LE DÉPISTAGE néonatal systématique de l’hypothyroïdie congénitale fête ses 30 ans. « Nous disposons donc aujourd’hui d’un recul important pour évaluer le devenir des enfants dépistés à la naissance : 200 par an environ », remarque le Pr Juliane Léger. Le dépistage est réalisé au 3° jour de vie et le début du traitement est commencé dès le 10° jour. Lorsque le prélèvement sanguin met en évidence un taux de TSH sur le papier buvard du dépistage supérieur ou égal à 40 mUI/L, les parents sont immédiatement convoqués pour confirmer le diagnostic et rechercher une étiologie. Lorsque le résultat du taux de TSH du dépistage est à un niveau intermédiaire entre 15 et 39 mUI/L, un deuxième contrôle est réalisé. S’il reste positif, l’enfant est alors convoqué. Une scintigraphie thyroïdienne, éventuellement une échographie, est réalisée. Dans 80 % des cas, il s’agit d’une athyréose ou d’une thyroïde ectopique, dans 20 % la glande est en place avec ou non un goitre, il s’agit alors le plus souvent d’un trouble de l’hormonosynthèse.
Le traitement repose sur la thyroxine en soluté chez le nouveau né ; la dose d’attaque est de 10 à 12 microgrammes par jour en une seule prise le matin à jeun (1 goutte = 5 microgrammes). Vers l’âge de 6 mois, on passe au Lévothyrox, la dose est alors adaptée aux besoins en s’appuyant sur les taux sanguins d’hormones thyroïdiennes.
« La mise en route précoce du traitement évite les risques liés à l’hypothyroïdie, la croissance de ces enfants est normale, ainsi que leur développement intellectuel, note le Pr Léger. Il convient néanmoins de rechercher quelques petites anomalies, en particulier des troubles de l’attention et de la coordination qui touchent environ 10 % des enfants atteints de formes sévères. Le dépistage de ces troubles permet de mettre en uvre des stratégies éducatives appropriées ».
« Nous étudions actuellement une cohorte d’enfants devenus adultes, ce qui va nous permettre d’évaluer leur devenir à long terme : état de santé, qualité de vie, fertilité, déroulement et issue des grossesses », explique le Pr Léger. Au sein des 1 800 sujets suivis, 300 femmes ont eu une grossesse. « Il est crucial pour ces femmes de maintenir un taux d’hormones thyroïdiennes normal ; toute hypothyroïdie maternelle est délétère pour le développement cérébral du ftus. Les besoins en thyroxine augmentent dès le début de la grossesse de l’ordre de 20 à 30 %, il est donc fondamental d’adapter le traitement et de surveiller l’évolution de la fonction thyroïdienne tout au long de la grossesse », insiste le Pr Léger.
Goitres et nodules
En dehors de la carence iodée dans certaines régions du monde, la cause la plus fréquente de goitre chez l’enfant est la thyroïdite d’Hashimoto. Dans 80 % des cas, il n’y a pas de déficit thyroïdien, dans 20 % des cas le goitre est associé à une hypothyroïdie qui nécessite un traitement. L’étiopathogénie de la maladie est mal connue, s’y associent sans doute des facteurs génétiques et environnementaux. Des antécédents familiaux sont mis en évidence dans environ 20 % des cas. Le diagnostic repose sur la présence d’anticorps antithyroïdiens et sur des aspects spécifiques à l’échographie.
Face à un nodule, on craint toujours un cancer. L’incidence est de 1er janvier million chez l’enfant prépubère, de 10 janvier million en cours de puberté. Les antécédents d’irradiation externe augmentent le risque de nodule malin. " Par conséquent, il faut être très vigilant vis-à-vis des sujets qui ont été traités dans l’enfance pour un cancer (exemple de la greffe de moelle précède d’une irradiation totale), en sachant que la période de latence est de 5 à 10 ans en général", précise le Pr Léger. Le diagnostic, comme chez l’adulte, repose sur la cytoponction.
Maladie de Basedow
La maladie de Basedow est rare chez l’enfant, mais elle peut survenir à tout âge, avec néanmoins un pic à l’adolescence. Le diagnostic est aisément évoqué devant un goitre, une tachycardie et des signes oculaires. S’y ajoute, chez l’enfant, une accélération de la croissance, une diminution des performances scolaires, liée notamment à une asthénie, et une agitation psychomotrice. Le traitement repose sur les antithyroïdiens de synthèse. Chez l’enfant, un traitement d’attaque prolongé est préconisé. Plusieurs études, dont une française publiée récemment (1), ont mis en évidence les facteurs pronostiques de la maladie. Outre la sévérité biologique au moment du diagnostic (taux d’hormones thyroïdiennes et d’anticorps anti-TSH élevés) et le jeune âge, la durée du traitement a un impact sur le taux de rémission. Après une première cure de 2 ans, ce taux n’est que de 30 % chez l’enfant, contre 50 % chez l’adulte. C’est pourquoi on conseille actuellement une première cure prolongée d’environ 4 ans. En l’absence de rémission, une deuxième cure est préconisée. En cas d’échec, un traitement par iode radioactif, si possible après la puberté, est proposé. Il impose ensuite une hormonothérapie thyroïdienne substitutive.
D’après un entretien avec le Pr Juliane Léger, Centre de référence des Maladies Endocriniennes de la Croissance, Hôpital Robert Debré, Paris.
(1) F. Kaguelidou et coll. J Clin Endocrinol Metab 2 008 ; 93 : 3 817-26
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