Quel traitement proposer en cas de récidive du cancer de la prostate localisé après prostatectomie radicale ? Le groupe américain RTOG (Radiation Therapy Oncology Group en anglais) apporte un éclairage avec un suivi médian de plus de 13 ans.
L'association d'une hormonothérapie longue à la radiothérapie externe sur la loge prostatique améliore significativement la survie globale par rapport à la radiothérapie externe seule, conclut cette étude randomisée versus placebo chez 760 patients.
Près de la moitié des patients opérés d'un cancer de prostate localisé présentent une récidive après la chirurgie. Certains n'obtiennent jamais de réponse complète après la chirurgie, la maladie persiste avec des PSA toujours détectables. « Cela représente une petite sous-population des patients opérés, environ 1 à 2 %, explique le Pr Alexandre de la Taille, urologue au CHU Mondor et membre de l'Associaiton française des urologues (AFU). C'est un facteur aujourd'hui bien identifié d'agressivité car cela signe la présence de micrométastases ».
L'étude française GETUG de l'AFU
Pour les autres, la rechute est constatée en général 1 à 2 ans en post-opératoire sur des PSA qui remontent à 0,2-2 voire 4 ng/mL. Plusieurs options thérapeutiques dans le cancer opéré en rechute biologique existent aujourd'hui : radiothérapie externe seule, hormonothérapie ou l'association des deux. « Chez les patients opérés ayant une maladie résiduelle, il est recommandé d'emblée d'administrer une hormonothérapie, explique le Pr de la Taille. Chez la majorité ayant une récidive à distance, c'est la radiothérapie externe à laquelle il est déjà recommandé d'associer une hormonothérapie en fonction de certains facteurs de mauvais pronostic, de l'âge et du souhait du patient ».
L'étude américaine, lancée en 1998 avec l'anti-androgène peu classique et moins utilisé aujourd'hui, le bicalutamide (150 mg/jour pendant 24 mois), va dans le même sens que les résultats à 5 ans d'une étude française plus récente, l'étude GETUG/AFU 16, lancée en 2006, avec une hormonothérapie plus consensuelle, - la goséréline, un analogue de la LH-RH -, et plus courte (une injection/3 mois pendant 6 mois).
Le suivi remarquablement long avec des résultats sur la mortalité à long terme vaut à l'étude RTOG d'être publiée dans le « New England Journal of Medicine ». « L'étude GETUG/AFU 16, au suivi plus court, a constaté des bénéfices sur l'absence de progression clinique et biologique, pas encore sur la mortalité à long terme », explique le Dr Christian Carrie, radiothérapeuthe au centre Léon Bérard à Lyon et coordinateur principal de l'étude GETUG/AFU 16.
Dans l'étude RTOG dirigée par le Pr William Shipley (Massachusetts General Hospital), la mortalité à 12 ans était de 5,8 % dans le groupe bicalutamide par rapport à 13,4 % dans le groupe placebo. De même, la survenue de cancer métastatique à 12 ans est passée à 14,5 % dans le groupe hormonothérapie par rapport à 23,0 % dans le groupe placebo. Les auteurs ont calculé qu'il faut traiter 20 patients pour sauver une vie. La toxicité était comparable dans les deux groupes, hormis pour la gynécomastie (70 % versus 10,9 % dans le groupe placebo).
Un critère déterminant
Mais la durée du suivi et l'hormonothérapie testée sont loin d'être les seuls points qui différencient les deux études. Un critère déterminant les distingue. « Les populations étudiées ne sont pas les mêmes, les protocoles sont très différents, souligne Christian Carrie. Dans GETUG/AFU 16, il s'agissait de patients de meilleur pronostic, avec un PSA indétectable après la chirurgie ». À l'inverse, dans l'étude RTOG, les patients présentaient un PSA entre 0,2 et 4 ng/ml au moins 8 semaines après la chirurgie.
Pour le Pr Alexandre de la Taille, l'étude RTOG n'est pas un mélange hétéroclite de deux populations à niveau de risque différent : « Les patients inclus dans RTOG avaient tous une maladie résiduelle, c'est une toute petite partie des patients. Aujourd'hui, ces patients sont traités d'emblée par hormonothérapie, ce qui n'était pas encore connu à l'époque, précise-t-il. Dans cette population, il aurait été aujourd'hui plus informatif de comparer hormonothérapie seule et hormonothérapie avec radiothérapie ».
Ce que l'on peut dire, c'est que l'intérêt de l'hormonothérapie dans le cancer de la prostate en rechute biologique est confirmé quel que soit le niveau de risque. « Dans un éditorial attaché à notre étude GETUG, le Pr Anthony D'Amico, urologue à Harvard, faisait l'hypothèse suivante, explique le Dr Carrie. Les patients de moins bon pronostic devraient être traités par radiothérapie et hormonothérapie longue, ceux de meilleur pronostic par radiothérapie et hormonothérapie courte ». L'étude RADICALS, en cours en Europe et au Canada, devrait apporter de nouveaux éléments concernant la place de la radiothérapie, soit adjuvante en postopératoire immédiat ou en rattapage lors de l'ascension des PSA chez les patients à risque élevé, fait remarquer dans un éditorial de l'étude RTOG, le Pr Ian Thompson, du Christus Oncology Research Council à San Antonio.
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