Par le Dr Nelly Wion-Barbot*
IL Y A DEUX SOURCES de vitamine D dont la principale provient de l’exposition au soleil. Sous l’action des rayons UVB, la peau peut en effet synthétiser la vitamine D3, mais cela n’est possible que durant les mois de bon ensoleillement et en l’absence de vêtement couvrant ou de crème solaire. De plus, cette synthèse est plus faible chez les sujets à peau foncée et chez les personnes âgées et elle varie en fonction du sexe et selon la saison. Chez les obèses, le stockage de la vitamine D lipophylique dans le tissu adipeux est majoré, diminuant les taux circulants. Les sources alimentaires sont rares car la vitamine D3 est essentiellement présente dans les poissons gras et dans les huiles de foie de poisson, tandis que la vitamine D2 est d’origine végétale, principalement trouvée dans les champignons.
La vitamine D est transportée jusqu’au foie où elle est transformée en 25 hydroxyvitamine D (25OH-vitD) qui circule ensuite dans le sang et pourra être dosée. Cette 25OH-vitD est transformée dans les reins par une enzyme, la 1-alpha-hydroxylase, en 1-25 hydroxyvitamine D, forme active de l’hormone qui passe dans le sang circulant afin d’atteindre les tissus cibles où sa liaison au récepteur spécifique VDR va lui permettre d’agir sur un grand nombre de tissus. La 1-alpha-hydroxylase est aussi présente dans de nombreuses cellules de l’organisme permettant une conversion in situ de la 25OH-vitD en 1-25OH-vitD.
Le taux de 25OH-vitamine D circulante est un reflet fidèle de l’imprégnation vitaminique D et les valeurs de référence sont établies à partir de nombreuses études cliniques et d’essais thérapeutiques. Les seuils recommandés sont ainsi établis selon les études en fonction d’un critère clinique (seuil pour le risque de fracture ou le risque de chute…) ou d’un critère biologique (seuil de la réaction parathyroïdienne, seuil de l’absorption intestinale du calcium). Aucun consensus n’est parfaitement reconnu à l’heure actuelle, mais un certain nombre d’experts proposent un seuil ‹ 20 ng/ml pour le déficit en vitamine D et situé entre 20 et 30 ng/ml pour l’insuffisance (Endocrine Society).
Il faut souligner que ces seuils ont été définis avec le dosage RIA Diasorin et la question reste posée de leur transposition avec d’autres méthodes de dosage.
Qui doit-on traiter et comment ?
Il convient de traiter tous les patients qui en ont besoin : ostéoporotiques ou susceptibles de le devenir (corticothérapie, malabsorption, bypass…), insuffisants rénaux, patients carencés en vitamine D avec hyperparathyroïdie primaire. Le débat persiste sur la forme de vitamine à utiliser pour traiter, D2 ou D3, mais la compliance oriente le choix vers la D3 en ampoule de 100 000 UI en traitement d’attaque. À titre indicatif : quatre prises de 100 000 UI espacées de quinze jours en cas de carence (taux ‹ 20 ng/ml) ; deux prises de 100 000 UI espacées de quinze jours si insuffisance (de 20 à 30 ng/ml), avant traitement d’entretien. Le risque toxique, c’est-à-dire l’hypercalcémie, est absent aux posologies recommandées.
La question du dosage du taux de 25OH-vitD avant traitement reste débattue et certains proposent de traiter systématiquement les patients au-delà de 60 ans ayant une pathologie inflammatoire ainsi que les obèses, sans dosage préalable, mais avec dosage ultérieur à trois mois. De même, une supplémentation dès le début de la grossesse doit être mise en place. Il convient pour tous les patients de vérifier que les apports en calcium sont suffisants.
Interactions entre vitamine D et diabète.
Dans les modèles animaux, la carence en vitamine D entraîne une carence en insuline et une majoration de l’insulinorésistance. Plusieurs études d’observation ont mis en évidence la majoration du risque de diabète type 2 chez les patients déficitaires en vitamine D, mais, les études d’intervention n’ont pu formellement démontrer le lien de causalité.
Par ailleurs, un lien génétique est établi entre le risque de diabète type 1 et certains polymorphismes de gènes prédisposant à la baisse de la vitamine D dans les cellules. Mais le rôle principal de la vitamine D se situe au niveau de l’immunomodulation. L’apoptose des cellules bêta, induite par les cytokines inflammatoires, est partiellement bloquée par la 1-25-OHvitD, synthétisée dans les cellules immunitaires, qui possèdent une 1-alpha-hydroxylase. D’autre part, la vitamine D renforce les défenses des macrophages qui ainsi « bougent plus, mangent plus et tuent plus » de bactéries. Sur le plan épidémiologique, l’augmentation du risque de diabète type 1 a été décrite chez les enfants finnois carencés en vitamine D pendant la première année de vie, mais les essais d’intervention dans d’autres populations sont moins probants. Les études animales sont très nombreuses : de la souris NOD carencée en vitamine D dont le risque de diabète est multiplié par 2, au traitement par forte dose de vitamine D chez la souris qui prévient la survenue du diabète. Cependant, si le traitement est réalisé après destruction des cellules bêta chez la souris, aucun effet n’est observé. Les études cliniques manquent car souvent difficiles à réaliser. Un projet canadien est en attente de financement pour étudier l’impact d’un traitement par la vitamine D chez les enfants avec groupage HLA à risque de diabète type 1, car si le terrain génétique est propice au diabète type 1, il convient d’éviter toute carence précoce en vitamine D. Un travail d’immunothérapie avec traitement in vitro par la vitamine D des cellules immunocompétentes suivi d’une réimplantation est en cours, coordonné par C. Mathieu, dans le cadre d’un projet FP7 européen.
*CHU de Grenoble.
Liens d’intérêts : aucun
D’après l’atelier « Vitamine D et diabète ».
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