Marseille (13)
Dr Jacques Bonneaud
J’ai été interpellé par une lettre au « Quotidien » du Dr Michel Lenois qui a beaucoup réfléchi après l’accident d’une navigatrice.
J’ai envie de prolonger sa réflexion en conservant sa logique.
Est-il normal que l’on rembourse les frais occasionnés par l’alcool et le tabac, la sexualité excessive… et pourquoi pas la sédentarité qui est un autre facteur de risque ?
Si on rappelle que la Sécurité sociale ne couvre plus les petits soins, qui concernent le plus souvent des personnes respectueuses de leurs corps, elle n’aura plus qu’à prendre en charge les frais liés aux maladies graves, totalement indépendantes du mode de vie… et le Dr Lenois a peut-être ainsi trouvé la solution pour combler le déficit de l’Assurance-maladie.
Avec mes sentiments confraternels…
Le PRADO, une fausse bonne solution
Martigues (13)
Dr Bernard Faverge
Que l’Assurance-maladie se préoccupe de la bonne gestion financière des sommes qu’elle octroie à la périnatalité est tout à fait normal, voire parfaitement estimable. Que les pédiatres-néonatologues et les puéricultrices soient exclus du domaine médical précis qui représente l’essence de leur expertise professionnelle mérite commentaires de leur part.
L’idée n’est pas, loin s’en faut, de dénigrer le concept des sorties précoces de maternité, l’évolution ambulatoire des soins étant un processus sociétal irréversible. Mais l’Assurance-maladie risquerait de commettre une erreur stratégique en matière de santé publique si elle persistait dans son intention de ne confier le nouveau-né qu’à la seule responsabilité d’une sage-femme libérale. Pourquoi seulement libérale, d’ailleurs, comme le propose le projet PRADO – le « Programme d’accompagnement du retour à domicile » – ? Est-ce à dire ou penser que si elle était sage-femme du service public (par exemple de la Protection Maternelle Infantile), elle serait moins recommandable, donc moins sujette à être recommandée… ?
En effet, il serait périlleux qu’elle assure à la fois le suivi post-partum de la mère et la prise en charge du nouveau-né, même s’il est apparemment en bonne santé. Car, en période néonatale précoce, le plus difficile est de savoir reconnaître qu’un enfant va bien. Ce savoir-faire médical nécessite, outre de l’expérience, une solide formation, une technicité qui ouvre le champ à un véritable travail d’équipe pluridisciplinaire :
- évaluer la perte de poids du nouveau-né (pèse-bébé),
- évaluer l’ictère néonatal (bilirubinomètre transcutané),
- évaluer l’infection néonatale (CRP microméthode),
- évaluer le risque de cardiopathie impossible à J2 du fait des particularités cardiovasculaires de cette période de la vie (saturomètre, prise de la tension artérielle),
- évaluer la relation mère-enfant,
- faire le dépistage auditif (mesure des Potentiels Évoques Auditifs impossible dans les deux premiers jours de la vie en raison de la persistance du vernix caseosa dans le conduit auditif externe qui risquerait d’augmenter les faux dépistages, ce qui inquiéterait à tort les parents),
- organiser des ateliers d’éducation thérapeutique d’aide à la parentalité – la prévention doit se faire « dès le berceau » (couchage du bébé, vaccinations, prévention de la bronchiolite, prévention de la gastro-entérite etc.).
On le voit bien, afin de vouloir copier les pays anglo-saxons qui ont eu l’intelligence de structurer, d’encadrer depuis de longue date et progressivement la prise en charge ambulatoire, en France, il est décidé de façon quasi unilatérale de généraliser le dispositif PRADO :
- sans se préoccuper d’établir un véritable réseau de professionnels du secteur privé ET du secteur public,
- sans se préoccuper de l’évaluation de la littérature médicale et de l’expérience (où se trouve l’évaluation du rapport bénéfice/risque ?). À noter que la seule évaluation proposée est l’indice de satisfaction des parents, ce qui sur le plan scientifique est insuffisant. Que pèserait dans ce cas l’insatisfaction de 2 familles sur 100 dont l’enfant serait décédé contre les 98 % des familles satisfaites dont l’enfant serait vivant, ce qui pourtant exprimerait une mortalité néonatale de 20/mille, peu enviable.
- sans informer les différentes parties concernées sur les coûts engendrés (par exemple, a-t-on anticipé l’augmentation des frais de déplacement d’une sage-femme à domicile quand le prix de l’essence ne cesse de croître ?).
À l’heure où la France fait figure de mauvais élève, dixit la Cour des Comptes, pour son classement peu flatteur au critère de la mortalité infantile (elle est passée du 7e au 20e rang des pays européens), il est grand temps que les décideurs en santé publique, notamment le ministère de la Santé, peu audible sur le sujet PRADO, se réunissent autour d’un projet commun concernant les sorties précoces de maternité, où chaque partenaire a son rôle à jouer, les gynécologues-obstétriciens et les sages-femmes d’une part, les pédiatres-néonatologues et les puéricultrices d’autre part.
Si l’Assurance-maladie persiste et signe dans sa démarche de confier la mère et l’enfant aux seules sages-femmes libérales, et encore il n’est pas certain qu’elles en conviennent volontiers, il arrivera un moment, et ceci sera fort regrettable pour la santé de l’enfant, où le médico-judiciaire s’invitera à la table des indemnisations.
Agissons tous ensemble dès aujourd’hui avant que les lendemains ne déchantent.
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