LA CNAM-TS dispose aujourd’hui de très nombreuses données qui permettent enfin de mettre la France au niveau des autres pays développés en ce qui concerne le suivi des pratiques, dont celles portant sur la chirurgie bariatrique des obésités sévères (lire aussi page 4). L’étude présentée au congrès dresse les caractéristiques des 30 442 patients opérés en 2 011 en s’appuyant sur les données du PMSI en France métropolitaine et Outre-Mer et sur le SNIIRAM. À noter : les données des ballons et des stimulateurs intra-gastriques avec sonde pariétale n’ont pas été pris en compte.
Explosion des sleeves.
Première surprise quant à la progression spectaculaire du nombre de gestes réalisés, puisqu’ils ont plus que doublé en cinq ans, passant de 15 000 gestes tous confondus en 2006 à 30 513 actes en 2 011 (+ 16 % par an). Ce qui frappe le plus est la véritable explosion des opérations dites de « sleeve gastrectomie », qui consistent à réséquer la grande courbure de l’estomac : passant de quelques centaines réalisés en 2006 à près de 15 000 en 2 011 et, gageons, bien plus encore en 2012 et 2013. C’est de loin la technique la plus employée aujourd’hui en France. Dans le même temps, on assiste à une nette diminution de la pose d’anneaux gastriques ajustables (plus de 10 000 à moins de 7 500) et une progression constante des by-pass, rarement pratiqués en 2006, et qui concernaient en 2 011 près de 10 000 patients.
Les deux techniques dites irréversibles, sleeve et by-pass, représentent donc 75 % des gestes. Et plus l’IMC est élevé et plus le recours à ces techniques est fréquent.
Profil des patients.
Les patients sont pour 83 % des femmes, âgées en moyenne de 39 ans. Sur l’ensemble, 16 % étaient bénéficiaires de la CMU. Les IMC sont de 40 kg/m2 ou plus pour 70 % des femmes et 77 % des hommes ; pour plus de 60 %, entre 40 et 49 kg/m2 : il s’agit bien ici d’obésités morbides. Parmi l’ensemble, environ 20 % des opérés sont âgés de moins 30 ans, dont 700 avaient en 2 011 moins de 20 ans (80 % de jeunes femmes). Il y avait 114 mineurs.
Les comorbidités étaient, par ordre, l’hypertension artérielle (25 %), l’apnée du sommeil (12 %), l’asthme ou la BPCO (12 %), l’hypercholestérolémie (12 %) ou le diabète (11 %).
Disparités régionales.
Le taux d’intervention est jusqu’à trois fois plus élevé dans certaines régions métropolitaines, sans corrélation avec la prévalence de l’obésité. Les taux les plus élevés concernent le sud de la France, le Centre-Est et le Nord. Le type de chirurgie proposé varie selon les régions, ce qui pose la question du choix proposé au patient. Dans la région Rhône-Alpes, 58 % sont des anneaux ajustables – deux fois plus que la moyenne nationale – alors qu’en Bretagne 68 % sont représentés par des by-pass. Un tel constat pose le problème de la pertinence des indications posées !
Le nombre de geste varie grandement entre les établissements : 33 établissements sur 426 réalisent 35 % des gestes. Trente-deux réalisent plus de 200 gestes par an (11 000 actes), quand 175 en réalisent moins de 30 par an (1 718 actes).
À l’avenir, l’Assurance-maladie se propose de mieux faire connaître les recommandations actuelles, actualiser les référentiels de bonne pratique concernant les indications chirurgicales, favoriser la labellisation des centres prenant en charge la chirurgie bariatrique des jeunes patients et mettre en place une cohorte de suivi de ces patients jeunes et adultes. Les ARS ont déjà mis en place en 2 012 d’une part des centres spécialisés dans cette chirurgie, ayant mission de la pratiquer selon les principes de la HAS, et d’autre part une organisation des soins des obèses en région.
Face à l’envol spectaculaire de cette chirurgie, il est certainement temps d’y mettre bon ordre et rigueur, tant pour les indications que la prise en charge pré- et postopératoire de ces patients – une prise en charge technique et humaine très spécialisée, indispensable et pourtant parfois négligée au-delà du geste pratiqué. Il s’agit donc un grand chantier pour l’Assurance-maladie comme pour les praticiens.
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