LES RÉSULTATS obtenus par les Américains lors du traitement de souris diabétiques non-obèses (NOD) par la leptine, seule ou associée à de faibles doses d’insuline, pourraient inaugurer une ère nouvelle depuis la découverte de l’insuline en 1922. L’insulinothérapie, dont l’apport dans le traitement du DID (de type 1) est incontestable, a cependant des effets lipogéniques qui favorisent l’instabilité glycémique par le biais d’une résistance à l’insuline liée à la promotion du métabolisme des acides gras (AG). L’hyperinsulinémie, à long terme, induit par ailleurs une hypercholestérolémie à laquelle on rattache l’incidence élevée de maladies coronariennes à long terme chez les patients diabétiques.
Des souris NOD (n = 15) avec des chiffres d’hyperglycémie allant de 220 à 572 mg/dl ont été traitées au moyen de l’implantation d’une pompe osmotique d’Alzet contenant 3,3 mg de leptine (20 µg/h ; administration sur 12 jours). La glycémie a été réduite chez l’ensemble des animaux traités jusqu’à 88 mg/dl en moyenne (contre 160 mg/dl, en moyenne, chez les souris traitées par l’insuline), avec une disparition de la cétonurie chez les rongeurs traités par la leptine ou l’insuline et une normalisation de l’hémoglobine A1c (à environ 3,4 %). Le délai de normalisation de la glycémie après traitement par la leptine allait de 1 j à 7-9 j (diabètes graves). Il est bon d’ajouter que la leptine permet d’abaisser les taux plasmatiques d’AG libres deux fois plus (0,25 mM en 12 j, p < 0,03) que l’insuline (0,54 mM).
La perte de poids observée avec la leptine (opposée à un gain pondéral sous insulinothérapie) concerne uniquement le secteur des lipides, sans affecter les métabolismes protéique et glucidique. D’autres anomalies lipidiques associées à l’insulinothérapie (triacylglycérols plasmatiques et hépatiques) sont également corrigées lors du traitement par la leptine.
Une action anti-lipogénique.
Les Américains précisent le mécanisme de l’action anti-lipogénique de la leptine en montrant que l’expression d’un facteur de transcription lipogénique, la protéine SREBP-1c, comme celle de deux enzymes lipogéniques (FAS et GPAT), est significativement diminuée chez les rongeurs traités par la leptine, par comparaison avec le groupe contrôle et avec les animaux traités par insuline. En outre, l’expression de deux facteurs de transcription hépatiques impliqués dans l’homéostasie du cholestérol (SREBP1a et SREBP2) et celle de la réductase HMG CoA (une enzyme dont l’activité est diminuée par les médicaments de la famille des statines), est significativement abaissée par le traitement par la leptine, par rapport à l’insulinothérapie. L’action de la leptine s’exerce aussi au travers d’une augmentation de l’oxydation des AG, de rôle déterminant dans l’insulinorésistance. Les auteurs expliquent, par ailleurs, l’activité antidiabétique de la leptine par une inhibition puissante du glucagon, mais il reste à déterminer si cet effet s’exerce au niveau des cellules alpha du pancréas (comme l’insuline) ou à l’étage hypothalamique.
Il est également intéressant de noter que la mesure moyenne (SEM) de la glycémie sur vingt jours, qui renseigne sur la labilité glycémique, est bien moindre lors d’un traitement associant leptine et insuline (47 mg/dl) que lors d’une monothérapie par l’insuline (229 mg/dl), ce qui suggère que l’association de la leptine au traitement des souris diabétiques a un avantage supplémentaire important, celui de réduire la variabilité de la glycémie.
Les retombées cliniques potentielles de ces travaux apparaissent extrêmement prometteuses, en termes de qualité de vie (réduction de la labilité glycémique) comme d’espérance de vie puisque le risque athéromateux et les complications lipotoxiques rattachés à l’insulinothérapie pourraient être largement minorés grâce à l’action hypolipémiante de la leptine. La place de la leptine, jusqu’ici limitée aux lipodystrophies généralisées, pourrait ainsi être étendue au traitement des formes communes de diabète de type I.
› Dr BERNARD GOLFIER
M-y Wang, Y Lee, L Chen, GO Clark, RD Stevens, OR Ilkayeva, BR Wenner, JR Bain, M Charron, CB Newgard, RH Unger. Leptin monotherapy in insulin-deficient type I diabetes. Proc Natl Acad Sci USA (2010) Publié en ligne.
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