Sténose aortique asymptomatique : des données en faveur d'une chirurgie valvulaire précoce au congrès de l'AHA

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Publié le 15/11/2021
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Crédit photo : PHANIE

Une stratégie basée sur le remplacement précoce de la valve aortique chez les patients ayant une sténose aortique asymptomatique serait préférable à la surveillance, d'après l'étude Avatar communiquée ce samedi 13 novembre lors du congrès virtuel de l'Association américaine de cardiologie (AHA) et publiée simultanément dans la revue « Circulation ».

Dans l'étude, les 157 patients recrutés en Belgique, République tchèque, Italie, Croatie, Pologne et Serbie, âgés en moyenne de 67 ans, avaient tous une sténose aortique, sans symptôme et avec une fonction d'éjection ventriculaire gauche normale. Un test d'effort a été systématiquement réalisé pour s'en assurer.

De tels profils sont traditionnellement problématiques, selon les auteurs, car il y a encore peu de données en faveur du bénéfice d'une intervention chirurgicale précoce. Seule l'étude Recovery, portant sur 145 patients, avait été monté que la chirurgie précoce diminuait significativement le risque de décès d'origine cardiovasculaire au cours d'un suivi de 6 ans (1 % contre 15 %).

Les critères d'inclusion dans Avatar étaient une sténose aortique sévère définie par un pic de vitesse transvalvulaire (Vmax) supérieur à 4 m/s et un gradient de pression moyen supérieur ou égal à 40 mmHg et une surface valvulaire supérieure à 1 cm2. Ce sont les caractéristiques qui figurent dans les recommandations de l'AHA et de la Société européenne de cardiologie (ESC) pour sélectionner les patients symptomatiques éligibles à la chirurgie. Les sténoses aortiques étaient majoritairement causées par une maladie valvulaire dégénérative (84,7 % des cas).

Un risque de décès et d'accident cardiovasculaire réduit de moitié

Parmi les 72 patients qui ont bénéficié d'une chirurgie précoce, environ la moitié (53 %) a reçu une valve mécanique, pour une mortalité peropératoire de 1,4 %, les autres une bioprothèse. Dans le groupe contrôle, une opération de pose de valve aortique a finalement dû être faite chez 25 patients, soit à cause de l'apparition de symptômes (60 %), soit à cause de la progression de la sténose (16 %) ou d'une baisse constatée de la fraction d'éjection ventriculaire gauche en dessous de 50 % (4 %). Dans 20 % des cas, plusieurs de ces facteurs ont justifié le recours à la chirurgie. Il a fallu attendre en moyenne 400 jours entre le début de la surveillance et l'opération.

Après un suivi médian de 32 mois, le critère d'évaluation composite (décès + événements cardiovasculaires) était observé chez 15,2 % dans le groupe chirurgie précoce et chez 34,7 % dans celui sous surveillance, soit une baisse de 54 % du risque d’accident cardiovasculaire ou de décès. La différence était principalement expliquée par les décès toutes causes.

Pour les critères secondaires, les auteurs ont constaté que le risque de décès à 30 jours, d'événements cardiovasculaires répétés, de complication opératoire thromboembolique et d'hémorragie n'était pas significativement différent dans les deux bras de l'étude.

« Ces données plaident en faveur d'une chirurgie précoce, prescrite dès que la sténose aortique est jugée significative, quels que soient les symptômes », conclut le Dr Marko Banovic, du département de cardiologie du centre clinique de Serbie, à Belgrade, et premier auteur de l'étude.

Encore trop tôt pour en tirer des conclusions générales

Chargé de commenter l'étude pour le compte de l'AHA, le Dr Robert Bonow (école de médecine de l'université Feinberg du Nord-Ouest, à Chicago) a indiqué qu'il s'agissait d'une étude encore relativement modeste par sa taille, « dont on ne peut pas encore tirer de conclusions fortes ».

Le taux de mortalité opératoire de 1,4 % était « faible mais pas nul, a poursuivi l'expert. Surtout compte tenu du fait que nous avons une population à faible risque ». Le cardiologue américain estime ainsi « qu'il est important que nous accumulions encore davantage d'informations, et en particulier sur la possibilité de proposer une approche moins invasive ».

Tous les patients de l'étude ont, en effet, fait l'objet d'une opération chirurgicale ouverte. Le Dr Bonow suggère que des études avec recours systématique à une opération percutanée (TAVI) « pourraient se révéler être encore plus en faveur d'une chirurgie précoce ». L'étude EARLY TAVI en cours pourrait à ce titre être déterminante. Mais en attendant, « la réalité du terrain est que beaucoup de nos patients nous disent qu'ils préfèrent attendre qu'ils développent des symptômes avant de recourir au TAVI », indique le Dr Bonow. Il a également fait remarquer que des données sur la durabilité des valves et le suivi des patients à très long terme sont tout aussi importantes.


Source : lequotidiendumedecin.fr