Par le Pr Serge Halimi*
LES ÉTUDES épidémiologiques ont montré qu’une augmentation de 0,01 g/l du taux de HDL-c est associée à une baisse de 3 % du risque coronaire. On sait aujourd’hui que 76 % (étude PRIME en France) à 90 % des cas de maladie coronaire aiguë (étude INTERHEART) sont expliqués par la présence d’au moins un facteur de risque (tabagisme, HTA, taux élevé de LDL-c, de triglycérides, bas de HDL-c, diabète). Si l’on veut contrôler l’ensemble du RCV, il faut donc prendre en considération et traiter ces facteurs de risque coronaire reconnus. La deuxième conséquence pratique de l’existence d’une hypoHDLémie est la modification du seuil d’intervention thérapeutique pour le LDL-c. En effet, les recommandations françaises actualisées en 2005 préconisent de choisir ce seuil en fonction des autres facteurs de risque. Si le taux de HDL-c est inférieur à 0,40 g/l, le seuil d’intervention pour le LDL-c diminue de 0,30 g/l. Par ailleurs, nombre de nos connaissances en matière de lipoprotéines sont remises en cause par des travaux récents montrant que 80 % du cholestérol produit par le foie irait vers les HDL et non les VLDL, mettant en exergue le rôle pivot d’une enzyme, la CETP, qui permet ensuite le transfert du cholestérol des HDL vers les LDL. Cette découverte surprenante permet de mieux comprendre le rôle clé de cette enzyme et de son blocage qui constitue la base de nouvelles voies thérapeutiques pouvant accroître le taux de HDL-c. Par ailleurs, la fonctionnalité des différentes sous-fractions du HDL-c est déterminante. Ainsi, la capacité d’efflux joue un rôle majeur de même que les effets favorables sur la fonction endothéliale par des capacités antioxydantes, anti-inflammatoires, antithrombotiques et anti-infectieuses. Les statines, certains modes alimentaires et l’exercice physique sont ainsi capables d’améliorer ces fonctionnalités sans nécessairement modifier les taux. Un nouveau concept est de ce fait apparu, celui de la dysfonctionnalité des HDL-c. Dans le diabète de type 2 et le syndrome métabolique et à un moindre degré lors des syndromes inflammatoire et infectieux, il est classique d’observer la présence de petites particules HDL3 dont les propriétés antiathérogènes sont altérées. Des actions pharmacologiques visant à augmenter le taux d’HDL-c peuvent donc avoir des effets différents vis-à-vis du RCV en fonction des moyens utilisés et des conséquences sur la fonctionnalité des HDL.
Fibrates et acide nicotinique.
On dispose aujourd’hui de deux classes médicamenteuses (fibrates - acide nicotinique) et une troisième en développement (les inhibiteurs de la CETP). Chez le diabétique de type 2, si l’exercice physique peut réduire de 0,6 % le taux d’HbA1c, de 3 mmol/l celui des TG et la PA de 6 mmHg, le taux de HDL-c reste peu affecté. Sous acide nicotinique, on peut enregistrer une baisse de 20 % des taux de TG et une hausse 20 % de celui du HDL-c ; sous fibrate, une hausse moindre, d’environ 10 %, du taux de HDL-c. L’association des deux, par des mécanismes différents et synergiques, peut se révéler très pertinente en agissant beaucoup plus sur les TG. Les fibrates augmentent le catabolisme des TG sans effet sur leur synthèse ; à l’inverse de la niacine (acide nicotinique) qui réduit la synthèse sans affecter la clairance. Il a longtemps persisté un doute quant aux bénéfices cardio-vasculaires réels des fibrates. Aujourd’hui, Éric Bruckert, grâce à une méta-analyse, conclue à un effet globalement favorable sur les populations ciblées (hypoHDL-c et/ou hyperTG). L’étude ACCORD lipides a depuis confirmé ce bénéfice cardio-vasculaire chez des diabétiques de type 2 ayant à la fois des taux bas de HDL-c et élevés de TG. L’acide nicotinique, lui, a bien fait la démonstration d’une réduction de 30 % des événements cardio-vasculaires, surtout des AVC. En revanche, une étude utilisant la niacine en add-on de statine n’a pas démontré d’intérêt, mais elle serait biaisée au plan méthodologique. L’acide nicotinique apparaît donc très prometteur, mais sa tolérance (flushs) rend son usage difficile. Une nouvelle forme l’associant au lavodipant s’accompagne de phénomènes indésirables plus modestes et devrait être introduite prochainement en France.
Les inhibiteurs de la CETP.
Une mutation inactivatrice de la CETP dans des familles asiatiques s’accompagne à la fois de taux records de HDL-c, 1,6 g/l (chez les homozygotes) et 0,68 g/l (chez les hétérozygotes) et d’une longévité exceptionnelle. Un essai mené avec le premier inhibiteur de CETP, le torcetrapib, s’est néanmoins accompagné d’un accroissement de mortalité, aujourd’hui considéré comme indépendant des effets lipidiques et consécutif à une augmentation des taux d’aldostérone. Une étude post-hoc aurait même montré une baisse du taux d’HbA1c sous torcetrapib. D’autres inhibiteurs de CETP sont actuellement développés, dalcetrapib et anacetrapib, montrant l’absence d’effets délétères, une élévation marquée des taux de HDL-c dans certaines études une baisse de près de 40 % de celui de LDL-c et une hausse de 138 % du taux de HDL-c. Nous sommes dans l’attente de l’étude REVEAL, portant sur 30 000 patients, qui devrait apporter les premières réponses quant à une éventuelle réduction du RCV avec cette classe thérapeutique prometteuse, mais dont le premier représentant avait jeté un froid.
* Service Endocrinologie diabétologie nutrition, pôle DIGIDUNE CHU et Université J. Fourier, Grenoble.
Liens d’intérêts : aucun
D’après le débat « Le diabétologue face au HDL-c » organisé par MSD, avec la participation de M. Krempf et E. Bruckert.
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024