Occlusion coronaire chronique

Quelles indications thérapeutiques ?

Publié le 19/06/2014
Article réservé aux abonnés
1403142252528777_IMG_131437_HR.jpg

1403142252528777_IMG_131437_HR.jpg
Crédit photo : DR

1403142253528778_IMG_131436_HR.jpg

1403142253528778_IMG_131436_HR.jpg
Crédit photo : DR

L’occlusion coronaire chronique (CTO pour chronic total occlusion) se définit par l’existence sur la coronarographie d’un segment d’artère coronaire occlus, sans passage d’iode (flux angiographique TIMI 0), depuis plus de trois mois (fig 1). Sur le plan anatomopathologique, cette occlusion est athéromateuse fibrocalcique, contrairement à l’occlusion thrombotique traitée en urgence lors d’un infarctus. C’est une lésion stable dont l’angioplastie est complexe et nécessite un matériel spécifique et un opérateur dédié, expérimenté.

Selon les données récentes de la littérature, une CTO est retrouvée dans 15-20 % des coronarographies. En 2013, les recommandations européennes sur la coronaropathie stable ont précisé que les CTO devraient avoir les mêmes indications de revascularisation que les sténoses coronaires : symptômes, ischémie, viabilité conséquente.

Habituellement, la complexité et le taux non négligeable d’échec des tentatives d’angioplastie conduisaient à proposer aux patients pluritronculaires, une revascularisation chirurgicale et aux patients monotronculaires ou sans atteinte du tronc commun, de l’IVA, un traitement médical. Depuis une dizaine d’années, les progrès techniques permettent de proposer une tentative d’angioplastie. Comme pour toute revascularisation, l’objectif est d’améliorer la qualité de vie et si possible l’espérance de vie des patients.

Des études prospectives randomisées comparant la revascularisation par angioplastie au traitement médical seul sont en cours d’inclusion, leurs résultats sont attendus d’ici deux à trois ans. Il faut préciser que les patients traités pour un infarctus par occlusion thrombotique, avec une CTO sur une autre artère, ont une mortalité supérieure aux patients pluritronculaires et monotronculaires. Une CTO est aussi un marqueur de mauvais pronostic chez les patients insuffisants cardiaques, porteurs de défibrillateur implantable, qui présentent alors plus fréquemment des arythmies ventriculaires comparativement aux patients sans CTO.

À ce jour, les principales publications scientifiques comparent rétrospectivement l’angioplastie des CTO versus le traitement médical seul ou le succès d’angioplastie versus l’échec. Une étude italienne a montré que le pronostic était le même en cas d’échec ou de traitement médical sans tentative d’angioplastie. La mortalité avoisine alors les 8 % à 4 ans, alors qu’elle est de 2,5 % en cas de succès.

Ces lésions complexes confrontent plus souvent le cardiologue interventionnel à ses limites et éventuels échecs d’angioplastie, ne lui permettant pas toujours de proposer une revascularisation complète.

En pratique, c’est la question du bénéfice d’une revascularisation complète qu’il faut poser. La grande majorité des travaux confirme le bénéfice fonctionnel et pronostic d’une revascularisation myocardique complète (par pontage ou angioplastie) versus incomplète avec une diminution de la mortalité et des événements majeurs cardiovasculaires. En 2013, une méta-analyse avec 89 883 patients inclus dans des essais randomisés ou études observationnelles a encore confirmé la diminution de mortalité après une revascularisation myocardique complète comparativement à une revascularisation incomplète. Dans une étude ancillaire de l’étude Syntax, le même bénéfice est montré après revascularisation complète des patients tritronculaires avec une occlusion coronaire, par pontage ou angioplastie.

Actuellement, quel est le risque d’une procédure d’angioplastie de CTO ? En 2013, une méta-analyse regroupant 18 941 angioplasties de CTO a montré, en dix ans, une amélioration des taux de succès (fig 2) désormais à 80 % et un taux de complications comparable aux autres angioplasties dans les centres experts (mortalité 0.2 %, infarctus 2.5 %, tamponnade 0.3 %, néphropathie à l’iode 3.8 %). Il faut toutefois souligner que ces interventions sont responsables d’une irradiation plus importante et bien que les lésions cutanées radiques restent exceptionnelles, les mesures de radioprotection s’améliorent encore.

Ces angioplasties, plus onéreuses, utilisent des microcathéters, des guides et matériels spécifiques. Les CTO sont des lésions généralement plus longues et l’implantation de stents actifs permet de réduire considérablement le taux de resténoses, avec de bons résultats à moyen terme, largement supérieurs aux stents nus.

Dr Nicolas Boudou, CHU Rangueil

Source : Bilan spécialistes