2012
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Crédit photo : S Toubon

MALGRÉ LES nombreuses initiatives, l’impact des politiques publiques sur la courbe de croissance de l’obésité et du surpoids n’a été que limité, regrettent les membres de la mission chargée d’évaluer la prise en charge du diabète au sein de l’IGAS*. Le diabète est devenu en 2010 la plus importante des affections de longue durée (ALD), touchant en France 2,9 millions de patients dont 92 % sont atteints de diabète de type 2. Son développement est rapide : sa prévalence a progressé de 2,6 % en 2000, à 3,95 % en 2007 et à 4,4 % en 2009. Or, rappellent les auteurs, la progression du diabète de type 2 est essentiellement la conséquence d’une autre épidémie, celle de l’obésité. La liaison forte entre ces deux épidémies explique des inégalités similaires de couverture territoriale (les plus touchés étant les départements d’outre-mer et les régions du nord et de l’est), de niveau socio-économique et de pays d’origine (en particulier chez les femmes de plus de 45 ans originaires du Maghreb).

Des problèmes structurels.

Les pouvoirs publics ont pourtant agi depuis 2001, à travers trois plans nationaux nutrition santé. Un plan de lutte contre l’obésité est venu les renforcer en 2010. Et, par rapport à d’autres pays de l’OCDE, la France paraît moins touchée par cette épidémie. Trois éléments incitent toutefois « à une vigilance accrue » : l’accroissement d’un important gradient social dans le développement de l’obésité ; l’augmentation de fréquence des formes les plus graves ; une apparition de plus en plus précoce de l’obésité de génération en génération. Les rapporteurs suggèrent d’investir sur une prévention « spécifiée », notamment sur les populations précaires ou étrangères. « La même difficulté de ciblage se note dans les actions de dépistage ». La surveillance et le traitement de la pathologie, pourtant très standardisés par des protocoles de bonnes pratiques « sont encore insatisfaisants », soulignent-ils en ajoutant que ces difficultés ne sont pas spécifiques au diabète mais concernent toutes les pathologies chroniques. « Elles tiennent à des problèmes structurels du système de soins de premier recours conçu pour faire face à des pathologies aiguës et qui peine à gérer de façon adaptée les maladies chroniques ». La formation des médecins à l’accompagnement des patients est insuffisante, la rémunération à l’acte ne permet pas de couvrir des prestations comme l’éducation thérapeutique, l’organisation entre les professions de santé est trop cloisonnée, le système n’est pas assez « pro-actif » (relance, alerte pour des examens ou des dépistages).

Le modèle des maisons pluriprofessionnelles.

Les réseaux de santé dédiés au diabète, mis en place au début des années 2000, « se sont avérés avoir une portée et une efficacité limitées, en raison notamment de leur externalisation par rapport aux médecins traitants ». Pour les rapporteurs, « l’adaptation des soins primaires aux maladies chroniques, qui est débutante, doit connaître une amplification, en particulier avec une plus grande coopération des professions de santé, notamment entre les médecins et les infirmiers », à l’image du modèle des maisons de santé pluriprofessionnelles. Par ailleurs, les programmes d’éducation thérapeutique, « temporaires et ponctuels », sont jugés « peu appropriés » à la prise en charge des patients diabétiques de type 2.

Les membres de la mission mettent en garde contre la dépense des nouveaux antidiabétiques oraux « dont le rapport coût/bénéfices de santé publique n’est pas satisfaisant alors même que la France est en Europe un des plus gros consommateurs de ces nouvelles classes ». Selon la mission, ces médicaments posent « des problèmes de qualité et de sécurité qui nécessitent, de la part des autorités sanitaires, une amélioration de leur surveillance après leur mise sur le marché », écrivent-ils. Le rapport évoque enfin les pistes d’amélioration de l’organisation du dépistage et des soins relatifs au diabète de type 1 chez l’enfant : l’information de la population et la formation des personnels médicaux à l’identification des premiers signes de la maladie ainsi que la concentration de l’offre hospitalière diabéto-pédiatrique.

* Danièle Jourdain-Menninger, Annick Morel et le Dr Gilles Lecoq

STÉPHANIE HASENDAHL

Source : Le Quotidien du Médecin: 9141