Une fois les portes franchies de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, il n’y a que quelques pas à faire pour voir surgir le bâtiment en brique flambant neuf. « Il y a encore un an, c’était un parking ici », s’amuse le Pr Fabrice Menegaux, chirurgien et coordonnateur de la structure. Au rez-de-chaussée, trois lettres imposantes recouvrent de jaune la baie vitrée de l’accueil : « UCA » pour Unité de chirurgie ambulatoire.
À l’hôpital Cochin cette fois, l’UCA ne bénéficie pas d’un bâtiment dédié, elle a pris ses quartiers au sous-sol de la maternité de Port-Royal. Peu importe, le résultat est le même : l’« unité de lieu » chère au Dr Gilles Guerrier, anesthésiste et coordonnateur médical du projet.
Réunir tous les services et les professionnels médicaux au sein d’une même structure pour accompagner au mieux le patient, tel est l’objectif de ces deux projets concrétisés il y a tout juste un mois. « Cela permet d’établir un contact privilégié avec le patient », se satisfait le Dr Guerrier.
Seules les consultations préopératoires avec le chirurgien et l’anesthésiste ont lieu hors les murs. « Même si beaucoup de praticiens prennent le temps de faire visiter les lieux au patient en amont », souligne le Dr Sophie Di Maria, l’anesthésiste qui pilote l’UCA de la Pitié-Salpêtrière.
En outre, les unités bénéficient chacune d’un personnel non médical dédié alors que les praticiens, tous issus des services de l’hôpital, exercent en tant que vacataires. « Plus de cent chirurgiens viennent opérer ici et jusqu’à présent, nos programmes ont toujours été remplis », se satisfait le Pr Menegaux. Seule l’UCA de Cochin dispose de son propre service d’anesthésie.
Retard
Avant même leur inauguration officielle, les unités tournaient à plein régime. « Nous réalisons déjà l’objectif fixé de 70 actes par semaine, se félicite le Dr Di Maria, il nous arrive même d’atteindre les 80 ». Une bonne nouvelle pour l’AP-HP qui a dû casser sa tirelire – pas moins de 14,3 millions d’euros au total (9 pour la Pitié-Salpêtrière et 5,3 pour Cochin).
Cet investissement est à la hauteur de l’objectif que le plus gros CHU d'Europe s’est lui-même fixé : réaliser 50 % de ses interventions en chirurgie ambulatoire dès 2019. Avec un taux d’ambulatoire encore limité à 39 % en 2018, les hôpitaux parisiens, plus lourds à manœuvrer, accusent un sérieux retard sur les résultats nationaux tous établissements (56,8 % en octobre 2017). L'ambition d'Agnès Buzyn est d'atteindre un objectif de 70 % de taux de recours en 2022…
Afin d'accélérer la dynamique, l'AP-HP mise sur cette approche structurelle (déconnectée de la chirurgie conventionnelle) avec l’accompagnement du patient pour mot d’ordre. De fait, pour le Pr Bertrand Dousset, chirurgien et coordonnateur médical à l’UCA de Cochin, la méfiance du malade est le premier frein au développement de l’ambulatoire et la mise en confiance passe aussi par des locaux spécifiques. « On se conçoit comme un service de proximité, l’évaluation des patients en retour est sans commune mesure avec une chirurgie ambulatoire foraine (pratiquée dans le même service que les hospitalisations conventionnelles, NDLR) », se félicite le chirurgien.
L'innovation au cœur du projet
L’autre ambition de ces structures est de faciliter l'innovation et le développement de nouvelles techniques chirurgicales. En plus des opérations déjà couramment réalisées en ambulatoire (en orthopédie ou urologie par exemple), l’objectif est la pratique régulière de chirurgies plus lourdes comme la prothèse totale de hanche ou la chirurgie de la thyroïde.
Du côté de l’anesthésie aussi, on cherche aussi à innover. « Pour limiter l’anxiété, nous avons mis en place un parcours sensoriel avec de l’aromathérapie, de la musicothérapie et même une séance de réalité virtuelle avec un masque au moment de l’anesthésie », explique le Dr Guerrier non sans fierté.
À la Pitié, on attend avec impatience un robot chirurgical de pointe dont l’arrivée est prévue d’ici à la fin de l’année. Installé dans l’un des cinq blocs qui composent déjà l’UCA, les médecins espèrent qu’il permettra de multiplier les actes en ambulatoire. Une chose est sûre, l’AP-HP fait du caractère innovant de ces unités autonomes le cœur de sa communication – en espérant d’atteindre ses objectifs, rattraper son retard et renforcer son attractivité médicale.
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