Longtemps considérée comme psychosomatique, la pelade est une maladie dysimmunitaire, mais un stress médical ou psychologique peut être à l’origine du déclenchement ou d’une poussée de la maladie.
Les études pangénomiques (GAWS, pour genome-wide association study) ont mis en évidence des gènes associés à la pelade impliqués dans l’immunité notamment dans les phénomènes d’autophagie et d’apoptose et dans les voies des lymphocytes T-régulateurs et des Janus kinases (Jaks). Les avancées thérapeutiques possibles ciblent ces deux dernières voies (1).
Une vaste étude confirme ce que les cliniciens savaient d’expérience : la pelade a un très lourd retentissement sur la qualité de vie (2).
Une perspective encourageante
Dans les formes localisées, le traitement de référence reste la corticothérapie locale (topique ou en injections intralésionnelles). La photothérapie est aussi proposée. Les lampes et lasers Excimer (qui émettent des UVB à 308 nm) ont une place en cas d’échec des injections ou chez l’enfant de moins de 7 ans (3).
Dans les atteintes diffuses, la stratégie thérapeutique n’est pas consensuelle. Elle fait appel, selon les équipes, à la photothérapie, aux corticoïdes per os ou en bolus et au méthotrexate. Un programme hospitalier de recherche clinique MTX versus placebo est en cours. Une sensibilisation du cuir chevelu, notamment avec le diphénylcyclopropenone (DPCP) peut également être réalisée afin d’entraîner un afflux de T-régulateurs.
Cette une approche parfois très efficace n’est pas dénuée d’effets secondaires. Un travail rétrospectif récent montre la supériorité de l’association DPCP- anthraline sur le DPCP seul (4).
La voie de l’interféron gamma, avec en aval les Jaks, fait l’objet de recherches. Le ruxolitinib, un inhibiteur de Jaks 1 et 2 indiqué dans le traitement symptomatique de la myélofibrose primitive, a été testé avec succès sur un modèle murin puis chez trois patients. « La repousse a été très significative, indique le Pr Thierry Passeron, mais ce traitement a des effets secondaires et on ne connaît pas encore la durée de son efficacité. Il s’agit cependant d’une perspective très encourageante ».
« Nous avons mené dans le service une étude pilote pour évaluer l’administration d’interleukine 2 à faible dose, sur le même schéma que dans certaines vascularites, poursuit le Pr Passeron. Après 6 mois de suivi, une repousse a été observée chez 4 des 5 patients inclus, en échec du traitement systémique (MTX ou corticostéroïdes systémiques, seuls ou associés) ». La repousse était supérieure à 50 % dans un cas et à 75 % chez un autre patient, ce qui est esthétiquement satisfaisant (5,6). Lors du suivi à 1 an après arrêt du traitement, la repousse s’est poursuivie, passant de 50 à 75 % et 75 à 90 % chez ces deux patients. Ces résultats intéressants ont conduit à un PHRC régional. 50 patients seront inclus en double aveugle versus placebo.
Deux autres études ont été publiée en 2014. L’une suggérant l’efficacité de l’association simvastatine-ézétimibe (7). La seconde avec l’aprémilast, un inhibiteur de la phosphodiestérase 4 (PDE4) développé dans la polyarthrite rhumatoïde et le psoriasis, qui bloque la pelade sur modèle expérimental (8).
« Aucun de ces traitements n’est disponible en ville, mais notre arsenal thérapeutique devrait s’élargir dans les prochaines années », conclut le Pr Thierry Passeron.
D’après un entretien avec le Pr Thierry Passeron, CHU Nice, Inserm U 1065, C3M, Nice
(1) Betz RC et al. Nature Communications n°6, article 5966
(2) Karimkhani C et al. Br J Dermatol. 2014. doi: 10.1111/bjd.13559
(3) Zakaria W et al. J Am Acad Dermatol. 2004;51(5):837-8
(4) Durdu M et al. J Am Acad Dermatol. 2015 Feb 1
(5) Passeron T et al. JAMA Dermatol. 2014 ;150(7):748-51
(6) Hordinsky M et al. JAMA Dermatol. 2014 ;150(7):696-7
(7) Lattouf C et al. http://dx.doi.org/10.1016/j.jaad.2014.11.006
(8) Keren A et al. J Dermatol Sci. 2015;77(1):74-6
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