LE Pr GUILLAUSSSEAU rappelle les principaux enseignements des premiers essais d’intervention : la célèbre UKPDS ayant montré que l’amélioration du contrôle glycémique (HbA1c à 7 % au lieu de 7,9 %) réduisait significativement la morbi-mortalité liée au diabète (-12 %, p = 0,030) et le risque de microangiopathie (-25 %, p = 0,010) alors que pour l’infarctus du myocarde la diminution ne faisait que frôler la significativité (-16 %, p = 0,052).
Alors qu’UKPDS portait sur prés de 4 000 récemment diagnostiqués ; STENO2 portait sur 160 diabétiques micro-albuminiriques qui bénéficiaient d’une intervention agressive sur l’ensemble des facteurs de risque, on constate que cette démarche globale diminue de 50 % les complications micro- et macrovasculaires.
De ces essais on peut donc retenir qu’à court les effets d’un contrôle glycémique intensif est plus net sur la micro-angiopathie que sur la macro-angiopathie et que pour cette dernière un bénéfice ne peut se concevoir que dans une approche globale corrigeant l’ensemble des facteurs de risques.
Les grandes études
Mais les débats sur la protection vasculaire et rénale ont été relancés par les résultats discordants de trois grandes études (ADVANCE, ACCORD et VADT) ainsi que par les résultats à long terme d’UKPDS.
Quand on compare ADVANCE, ACCORD et VADT plusieurs différences notables apparaissent qu’il s’agisse des caractéristiques des patients à l’inclusion ou, surtout, des stratégies thérapeutiques. Les patients d’ADVANCE, s’ils sont plus âgés (66 ans contre 62 et 60 ans), sont mieux contrôlés à l’inclusion (HbA1c à 7,5 % contre 8,2 et 9,4 %) et leur poids est inférieur (IMC à 28 kg/m2 contre 32,2 et 31,3 kg/m2). La principale différence concerne la stratégie thérapeutique adoptée. Dans ADVANCE la démarche est progressive, en commençant par le gliclazide dont on augmente les posologies, avant d’ajouter d’autres antidiabétiques : ainsi à la fin de l’essai le recours aux glitazones (17 %) et à l’insuline (40 %) reste largement minoritaire. Il en va tout autrement dans ACCORD et VADT ou à 85 à 91 % des patients sont sous glitazones et 70 à 77 % sous insuline.
Le résultat est que si le taux d’HbA1c atteint est comparable dans les trois études (6,5 à 6,9 %), l’essentiel de la diminution est obtenu au cours de la première année chez les patients des études ACCORD et VADT, la correction n’est maximale qu’après trois ans, dans l’étude ADVANCE.
Surtout, ADVANCE est la seule étude mettant en évidence un gain significatif sur le critère principal associant événements micro et macro-vasculaires majeurs (RR = 0,90, IC = 0,82-0,98, p = 0,01). Puis l’étude ACCORD a dû être interrompue pour augmentation des décès cardio-vasculaires (RR = 1,35, p = 0,002). Pour le Pr Guillausseau cette différence est très certainement liée à l’agressivité du schéma thérapeutique dans ACCORD, comme en atteste la fréquence des hypoglycémies sévères (16,2 % soit 4/100 années-patients) contre seulement 2,7 % (0,7/100 années-patients dans ADVANCE. A noter aussi, que les patients d’ACCORD prennent, en moyenne, 3,5 kg alors que, dans ADVANCE, le poids reste stable. « Cette différence justifie un contrôle intensif mais progressif, surtout chez des patients fragiles, en ayant le soucis d’éviter, au maximum, les hypoglycémies et la prise de poids.
La réalité de la néphroprotection
L’étude ADVANCE rappelle aussi le bénéfice rénal d’un contrôle intensif de la glycémie, la diminution des événements micro-vasculaires (-14 %, p = 0,014) étant due essentiellement à une diminution de 21 % (p = 0,006) des apparitions ou aggravations des néphropathies. Diminution significative, aussi, du nombre des apparitions des micro-albuminuries (-1 %, p = 0,018) et de macro-albuminuries (-30 %, p = 0,01).
Le concept de mémoire glycémique
En ce qui concerne les événements macro-vasculaires majeurs, ADVANCE met en évidence une tendance favorable mais non significative (p = 0,32). De plus, la tendance positive n’apparaît que lors de la dernière année de l’étude. Comment ne pas rapprocher cette donnée des résultats observés dans STENO2 et surtout dans le suivi à long terme d’UKPDS alors même que le contrôle glycémique devient équivalent (et amélioré) dans les deux bras de l’étude, la réduction du nombre d’infarctus (-15 %, p = 0,014) devient significative dans le groupe d’intervention alors qu’il ne l’était pas au terme de l’essai. Tout se passe donc comme si le gain macrovasculaire d’un contrôle intensif de la glycémie ne se manifeste qu’à plus long terme, d’où le concept de mémoire glycémique, (en soulignant que cela doit s’intégrer à une prise en charge globale des facteurs de cardio-vasculaires). Le suivi à long terme des patients d’ADVANCE devrait valider ce concept de mémoire glycémique.
L’apport des grands essais cliniques en médecine générale
La plupart des généralistes présents connaissaient les grandes lignes de ces essais et ils y adhèrent d’autant mieux que ces résultats valident leur pratique : démarche progressive (« le contrôle glycémique n’est pas une urgence »), en évitant au maximum les hypoglycémies et la prise de poids. Une approche d’autant plus prudente et progressive que le patient est âgé et/ou fragile.
(1) Réunion organisée avec le soutien institutionnel des laboratoires Servier.
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