« AVANT TOUTE CHOSE, il convient de rappeler que l’acide hyaluronique est un produit de comblement dégradable. Et il est important de bien faire la distinction entre les produits dégradables et ceux qui ne le sont pas », précise d’emblée le Dr Thierry Michaud, président du groupe de dermatologie esthétique et correctrice à la Société française de dermatologie (SFD). « Les produits non dégradables peuvent donner des granulomes inflammatoires très inesthétiques, invalidants et fréquemment résistants à tous les traitements. Et nous estimons, au sein du Groupe de dermatologie esthétique et correctrice de la SFD (gDEC), que ces produits devraient être purement et simplement interdits dans le domaine de l’esthétique, où le premier principe est de ne pas nuire au patient », ajoute le Dr Michaud, qui exerce à Mulhouse.
Selon lui, il est donc impératif de privilégier les produits de comblement dégradables. « Et parmi ces produits, le chef de fil est l’acide hyaluronique qui est de loin le plus utilisé. Ce produit n’est certes pas totalement dénué d’effets secondaires mais ces derniers restent très rares et sont en général peu marqués et toujours réversibles », souligne le Dr Michaud. Or, les techniques de comblement sont des outils indispensables dans le rajeunissement facial.
Certains effets indésirables de l’acide hyaluronique peuvent être immédiats ou survenir assez vite après l’injection. « On peut voir apparaître après l’injection des hématomes, des œdèmes, une sensibilité transitoire », détaille le Dr Michaud, en précisant que quelques cas de nécroses dans la région fronto-glabellaire ont déjà été décrits dans la littérature. « Le plus souvent, ce problème est lié à des produits non adaptés à la zone ou trop denses et donc à une erreur technique », souligne-t-il.
Dans quelques cas, des complications semi-retardées ont été signalées, une à trois semaines après l’injection. « On peut citer des problèmes de pigmentation qui s’effacent rapidement ou des inflammations non spécifiques qui disparaissent spontanément ou peuvent être traités avec un corticoïde local. Les granulomes retardés sont rares, pouvant apparaître un à plusieurs mois après l’injection. Ils sont traités par corticothérapie et sont réversibles », souligne le Dr Michaud qui conseille aussi de ne pas injecter de l’acide hyaluronique dans des zones déjà traitées par le passé par des produits non dégradables. « Cela peut réactiver l’apparition de granulomes », souligne-t-il, en insistant sur l’importance de la consultation en amont avec le patient. « Le comblement reste un acte médical à part entière qui doit être appréhendé comme tel. Le rapport bénéfice/risque doit être appréhendé au cours d’un interrogatoire conduit de manière stricte. Il faut interroger le patient sur l’existence d’éventuelles maladies auto-immunes, de pathologies granulomateuses ou de maladies allergiques graves. Il faut aussi l’interroger sur l’existence d’une hépatite C : chez les patients traités par interféron, il y un risque de voir apparaître des granulomes sarcoïdosiques dans les zones traitées parfois des années auparavant », précise le Dr Michaud.
VigiDEC, un réseau de vigilance confraternel.
Ce dernier insiste aussi, de manière plus globale, sur la nécessité de faire preuve d’une grande vigilance dans cette activité esthétique. « Je le répète : les effets indésirables restent très rares et très souvent minimes avec l’acide hyaluronique. Mais nous suivons quand même de près tous les signalements d’effets secondaires, notamment grâce à la structure de vigilance VigiDEC que nous avons créée il y a cinq ans au sein du gDEC. Cette structure fonctionne en réseau avec des dermatologues experts dans toute la France. Elle permet à tout médecin, qu’il soit ou non dermatologue, de déclarer tout événement indésirable constaté lors de sa pratique. L’objectif n’est pas de substituer aux structures officielles mais il nous a semblé essentiel d’avoir une structure de vigilance propre au monde de la dermatologie », souligne le Dr Michaud.
Enfin, il faut rappeler la création, au sein de la SFD, d’une commission d’évaluation des techniques dont le rôle est d’évaluer de façon scientifique l’efficacité et les risques des techniques apparaissant sur le marché dans le cadre de la dermatologie interventionnelle (produit injectables, lasers et lampes, etc.)
D’après un entretien avec le Dr Thierry Michaud, président du groupe de dermatologie esthétique et correctrice à la Société française de dermatologie.
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