Gravité
Les traumatismes de l’articulation tarso-métatarsienne ou articulation de Lisfranc comportent une gravité certaine, source de séquelles fonctionnelles invalidantes. Ils restent rares, puisque leur fréquence est estimée à 0,2 % de l’ensemble des fractures. Ce chiffre est probablement sous-estimé, en raison de leur fréquente méconnaissance diagnostique, notamment lorsque les lésions sont purement ligamentaires (traumatismes sportifs) ou lorsqu’elles s’intègrent dans un contexte polytraumatique.
L’interligne tarso-métatarsien relie le médiopied et l’avant-pied, à l’aide de multiples articulations et d’un système ligamentaire complexe. La stabilité du complexe articulaire tarso-métatarsien est liée à la configuration anatomique des articulations cunéo-métatarsiennes formant une arche transversale de type romane et aux éléments ligamentaires qui en renforcent la cohésion. L’encastrement de la base du deuxième métatarsien, renforcé par le ligament de Lisfranc, représente un point de fixité dont la rupture sera le point de départ de la plupart des types lésionnels observés.
Les traumatismes de l’articulation de Lisfranc comportent une grande variété lésionnelle rendant difficile toute tentative de classification. Les mécanismes indirects axiaux ou rotatoires sont les plus fréquents, l’intensité et la direction du traumatisme détermineront le type lésionnel et l’importance du déplacement. En pratique, le rayon médial (colonne) est fréquemment déplacé médialement et les rayons latéraux (spatule) sont déplacés latéralement. Les lésions touchant les deux structures (columno-spatulaires) sont les plus fréquentes dans les traumatismes à haute énergie.
Clinique
La présentation clinique est très variable en fonction de l’importance de la luxation et des lésions osseuses associées. Les lésions à haute énergie (fractures-luxations, traumatismes directs par écrasement) se traduisent par une symptomatologie douloureuse marquée, une déformation du médio-pied rapidement masquée par l’œdème et une impossibilité d’appui. Les lésions à basse énergie offrent un tableau clinique plus discret avec une déformation minime voire inexistante, un œdème modéré et des douleurs à la marche. Les lésions chroniques, conséquences de traumatismes passés inaperçus, se traduisent usuellement par des douleurs tarso-métatarsiennes s’accompagnant d’une perte de hauteur voire d’un effondrement de l’arche médiale liés à l’instabilité de l’interligne de Lisfranc.
Trois incidences
Les trois incidences radiographiques de base (incidence en profil strict, incidence dorso-plantaire de face et incidence oblique interne à 30°) permettent la plupart du temps d’établir le diagnostic. Mais il faut garder à l’esprit qu’elles peuvent être prises en défaut dans les lésions ligamentaires isolées, où la réalisation de clichés dynamiques dépistera l’instabilité tarso-métatarsienne. L’examen tomodensitométrique est plus sensible que l’IRMN pour le dépistage des petites lésions osseuses passées inaperçues lors du bilan radiographique (fractures ostéochondrales, arrachements osseux, avulsion plantaire des bases métatarsiennes), qui peuvent être à l’origine de douleurs secondaires et témoignent de la gravité du traumatisme.
Chirurgie
Un diagnostic précoce et une réduction rapide, anatomique et parfaitement stabilisée sont indispensables à l’obtention d’un résultat fonctionnel acceptable qui évitera des séquelles fonctionnelles à type d’instabilité chronique ou la survenue d’une arthrose secondaire, observée dans 40 % à 90 % des cas.
Le traitement orthopédique (immobilisation plâtrée) n’a sa place que dans les lésions ligamentaires bénignes sans diastasis osseux. Dans les autres cas, le traitement chirurgical est de règle afin de restituer des rapports articulaires anatomiques, sous peine d’une inéluctable évolution arthrosique. La réduction à ciel ouvert et une ostéosynthèse rigide par vissage transarticulaire ont la faveur de nombreux auteurs. L’arthrodèse de première intention sera discutée devant des lésions comminutives interdisant une ostéosynthèse stable.
Les traumatismes du complexe tarso-métatarsien ont mauvaise réputation, comme en témoignent les résultats publiés, qui oscillent entre 34 % et 80 % de résultats satisfaisants. L’évolution vers l’arthrose tarso-métatarsienne secondaire est la complication la plus fréquemment observée. La méconnaissance diagnostique initiale, un traitement orthopédique ou chirurgical inapproprié, l’importance des lésions articulaires en sont les principaux pourvoyeurs.
D’après la conférence d’enseignement du Pr Carlos Maynou, CHRU de Lille.
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