De pronostic particulièrement défavorable, les cancers du pancréas sont vraisemblablement diagnostiqués trop tardivement, alors que leur expression clinique empêche de leur opposer une thérapeutique efficace. Seule une infime minorité est détectée à un stade encore curable.
En Europe, environ 104 000 nouveaux cas ont été diagnostiqués en 2012 et approximativement le même nombre de personnes en est décédés. Au niveau mondial la même année, on a estimé à 338 000 cas de cancers du pancréas diagnostiqués et 330 000 personnes en sont mortes.
Lors d’un récent congrès, les membres de l’Association européenne du cancer (ECCC) ont insisté sur la nécessité de disposer de marqueurs permettant un dépistage plus précoce, suffisamment pour laisser entrevoir un changement net du pronostic.
Des signes d’appel qui devraient être connus de tous
Il a aussi été souligné, comme les diabétologues le savent bien, qu’un diabète de présentation très récente et un peu atypique (aucun antécédent familial de diabète, pas de syndrome métabolique, IMC faible, parfois mauvais état général d’emblée, etc.), ou la détérioration rapide d’un diabète de type 2, sont des signes d’appel qui doivent être connus de tous.
L’équipe de l'institut international de recherche sur la prévention à Lyon, a rapporté une analyse sur près d'un million de patients atteints de diabètes étiquetés « type 2 », en Lombardie (n = 456 311) et en Belgique (n = 368 377) pour lesquels la recherche de cas de cancers pancréatiques a été réalisée (n = 885 et 1 872 respectivement) sur une période donnée. Elle montrait que, dans 50 % des cas, le cancer a été diagnostiqué dans l'année suivant le diagnostic de diabète et/ou la première prescription d’antidiabétiques réalisée.
En Belgique, 25 % des cas ont été diagnostiqués dans les 3 mois suivant le diagnostic de diabète et en Lombardie 18 %. Après la première année, la proportion de cancers pancréatiques diagnostiqués a chuté de façon spectaculaire.
Les chercheurs avaient aussi constaté que ces patients avaient 3,5 fois plus de risque d'être diagnostiqués comme ayant un cancer du pancréas dans les 3 premiers mois suivant leur première prescription d'incrétines (aGLP1) que chez ceux ayant pu continuer à prendre des antidiabétiques oraux. Ce surrisque est retombé à 1,7 après la première année.
Un facteur de détérioration rapide
De plus, le cancer du pancréas peut aussi constituer un facteur de détérioration rapide et peu compréhensible d’un diabète de type 2. D’ailleurs, le fait d’avoir besoin de renforcer le traitement a pu faire croire à un effet cancérogène des incrétines, alors qu’en réalité il avait seulement été nécessaire de renforcer la thérapeutique de l’hyperglycémie. Il s’agit bien d’une relation de causalité inversée et aujourd’hui les incrétines sont pratiquement totalement innocentées.
Plusieurs arguments montrent aussi que le diabète associé au cancer du pancréas est paranéoplasique, et non secondaire à l’invasion tumorale du parenchyme pancréatique ; la fréquence du diabète est la même, quelle que soit la taille tumorale. L’amélioration du profil glycémique après résection tumorale, via une diminution de l’insulinorésistance, renforce cette idée.
Les mécanismes physiopathologiques impliqués sont, d’une part, une dysfonction de la cellule béta, secondaire à la sécrétion par les cellules cancéreuses de médiateurs paranéoplasiques comme l’adrénomédulline, et d’autre part l’existence d’une insulinorésistance des tissus périphériques.
Mieux comprendre la physiopathologie pour identifier des marqueurs précoces
En somme, un diabète peut cacher un autre diagnostic, et d’ailleurs, même ce groupe très respectable de cancérologues nous semble aussi tomber dans le travers, consistant à qualifier ces diabètes de l’adulte comme de type 2, alors qu’ils n’en sont pas.
Ce groupe attire notre attention sur ce signe d’appel de cancer pancréatique, mais reconnaît cependant que celui-ci est trop tardif pour changer le pronostic. Des marqueurs sanguins très précoces sont nécessaires. Peut-être même, certaines des substances sécrétées par les tumeurs – qui commencent à être identifiées – qui expliquent pourquoi ces diabètes apparaissent et pourquoi l’hyperglycémie disparaît dès la résection de la tumeur réalisée ?
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